Réalité virtuelle

Chapitre 10 : Pour notre promesse ...

Depuis que Zhin était parmi nous, les combats étaient devenus beaucoup plus intenses.
Les singes sont très joueurs et il ne faisait pas exception.

Un groupe de cochons qui se tenaient sur deux pattes étaient accompagnés d'un troll.
Bien qu'eux étaient déjà un peu plus grands que moi, le troll, lui, faisait presque quatre fois ma taille.
Énervé, Zhin le regarda avec mépris.
Le monstre, doté d'intelligence, en faisait de même.
Les deux étaient dans un grand combat l'un contre l'autre, dont l'avenir même de la guilde était en jeu.
Tous les deux assis sur une chaîse, leur duel nous tenait tous en haleine.
Parce que les cochons sont réfléchis et versatiles, Zhin, d'une main, faisait un bras de fer avec le troll tandis que de l'autre, devait gagner une partie d'échec mais sans faire tomber les pièces pour ne pas être disqualifié.
La raison pour laquelle nous étions tous pris dans ce grand combat était que Jizu, après avoir discuté avec les cochons, souhaitait leur acheter une paire de boucles d'oreille.
Le troll, d'un grand romantique, avait vu la même paire et souhaitait l'offrir à sa femme.
Trop fière que pour partir sans ce bijou, elle a défié son adversaire, où, après plusieurs demandes répétées sans laisser le temps de respirer de la part de Zhin, elle lui a cédé le combat.

Voilà qu'une pièce venait d'être déplacée et qu'en y faisant attention, notre singe de guerre venait de se laisser distraire, offrant du terrain à son adversaire sur leur bras de fer.
Pour une plus grande motivation dans ce combat acharné, l'Arachna jouait de son violon et deux cochons tapaient sur un tambourin.
Puisque j'avais été interdite de toucher à un malheureux instrument, je boudais en patientant jusqu'à la fin du duel mais où un de mes pieds battait en rythme avec la mélodie.
Celle-ci était accompagnée du marchand, un cochon, qui de sa voix grave et profonde, faisait un bruit sourd pour donner le ton.

C'est là que le drame s'est produit.
Autant les démons étaient l'ennemi numéro un de l'humanité, de très près, se trouvait un groupe de brigands avec à leur tête, Ernesto, le chef de la guilde des Croix inversées.
Ce groupe d'individus, fait uniquement d'aventuriers malfamés, tuait et pillait quiconque pour amasser ne serait-ce qu'un peu de leurs richesses.
Pour une raison que j'ignore, leur guilde et les démons se détestaient, même si j'imagine que dans tous les cas, ce sont des personnes détestables.

D'une paire de boucles d'oreille volée, un drame venait d'arriver ...
Elias, un des deux pilleurs les plus importants juste derrière Ernesto, se trouvait là, bijou à la main.
"J'espère que ça vous dérange pas ... A-t-il ricané.
Mais je vais vous prendre ceci." Expliqua le brigand avec la paire de boucles d'oreille qui tournait autour de son doigt.
Cet adversaire très redoutable était seul sans sa guilde.
Il avait une tenue de flibustier sur lui, un pistolet à sa ceinture et une grande hallebarde qu'il tenait à une main.
Mécontent, le troll s'est levé de sa chaîse et a foncé sur lui.
D'un simple coup de son arme longue, Elias venait de lui transpercer le corps comme s'il n'était qu'une feuille de parchemin.
Mais son attaque ne s'arrêta pas là.
Le coup était si violent que le vent propulsa tout le monde en arrière, sauf Zhin, Rénald et Jizu.
Tous les autres, nous avions été éjectés une dizaine de mètres en arrière et où nous oreilles sifflaient encore même quelques secondes après.

Quand nous sommes énervés, nous, êtres à moitié humains mais ayant gardé une part bestiale, il nous est possible de révéler notre vraie nature.
De pattes qui sont sorties de son dos, de ses vêtements qui se sont déchirés et où des poils blancs sont apparus sur tout son corps, Jizu a été la première d'entre nous à se dévoiler sous sa véritable forme.
Se changeant en une Arachna véritable à l'apparence d'une Atrax robustus mais plus grande qu'un humain et aux poils blancs, Jizu laissa sa rage monter jusqu'à en perdre la raison.
D'une toile qu'elle cracha sur le flibustier, elle s'élança dessus.
Connaissant l'écart de force, Elvirin et Rénald refusaient de prendre part au combat.
Malheureusement pour eux, il n'aura fallu que d'un instant pour qu'ils changent d'avis ...
À peine l'Arachna était arrivée contre son adversaire, que de son hallebarde, il lui trancha trois de ses pattes et tua sur le coup deux cochons qui n'avaient rien demandé.
Notre Arachna adorée, première personne qui pouvait pleinement me comprendre même si nous ne nous étions pratiquement jamais parlé, j'ai crié ton nom si fort en sortant ma dague.
J'ai couru jusqu'à mon adversaire, murmurant aux fées des prairies de m'octroyer leur vitalité.
Je me demandais à quoi servait d'être aventurier pour fuir au premier combat venu.
D'autant plus qu'eux, contrairement à nous, n'avaient pas à craindre la mort.

