♦ CHAPITRE 7 ♦

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▬ La tête du roi ▬

La nuit pointe le bout de son nez.

Interdiction formelle pour Lola de mettre le nez dehors, il en est de même pour Aurore qui se retrouve coincée avec nous.

_ Verrouille toutes les portes, prend le fusil avec toi. On revient.

_ C'est mort. Je viens avec toi.

Sur le pas de la porte, Rita que seule la lune éclaire et dont je vois le reflet de la mort traverser ses iris, me dévisage. Derrière elle, Johnny qui ne sourit plus, canif accroché fermement à la main et derrière lui l'immense silhouette de Solal, autre habitant du quartier. Ma mère est amie avec la sienne.

_ J'ai dis non, restes à la maison.

_ Je veux pas t'abandonner ! Laisses moi te protéger !

_ J'ai dis non Gabriel !

_ Pourquoi Solal vient et pas moi ?!

Solal. À peine plus âgé que moi. Massif garçon à la peau tacheté, le vitiligo comme habit, il me dépasse d'au moins deux têtes. Il le dit idiot -souvent- mais, on le dit aussi terriblement puissant, comme si quelque chose de divin l'habitait. Je me demande si ce n'est pas réellement le cas. Ça ne me surprendrait pas tant que ça.

Solal ne fait pas peur normalement malgré sa stature mais posé là, le dos droit, à peine éclairé, ses yeux dorés illuminés comme ceux d'une bête, une barre de métal posée nonchalamment sur son épaule, il me glace le sang.

Je n'ai pas confiance. Je ne veux pas rester là, livrer ma mère à ces hommes que je connais à peine, pour qu'elle aille enquêter sur un être monstrueux.

_ Gabriel, regarde moi. Non, c'est non.

Elle attrape mon visage, presse mes joues trop creuses et colle alors son front contre le mien. Proximité délicate, elle me parle alors, juste à moi, dans un murmure doux.

_ Tout ira bien moineau. Prends soin de ta sœur et d'Aurore. Avec ton don tu peux les protéger mieux que personne, je te les confie ... Je suis en sécurité mon grand, crois moi, personne ne posera la main sur moi. C'est à moi de faire ça, pas à toi. Laisse-moi être ta mère et laisse toi être le frère, Gabriel.

Elle me lâche et se retourne. Rita ne me laisse aucun autre choix que d'accepter. Lutter serait perte de temps et d'énergie, autant pour moi que pour elle et je m'y refuse. Alors que la porte claque, j'aperçois tout de même au seuil de sa ceinture, petit pistolet gris, signe qu'au fond d'elle, le doute s'installe. Non, elle n'est pas sûre que tout ira bien, elle n'en sait rien mais, elle à raison, c'est en grand frère que je dois agir, je dois cesser de jouer au père que nous n'avons pas.

La mère est partie enquêter sur les derniers événements, tâter le terrain, voir de ce qui ressort le plus entre le chagrin et la colère. Il faut qu'on sache, vers où se tourne l'histoire.

En haut de l'escalier, les filles, assises l'une contre l'autre. Elles fixent la porte d'entrée ,en contrebas, comme moi.

_ Ça doit lui plaire.

C'est la voix de Lola qui porte, qui s'adresse à ceux qui veulent bien écouter sa rancœur.

Je me retourne, affiche mon approbation, assis de mon côté en bas des marches, le fameux fusil au creux des paumes, comme promis.

_ Ouais. Il attendait que ça.

Tiago en rêve d'une excuse pour achever les derniers clans qui résistent, pour s'acharner un peu plus, pour dévaster, affamer, torturer. Tout ça, ce n'est qu'une raison pour avancer la guerre de quelques mois, quelques jours. Je frissonne, mon dos me fait mal. Je le sens, tout au creux du ventre, le monstre qui ronge et qui ravage. J'ai peur, je suis terrifié.

OSCAR [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant