31 ♥︎

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Ch31, feu
(TW: mention de viol, abus sexuel)

C'était sur un banc non loin de chez elle, sous un lampadaire miteux, baignée dans la brise froide, qu'elle s'était réfugiée. Le téléphone était pendu à son oreille, sur l'écran lumineux les secondes défilaient, sans qu'un maigre son ne sorte de sa bouche. Elle écoutait l'autre côté de la ligne, coite et irrésolue, sans vraiment trop savoir, pourquoi elle l'avait appelé.

"Ça s'est pas bien passé, c'est ça ?"

Elle n'avait pas répondu.

"Tu veux en parler ?"

Elle se demandait pourquoi.

"Je comprends, on en reparlera une autre fois."

Elle réfléchissait.

"T'es où ? C'est bientôt le début du couvre-feu."

Elle sentait qu'il s'inquiétait.

"Il fait bientôt nuit."

Elle avait compris.

"Seiko, tout va bien ?

Oui, je voulais juste t'entendre."

Il avait souri.

— Tu veux que je vienne te chercher ?"

Elle voulait juste l'entendre, et savoir qu'il était là, se rappeler que quelque part dans ce monde trop grand elle avait un petit chez elle en lui, quelque part dans tout ça, il y avait un endroit où elle pouvait toujours retourner.

"Oui... s'il te plaît. — un murmure comme une supplication.

— Envoie-moi ta localisation, je pars tout de suite."

Une vibration dans le creux de sa main, il ouvrit l'app, les chaussures déjà enfilées.

"J'arrive, bouge pas."

Bip Bip Bip.

C'était un type de tristesse inédit qu'elle ressentait, tellement nouveau que ça l'avait atomisée. Un mal de cœur autre, ancré dans les liens du sang, familial. L'écart qui se creusait lentement entre eux et elle, où personne ne se comprenait plus très bien. Un dialogue isolé, où personne ne s'entend vraiment, et ou personne ne veut écouter.

Seiko n'aimait pas retourner chez elle, parce que dès qu'elle posait un pied dans cette maison, ça lui rappelait ce qu'elle avait perdu. Lorsqu'elle passait la barrière du jardin, c'était comme si le temps était resté figé à ce mois de février. C'était comme si tout se fanait, tous les paysages se couvraient de gris, tous les oiseaux devenaient muets. Pourquoi le soleil ne brille pas là-bas ?

Il n'y avait plus de lumière.

"C'est pas de leur faute, alors pourquoi je leur en veux ? — s'enquérait-elle, gangrénée par ses remords. — Je devrais aller m'excuser."

Et tout comme elle était partie, elle avait refait le même chemin dans le sens inverse, comme une enfant qui venait de faire une bêtise, à nouveau devant cette porte, coupable.

Ce n'est pas eux que je devrais punir.

C'est seulement là qu'elle remarqua que la porte était entrouverte, un petit trait de lumière s'échappait de l'intérieur, elle la poussa du pied, sentant ses tissus musculaires se contracter, le pressentiment que quelque chose de très mal allait se passer.

Dans le même salon où elle avait envoyé ses parents se faire foutre se tenait une silhouette noire et tordue, avec une lame démesurée à la place de la main, appuyée sous le cou de son père. Et depuis où elle se tenait, elle avait vu que ses yeux criaient à l'aide.

I can see the light - Shoto x OCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant