Chapitre 11

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— Tu l'as convaincu ?

— Je ne l'ai pas convaincu, répondit Loup en appuyant sur le dernier mot, déposant une assiette en porcelaine sur la nappe rouge. Il s'est décidé, c'est tout.

Si on appelait décider la culpabilité qui avait saisi Loup quand, en parlant des préparatifs de noël, Aubin lui avait maugréé qu'il passerait cette fête tout seul, déterminé à ne pas rendre visite à sa propre famille. Pour le réconforter, Loup l'avait de nouveau invité à partager le vingt-cinq en sa présence, sans grand espoir, puis Aubin avait accepté en lui assurant qu'il voyait bien que ça comptait pour lui.

La façon dont il avait formulé sa phrase, le rendant presque coupable de l'avoir "forcé" à se joindre à lui, l'avait fortement dérangé. Il s'était donc évertué à remettre les choses dans le contexte, expliquant qu'il ne devait se sentir obligé de rien. Aubin avait souri, l'avait embrassé et lui avait promis de passer la veille de noël ainsi que noël avec sa famille. Pourtant, Loup ne s'expliquait pas le stress qui titillait son estomac.

— C'est quand même étrange qu'il ne se décide qu'à quelques jours de noël, tu ne trouves pas ?

— Papa... s'il te plaît. Tu sais qu'Aubin a un concept un peu particulier de la famille. Je pense qu'il s'est juste mis la pression tout seul.

Auguste haussa un sourcil, mais ravala sa réplique. Donner son point de vue n'aiderait personne aussi se contenta-t-il de sourire en déposant la dernière flûte de champagne.

— Je suis content qu'il passe les fêtes avec nous.

— Moi aussi.

Malgré son affirmation somme toute sincère, Loup ne s'expliquait pas l'anxiété qui le gagnait. Sa mère, de son vivant, était une véritable curieuse, capable d'assaillir un inconnu de mille et une questions pour le cerner. À l'inverse, son paternel était plus mesuré, observateur et soucieux de ne pas bousculer l'autre. Aucune raison, donc, de s'inquiéter quant à un possible interrogatoire. Peut-être que sa nervosité provenait de ces rencontres avortées ou annulées entre les deux hommes ? Parce qu'Aubin, malgré ses mots, n'avait pas fait d'effort pour s'intégrer. Pense positif : Aubin fête ces deux jours avec toi. Tout s'arrange finalement ! Il a juste besoin de temps, se raisonna-t-il.

La sonnerie le sortit de ses rêveries. Son père lui adressa un sourire franc avant de s'éclipser pour aller ouvrir. Inconsciemment, Loup lissa sa chemise avant de consulter son portable. Aucun texto. Est-ce qu'Aubin annulerait ? Il en serait foutrement capable, malheureusement. Pas de message, bonne nouvelle ? Il va venir.

— Bonjour Loup.

La voix, aussi douce qu'une brise légère, accompagna l'entrée discrète d'une femme aux cheveux grisonnant dans lesquels quelques mèches blondes tentaient de retrouver un peu de vie. Il répondit à son sourire et lui tendit la main, très peu adepte de la bise.

— Bonjour, Yelena, c'est ça ?

— Oui. On s'est déjà croisé quelquefois, mais très peu parlé. J'espère que ça ne te dérange pas... ma présence, je veux dire.

Il la trouva charmante et timide, de quoi chasser les émotions négatives qui pouvaient parasiter son esprit à l'idée même que quelqu'un remplace sa mère. Tu es grand Loup, personne ne remplace personne.

— Pas du tout ! la rassura-t-il. Mon père a eu raison de vous inviter. Noël ne devrait pas se fêter en solitaire.

Le clin d'œil d'Auguste manqua de le faire pouffer. Même si leurs premiers échanges se firent maladroits, la discussion devint petit à petit naturelle et l'apéritif commença, au mépris de la seule personne absente. Loup lui avait envoyé un message et même en ignorant la pointe de déception qui faisait vaciller la flamme de son cœur, il ne cessait d'espérer.

Tome 2 - True LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant