Chapitre 20 - Victoria

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Cela fait maintenant un mois que je suis avec Damien. Depuis combien de temps, je n'avais pas été aussi longtemps avec un mec ? Si j'ignore définitivement Loïc de mon passé, depuis toujours. Je n'ai eu qu'une relation sérieuse, si on peut appeler ça une relation sérieuse. Je dirais plutôt, je n'ai eu qu'une relation qui a duré et qui a malheureusement duré trop longtemps. J'étais jeune et je n'ai pas su voir. Pas su voir les travers, pas su voir qu'elle n'était pas seine. Une erreur de jeunesse. Une erreur qui me hante encore, une erreur qui ne s'efface pas d'un revers de la main. Une erreur qui te colle à la peau ou comme une épée de damoclès au-dessus de ta tête, prête à la fendre si tu te plantes encore.

Tout ce que je peux dire, c'est que cela fait un mois et que je ne regrette pas d'avoir jeté mon dévolu sur lui. Il s'épanouit un peu plus chaque jour et je suis fière de faire partie de cette évolution. D'abord renfermé dans son cocon, il éclot pour devenir un magnifique papillon. J'aime croire que je suis son effet papillon, que sa transformation est grâce à moi.

— Prête pour ce soir ? me demande Mady.

— Tu sais bien que non, c'est pour ça notre aprem shopping, je te rappelle.

— Oui, enfin je voulais dire, ça va, tu n'es pas trop stressée ?

— Tu sais, on va juste au resto !

— Juste au resto mais tu veux refaire ta garde robe ! se moque-t-elle.

Nous quittons le bâtiment universitaire en direction du centre-ville.

— C'est plutôt calme pour un samedi !

— Tant mieux pour nous, alors tu veux commencer par quoi ?

— Les fringues bien sûr !

L'odeur des tissus neufs me prend au nez dès l'ouverture de la porte mais mes yeux sont captivés par la multitude des couleurs proposées. L'intérieur de la boutique est pétillant et donne envie de fouiner dans les allées. Mes doigts passent sur les cintres, examinant les vêtements qui y sont accrochés dans l'espoir de dénicher la tenue idéale pour ma soirée.

J'attrape à la volée quelques affaires puis file en cabine.

— Tu me montres dès que tu as finis, quémande Mady.

Comme à notre habitude, un mini défilé a lieu dans la zone d'essayage. Tout passe sous l'œil expert de ma copine. La mise en valeur de ma silhouette, la couleur avec mon teint, le confort en adéquation avec le type de sortie. Elle ne laisse rien au hasard.

La caissière retire avec délicatesse l'antivol de mon nouveau pull fushia, puis elle attrape le slim noir, légèrement brillant, que j'ai sélectionné. Elle glisse le tout dans un sac puis m'encaisse.

— Je pense qu'on a fait le bon choix, se félicite Mady. Les boutons or du pull avec les mêmes détails dorés sur le pantalon, c'est vraiment canon. Il ne résistera pas.

— J'espère, mais le connaissant ça devrait lui plaire.

Tandis que j'avance ravie de mon achat, Mady a un moment d'hésitation.

— Ca va ? lui demandé-je.

— Euh, oui oui. Tu voulais qu'on aille où déjà ? C'est pas de l'autre côté ?

— Non, non, y'a une boutique de chaussures un peu loin là-bas, désigné-je l'endroit de mon index.

Dans mon champ de vision apparaît Damien. D'abord étonnée, je souris à l'idée de le voir plus tôt que prévu. Cependant, quand il se déplace sur le côté, je vois apparaître à ses côtés une femme. Une jolie femme. Pas très grande mais jolie. Blonde.

Qu'est ce qu'il fout avec ?

Je les distingue se sourire et elle l'invite à entrer dans un bâtiment. Le sang quitte mon visage. Je palis.

C'est quoi ce bordel ?

Je me retourne pour fuir ce qui vient de se passer, mais le regard baissé et la mine désolée de Mady ne m'aident pas à relativiser.

— Tu peux me dire ce qu'il fait là ?

— Je n'en sais pas plus que toi.

J'empoigne mon téléphone et lance un appel.

Putain Damien décroche ou je te jure que ca va mal finir.

Je tombe directement sur la messagerie. Je n'y crois pas. Je suis en plein cauchemar. Je fais une deuxième vaine tentative, qui se solde par le même résultat.

Je crispe la mâchoire, jette mon sac sur le trottoir, bien décidé à rentrer chez moi. A quoi bon me faire chier à me faire belle pour ce soir, sachant qu'il passe l'après-midi dans les bras d'une autre. Et plus âgée en plus. Parce que oui, elle n'est pas vieille mais elle n'est plus étudiante, ça crève les yeux. Je ne savais pas qu'il faisait dans les goujats.

De la bile me remonte de l'estomac, me forçant à cracher au pied du premier arbre que je trouve sur mon chemin. Je m'appuie dessus, reprenant ma respiration. Je ferme les yeux avec intensité, je rêve, dites moi que je rêve et que je vais me réveiller.

D'un pas rapide, je rejoins ma chambre et m'effondre sur mon lit. J'enfouis ma tête dans l'oreiller pour hurler mes tripes dedans. Le son étouffé interpelle quand même ma meilleure amie. Elle s'installe à mes côtés, et me caresse le dos dans une tentative d'apaisement.

— Ca va aller Vic. Ce n'est peut-être pas ce qu'on imagine.

— Et t'imagines quoi au juste ?

— J'en sais rien, hésite-t-elle.

— Sois honnête, quelle est la première chose à laquelle tu as pensé ?

Son silence vaut mille mots.

— On est d'accord. Il voit une autre nana.

— Je ne pense pas. Je pense qu'il y a une autre explication. Forcément. Je ne le vois pas faire ça. Tu devrais discuter avec lui.

— J'ai essayé, mais son téléphone est éteint. D'ailleurs en y réfléchissant, ce n'est pas la première fois qu'il le coupe. Une fois, j'étais déjà inquiète qu'il ne me réponde pas. Imagine qu'il était déjà avec elle ?

Mady me serre dans ses bras.

— Arrête de te faire des films, parle lui. Ce soir.

— Je n'ai pas envie d'y aller.

— Et pourtant il va falloir crever l'abcès. Va a ton rendez vous et demande lui ce qu'il a fait. Tu sauras à quoi t'en tenir.

Une larme s'échappe de mon œil. Une larme de tristesse ? Une larme de déception ? Je ne sais pas exactement, mais depuis Loïc, aucun homme ne s'est permis de me faire pleurer. Alors pourquoi lui, oui ?

Learn to trustOù les histoires vivent. Découvrez maintenant