Incapable de crier, Jizu se reposa sur ses cinq autres pattes et retourna au combat.
Accompagnée par Zhin, je suis arrivée au contact d'Elias.
Mon cœur s'est arrêté de battre lorsqu'un bruit de pistolet pointé dans ma direction venait de tirer.
Au même moment, de sa main, Zhin avait décalé l'arme, m'évitant une mort certaine.
De son poing, notre singe tapa sur la lame de l'hallebarde pour parer le coup sans en subir les conséquences.
C'est là que s'enchaînèrent des attaques des deux côtés, prouvant qu'on avait affaire à un combat d'un tout autre niveau que ce qu'on connaissait.
Pour chaque coup donné, un coup en retour.

J'étais énervée mais capable de rester concentrée et j'ai tiré de mon arbalète en direction de mon adversaire en prenant soin d'éviter de toucher mes compagnons.
Grâce à certains moments passés avec Elvirin auparavant, j'ai appris à mieux viser mais surtout, à n'avoir besoin que d'un seul projectile pour éliminer une cible.
Et à ce moment-là, notre meneur m'a porté assistance.
Tirant tous les deux en direction d'Elias en même temps, une sorte de caparace faite de vent repoussa nos attaques, nous obligeant à esquiver nos propres coups.
En retard mais venant tout de même en renfort, Rénald s'occupa d'aider Zhin qui était au contact de l'ennemi et Nuxie essaya d'envoyer ses oiseaux de feu qui, malheureusement, lui étaient tous renvoyés dessus.
D'un simple coup d'hallebarde, le flibustier envoya valser notre chevalier au loin et dont l'arme était partie encore plus en arrière.
Contrairement à Rénald, de ses deux bras devant lui, le singe se protégea du coup.
Son corps était extrêmement résistant et pouvait se défendre même contre les plus fines des lames.
Et c'est là que sautant au-dessus de lui, l'Arachna lui cracha son venin.
De sa lame, Elias lui embrocha le ventre et s'essuya l'arme en faisant un coup sec qui propulsa le corps inanimé de l'Arachna par terre. 
Courant jusqu'à Jizu, en m'agenouillant à ses côtés, j'ai essayé de sentir son pouls et en voyant son corps reprendre son apparence humaine sans son accord à elle, j'ai compris qu'il était trop tard ...
D'un tir au niveau de la jambe de Nuxie et grâce au vent qui décala fortement la trajectoire de la balle pour toucher aussi les côtes d'Elvirin, notre adversaire venait de mettre trois personnes hors de combat.
J'ai enlevé mon haut et l'ai déposé sur le corps dénudé de mon amie décédée pour lui offrir un semblant de respect et j'ai pris la fiole que j'avais dans mon sac.

"Tu vas regretter ce que tu viens de faire!" Lui ai-je crié en avalant l'intégralité du contenu avant de laisser le récipient vide tomber à terre.
Mon cœur s'est accéléré, j'ai eu des spasmes au niveau du visage, un sourire mesquin qui se dessinait avant de s'enlever pour revenir à chaque fois, mes yeux qui se clignaient d'eux-mêmes et mon corps qui tremblait de toute l'adrénaline qui s'imprégnait en moi.
Plusieurs couleurs se sont mélangées dans mes yeux et de la buée se voyait lorsque j'expirais.
"Laisse-moi semer le doute ..." Ai-je dit en langage draconique.
De leur vitalité que j'emmagasinais, toutes les fées perdaient lentement leur essence vitale pour me l'octroyer, de leur plein gré ou non.
J'ai entendu le rire mesquin du roi des démons résonner dans ma tête mais je n'avais pas le temps d'y prêter attention.
Plus rapide qu'auparavant, je suis arrivée au contact du flibustier et de ma dague, j'ai tapé sur son arme en passant au travers de sa protection venteuse.
Mon coup avait repoussé mon adversaire et dans ma lancée, nous étions toujours l'un contre l'autre alors que nous partions quelques mètres plus loin.
Nos lames ont provoqué des étincelles et pour continuer son attaque, il m'a tiré dessus.
De mon genou, j'ai décalé le tir et de mon poing, j'ai essayé de le frapper.
D'une puissante vague de vent, il m'éjecta en arrière mais très rapidement, je suis revenue à la charge.
J'avais beau avoir toute cette puissance en moi, je n'étais pas habituée et ne savais pas comment l'utiliser.
Alors j'ai transféré tous les pouvoirs des fées dans ma lame et j'ai envoyé tout ce que j'avais et Elias en a fait de même.
Mon attaque ressemblait à une pierre précieuse à l'état brut tandis que la sienne, de sa lame affutée par la magie du vent, était un diamant poli.
À la rencontre de nos attaques, mon arme s'est brisée en mille morceaux et son poing dans mon ventre, j'ai craché du sang par la bouche.
Très rapidement, ma vision s'est brouillée et je suis tombée dans l'inconscience.

"Coucouche panier, le chat." Ai-je entendu avant de ne plus rien voir ou entendre.