♦ CHAPITRE 4 ♦

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▬ Lola & Rita ▬

_ Gabriel ? Gabriel ? Mon petit, mon tout petit regardes moi ...

Sur ma joue, du doux. Chiffon de coton -peut être- qui tapote les plaies qui saignent.

Je me suis endormi, après avoir tant pleuré, tant saigné, que j'en ai oublié que j'avais promis à Lola que je n'allais pas tarder. Petite sœur, cachée derrière ma mère, sa lampe de poche à la main qui m'éclaire, m'aveugle presque.

_ Gabby ?! Gabby hé ..! Qu'est ce qui c'est passé ..?

Lola ravise la colère, s'ancre dans le sol avec moi. Elle aura tout le temps de chercher le coupable plus tard, le créateur de pleurs goûtera au karma à un moment ou à un autre. Pour l'instant elle est là, juste à côté, si inquiète que je la regarde avec tous les regrets du monde.

_ Pardon ...

J'ose murmurer en fixant finalement le sol.

Pardon pour tout, pour les heures d'attentes, pour le poids de l'inquiétude, pour les retrouvailles ratés, pour les nuits sans sommeil, pour les repas jetés, pour les cauchemars quotidiens, pour les points de sutures, pour les miroirs cassés, pour les coups donnés, pour les injures jetées. Pardon pour tout. Pardon de n'être revenu qu'à moitié. Pardon d'avoir laissé derrière moi l'enfant, de n'avoir ramené que le fantôme d'un homme à la place, d'un être qu'elles ne connaissaient pas, mais qu'elles se doivent d'aimer désormais. Pardon de ne plus rien espérer, de me détruire, de me battre. Pardon, je vous aime tant.

_ Pardon ... pardon ...

Les excuses deviennent des sanglots et malgré les avertissements, le rejet probable que je pourrais lui infliger ma mère glisse sa main sur ma nuque et de toute la douceur qui l'habite me blotti contre elle.

C'est sûrement trop pour une mère. Trop, de devoir me regarder sans rien faire. À une époque, elle le faisait mais, plus le temps passe, plus cela creuse quelque chose de sombre en elle. Je n'imagine plus grande peine pour elle que de me voir plonger ainsi sans ne serait-ce que pouvoir saisir ma main pour me ramener à la surface.

Elle essaye, parfois, ça marche.

Aujourd'hui, c'est le cas.

Je tends mes bras, m'accroche à son dos et déverse toute la peine qui m'habite. Tout coule, noie d'abord son tissu puis sa peau. Les sanglots déjà bruyants se transforment en hurlements. Ça déchire la nuit, en fait s'envoler les oiseaux.

_ C'est fini, la ... mon tout petit, c'est fini, on rentre à la maison ...

»»————- ➴ ————-««

_ Laisses toi faire idiot !

Assis sur le rebord de la baignoire, je laisse docilement Lola recoudre mon arcade abîmée. Après les larmes et la douleur est venu le calme, l'abandon. Je suis rentré -comme promis- chez moi.

Nous n'avons pas tant parlé que ça sur le retour. Lola à changé de sujet mi trajet, raconté que demain, Aurore allait venir. Ca m'à fait plaisir, j'ai bien besoin de la présence de la meilleure et petite amie de ma sœur ici, si déjà Lola rayonne, Aurore est à un stade au dessus.

J'ai bien besoin de voir celle qui reste aussi mon amie, qui arrive à mettre un peu de lumière partout où elle passe.

Lola à aussi parlé de musique, d'un nouveau morceau sur lequel elle travaille.

Une fois à la maison, ma mère s'est occupée des premières blessures et est partie cuisiner, me laissant donc avec Lola, devenue experte en réparation de vilains bobos.

_ C'était qui ?

Petite sœur est tenace. Ça lui trotte dans la tête et ça déborde. Elle veut savoir, probablement même qu'elle pense devoir savoir, pour mon bien.

_ Personne. On s'en fout.

_ Moi je m'en fous pas !

La discussion n'avancera pas. Rita à réussi à créer deux enfants encore plus bornés qu'elle, ce qui est -il faut l'avouer- un sacré exploit.

_ Je vais le retrouver et lui peter la gueule à ce putain d'enfoiré ok !

_ Bas vas y essayes, j'te regardes. Comme tu sais pas qui c'est ça va être marrant.

Je ne compte pas lâcher le morceau. Je ne veux pas que Lola passe ses nerfs sur Oscar, non pas qu'au fond ça ne me ferait pas plaisir de le voir s'en prendre une autre mais, je sais ce que cela risque de donner. Je sais bien qu'elle genre de vengeance Tiago réserve aux femmes. C'était déjà une folie que de me battre une énième fois avec Oscar, je ne veux surtout pas que Lola s'en mêle.

_ T'es trop chiant !

_ Ouais et toi t'es trop chiante. J'te dirais rien.

À croire qu'on se chamaille pour une connerie, que ça n'à pas vraiment d'importance. C'est plus facile comme ça, d'agir comme si ce n'était pas si grave, que le risque n'était pas aussi grand. Ça aide à guérir dans un sens de n'être plus que le frère et la sœur qui se disputent faussement, ça se querelle un peu pour éviter les réelles batailles. Ça maintient en place l'illusion que la famille n'est pas tant brisée que ça.

_ Pourquoi tu veux pas l'dire à ce point ? J'le connais ?

_ Qu'est ce qui te fais penser que c'est un mec déjà ?

_ Oh arrêtes hein ! Y à que les hommes qui font pleurer comme ça ! Allez, dis, c'est qui.

Je souris légèrement. Les hommes, toujours les hommes. Ça me soulage tant le cœur que Lola ne leur prête aucune attention, que tout son amour soit dans les bras joyeux d'Aurore.

_ J'ai dis non, laisses tomber Lo.

_ Arrêtez de vous disputer et venez manger !

Rita porte sa voix à travers le couloir. La tonalité se casse un peu, s'emporte, son vieil accent ressort quand elle s'agace. Je regarde Lola, soupir aux lèvres et la tête qui se penche alors en avant. Je relâche tout quelques secondes, tout le poids qui pèse au dos, qui écrase, étouffe. Les bras dans le vide, toujours assis sur le rebord de la baignoire, les yeux enfin clos. J'ai sommeil.

Lola passe sa main sur mon front chaud, en relève les mèches blondes en souriant.

_ C'est pas le moment Gab.

Après les crises, la fatigue ne tarde jamais vraiment à m'attraper. Une fois que le chagrin et la douleur s'estompent, il ne reste plus que l'épuisement soudain. Mal de dos, mal de crâne.

Je frémis sous le contact de sa peau. J'accepte l'affection de Lola, c'est toujours plus simple avec elle. J'accepte surtout de me redresser un peu, de feindre un sourire, maigre lot de consolation pour tous les efforts fournis ce soir de sa part.

Les mots sont dans les yeux, tout se perd quand on se regarde, on se murmure des discours quand on se sourit. J'ai tant besoin d'aide, de cette affection précieuse que peu peuvent offrir. Je remercie tant le ciel auquel je ne crois pas, d'avoir Rita et Lola. Merci d'avoir mis si belles âmes sur mon chemin. Pourtant, je maudit aussi parfois l'amour qu'elles me portent, amour qui comme une corde me serre et me tire vers la vie, vie dont je ne veux pas.

_ On y va ?

_ On y va. 

OSCAR [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant