•| 1|| Une princesse dans son genre

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Bonne lecture 🖋️✨
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— Théodora, je vous en prie, restez concentrée !

Ma nourrice m'apostrophe alors que je suis en train de m'endormir dans son cours de miss maniérée. Oui, j'ai une nourrice, aussi étrange que cela puisse paraître. Mes parents sont pleins aux as et aiment le montrer à leur entourage. Personnellement, je déteste cela.

Je souffle et mes boucles noires volent, dégageant mon visage. Elle me fatigue. Je déteste quand elle est comme ça.

Mon stylo tape sur le cahier dans lequel je suis censée prendre des notes, mais le cours m'intéresse si peu que la page est totalement vierge — et celles qui la précédent tout pareil. Ma tension monte, ma jambe tressaute sur place, je suis hyperactive, un fait que mes géniteurs ont toujours renié, comme tout ce qui se rallie à ma personne, je ne peux pas rester sans bouger plus d'une heure. C'est sûrement dû à cela que je suis d'un humour grandiose — ceci est une blague, je précise. Je ne suis pas narcissique.

— Vos parents vont déménager, Théodora, il faut vous concentrer pour atteindre le niveau du nouveau lycée que vous allez intégrer.

— Je l'ai déjà, Matty, je l'interromps, mon insolence ayant pris le dessus, même si je sais pertinemment que je vais me prendre un savon.

— Vous ne me répondez pas, jeune fille. Et vous ne me parlez pas sur ce ton.

Je craque mes doigts, ma jambe tremble sous la table — il faut absolument que j'aille courir. Ma chaise grince contre le parquet luisant — volontairement ? pas du tout — et je bondis sur mes pieds.

— Théodora ! hurle Matty, mais rapidement, elle renonce à se lancer à ma poursuite.

L'air frais de l'extérieur me fouette le visage, je souris à la mer qui lèche le rivage quelques mètres plus loin. C'est magnifique.

Je m'imprègne de chaque sensation qui m'envahit. Mes cheveux tout en frisottis secoués par la brise, le parfum sucré de l'air des Caraïbes, les vagues qui glissent sur la plage dans un bruit satisfaisant, le paysage inoubliable de l'océan turquoise dans une parfaite alliance avec le sable blanc et les palmiers.

J'attrape un coquillage, le serre dans ma main, il imprègne une marque rouge sur ma peau, je le jette au loin de toutes mes forces, il entre en contact avec l'eau dans un grand "plouf".

Il n'y a personne sur la plage privatisée, et j'avoue que la plupart du temps, je supplie le ciel pour qu'il emmène quelqu'un se perdre près de ma prison... je suis en manque d'amour conséquent, ça c'est sûr.

Je retire mes chaussures et esquisse quelques pas délicats dans le sable blanc, les grains roulant sous mes pieds. Je me dresse sur mes pointes et étends mes bras vers le soleil, le roulis des vagues sur le rivage me donnant le rythme d'une musique inexistante. Ma peau foncée contraste avec tout ce blanc nacre, le vent glisse dans mes boucles, j'exécute quelques sauts gracieux, balaie le paysage de la main, ferme mes paupières, inspire dans l'air salé, et expire. Je suis bien, trop bien.

La danse m'emporte, je ne peux pas m'arrêter de virevolter les yeux clos, et pour une fois, alors que je suis seule, sur cette plage déserte, j'accepte le fait que je ne me débrouille pas si mal que cela. Il y a forcément quelque chose en moi pour que ce besoin de danser existe. Un talent. Quelque chose.

— Théodora !

Matty hurle au loin, sa voix se rapprochant, je ne la vois pas encore, car elle est cachée derrière les palmiers. Je m'arrête subitement et me laisse tomber sur le sol avec la folle envie de m'enfuir. Mais j'en ai assez de courir, je reste immobile, allongée et je regrette de ne pas être partie quand je la vois débarquer avec mon grand frère et ma petite sœur. Elle compte me mettre la honte devant eux en espérant que cela m'empêchera d'être insolente la prochaine fois. Ce qu'elle ne sait pas et que je ne lui dirai jamais, c'est que je n’en ai strictement rien à foutre.

Haron se lance vers moi et m'attrape un bras pour m'immobiliser.

— Bouge pas, sœurette, je te sors d'affaire quand on rentre, il souffle à mon oreille.

Je soupire et me laisse faire, même si ça me gonfle à mourir, je décide de fermer ma bouche et de rester docile.

Norah esquisse un sourire crispé quand on passe devant elle en me soufflant que je me suis bien fourrée dans les ennuis, cette fois. Je hausse les épaules sans que la matrone ne nous voie et elle retient un rire entre ses doigts d'ange, je lui tire la langue et elle me fait un clin d'œil aguicheur.

Haron me tire sur le côté et je grogne, énervée d'être traitée comme une "chose" vulgaire. Norah et Haron, d'ailleurs, vous aviez remarqué ? Mes parents se croyaient sûrement drôles...

— Théa, me reprend mon frère en plongeant ses yeux noir profonds dans les miens. Arrête ça, s'il te plaît.

— Quoi, encore ? je riposte.

— Faire disparaître le trousseau de clés de Matty. Voler les sujets des contrôles qu'elle s'embête à nous préparer. Tout faire pour saboter le peu qu'elle met en place pour nous trois... J'en cite seulement une partie.

Je hausse les yeux au ciel et pousse un soupir lourd de sens rythmé à la vague qui s'écrase sur la rive, ce qui me donne envie d'effectuer un entrechat mais je me retiens très fort.

— Tu n'es pas toute seule, nous sommes une fratrie. En faisant cela, tu nous condamnes tous, Théa. Matty n'en peut plus. Elle va finir par en parler aux parents et ce sont eux qui vont venir te remonter les bretelles. Crois-moi, ça sera bien moins divertissant.

— Laisse-moi tranquille, Haron, bordel, je fais ce que je veux de ma vie !

— D'accord !

Il hausse les mains en l'air en guise de soumission et me jette un sourire forcé au visage.

— Tu ne viendras juste pas pleurer quand la décision finale de la famille sera de t'envoyer en pension !

Il s'éloigne en me regardant droit dans les yeux de ce regard plein de reproches qui fait tellement mal.

— Bonne soirée, petite sœur.

Quand il a disparu derrière les palmiers, je m'écroule une nouvelle fois par terre et ne peux m'empêcher d'éclater en sanglots, avant de rouler sur le ventre pour étouffer le bruit.

Lorsque le masque de Théodora Judensky explose, ça fait du mal à voir.

Lorsque le masque de Théodora Judensky explose, ça fait du mal à voir

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L'Enfer c'est toi #2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant