29

803 22 0
                                    

Je démarrais mon moteur avec hâte et m'engageais sur la route à toute vitesse. Ce n'est qu'une fois sur l'autoroute que je me rendis compte que je tremblais, ma conduite était désordonnée et mon regard dans le rétroviseur était livide. Je crois qu'il ne valait mieux pas que je pense à ce qui venait de se passer et que je me concentre uniquement sur le trajet que j'avais à faire. Après plusieurs détours et vérifications par prudence, j'arrivais enfin à l'appartement que j'avais loué sous un autre nom. Je garais la voiture tout au fond du parking afin qu'elle passe inaperçue et montais par les escaliers.
Dès que la porte d'entrée fut verrouillée, je me dirigeais vers le séjour.

Je m'agenouillais face au poêle et y glissais petit à petit les feuilles dans le feu, paquets par paquets. Il y avait tellement de choses, des preuves qui incriminaient Esteban et son père dans des assassinats, des relevés de compte bancaire indiquant de très grosse transactions, des rapports de saisies de drogue et d'arme dans les quatre coins du pays. Un rapport écrit par mon père, décrivant la façon dont l'organisation fonctionnait pour faire passer la marchandises aux frontières, dans les ports, les localisations d'un certain nombre de pistes d'atterrissages privés.

Alors que les feuilles crépitaient dans le feu, je pris le téléphone prépayé que je m'étais dégoté.

- Allô. Résonna la voix grave d'Esteban.

Il n'y avait rien de doux dans sa voix et pourtant l'entendre me réconforta.

- C'est moi.

- Tu te fous de ma gueule ? Où est-ce que t'es ? Mon père m'a dit que tu ne les avais pas rejoins.

- Je suis à Varsovie, j'ai détruit ce que j'ai pu, je ne sais pas si il y avait des copies, j'ose espérer que non-

- T'es allé le voir ?gronda sa voix, je pouvais presque deviner son visage, l'expression dans son regard et à quel point la colère l'envahissait, je pouvais presque le voir.

- C'était un choix de ma part, je te demande de respecter ma décision.

Je l'entendais respirer profondément.

- Il y avait tout sur ses rapports, de la localisation des pistes à tes contacts, les saisies, les coordonnées bancaires, même ceux étrangers, récitai-je comme si ces lignes se trouvaient encore sous mes yeux.

- Qu'est ce qu'il s'est passé là-bas ? Hm ? Raconte moi Alessia.

Sa voix s'était adoucie, mais c'était pour me faire parler, je le savais. Et il savait déjà lui aussi, dans ma façon de parler, le ton de ma voix, le rythme de ma respiration.

- Il y avait Alex aussi.

- Où que tu sois pour le moment n'en bouge pas, je vais envoyer quelqu'un te faire sortir du pays, ne mets pas un pied dehors d'accord ? Alessia ? Tu m'écoutes ?

- Je... Tu sais encore mieux que moi je ne pourrais pas mettre un pied hors du pays, ils travaillaient tous les deux pour les services de renseignement, ils ne me laisseront pas vivante.

À travers le combiné, du verre se brisa sous sa colère. Une larme roula le long de ma joue. Je continuais, la voix brisée :

- Je crois qu'il y avait aussi une part de vengeance personnelle derrière mes actes, il fallait que j'y mette un terme, que je l'arrête.

- Je sais, et tu n'as rien fait de mal, on t'a plongé dans ce monde, et je t'y ai noyé, tu n'as fait que de te protéger, tu voulais juste remonter à la surface.

- Reste avec moi au téléphone s'il te plaît.

L'eau du robinet s'écoulait sur mes mains emportant avec elle le sang de mes coupures dans le siphon. Je regardais le tourbillon se former et couler doucement puis je me tournais vers la baignoire qui allait bientôt déborder si je n'arrêtais pas l'eau chaude. Nue, je m'y plongeais.

Rivera : L'épouse d'un chef de Cartel - 1er jetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant