Partie 1 : Avant l'avion

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 Partie 1 : Avant l'avion 

 Il fait nuit. Dehors, le ciel noir pailleté d'étoiles s'empare de la ville. Les rideaux sont soulevés par un quelconque léger souffle de vent à cause de la fenêtre ouverte, les aboiements de chiens et les grenouilles qui coassent s'entremêlent pour former une musique d'ambiance. Dans la pénombre de la chambre, une silhouette se redresse d'entre les draps. La jeune fille rabat ses cheveux dans son dos, se frotte le visage et se dé-enchevêtre des draps. Elle glisse ses deux jambes hors du lit, pose ses pieds sur le vieux parquet qui craque et s'avance dans le couloir pour atteindre la cuisine. Elle tâtonne le mur pour trouver l'interrupteur, et ouvre le frigo, qui vrombit doucement et l'aveugle de sa lumière. Elle attrape une bouteille de jus de fruit, boit directement à la bouteille et retourne dans sa chambre. Elle se glisse doucement sous les draps, se couche sur le dos et regarde le plafond, dans l'espoir de retrouver le sommeil. Elle ne fait guère attention aux bruits qui pénètrent sa chambre par la fenêtre ouverte. Bien réveillée et ne trouvant pas le sommeil, elle se chausse d'une paire de Converse, met un gilet sur ses épaules et sort de son appartement. Elle descends doucement les escaliers en se tenant à la rampe, de peur de rater une marche et de terminer son début de balade nocturne dans l'un de ses couloirs d'hôpital dont elle a horreur. Alors elle sort sur le trottoir. La ville ne se ressemble pas la nuit. D'habitude elle aurait peur d'errer ainsi la nuit, à une heure aussi avancée, seule et en pyjama, mais justement, cette nuit-là lui donne envie de se laisser pousser des ailes. Alors elle déambule. 

   Sonnerie de téléphone. Une deuxième. Début de journée qui commence, une de plus, qui l'ennuiera sûrement comme les autres. Elle les enchaîne, similaires. "Encore cinq minutes.." se dit-elle, le retard la rattrape bien vite, inévitable. Elle saute dans son jean, enfile un tee shirt à la hâte, se brosse les dents en mettant ses chaussures et quitte l'appartement en glissant une barre de céréales basses calories dans son sac à main en cuir élimé. Généralement, elle se tord la cheville sur la troisième marche en partant du deuxième étage, peste jusqu'au rez-de-chaussée, croise le regard désapprobateur de la concierge. Claque la porte. Se retrouve devant les embouteillages. Encore une journée. 

   Les portes vitrées automatiques s'ouvrent sur une Rosalie plus qu'énervée, montre en main, le visage froncé en une moue désapprobatrice. "Vous êtes en retard.". Envie subite de lui mettre une claque. Elle évite soigneusement la secrétaire de l'accueil, marche d'un pas pressé jusqu'à l'open space, retire veste et foulard, pose son sac au pied du bureau et s'installe sur sa chaise en appuyant sur le bouton marche de l'ordinateur. 

   C'est parti pour la deuxième bonne nouvelle de la journée. La joyeuse, bienveillante et adorable Olivia fait son arrivée dans l'open space. Cuissardes et mini-jupe sont ses maîtres-mots, coups bas et talons hauts ses devises. Détournement de regard, le clic-clac des talons sur le lino servant de métronome. Clic-clac, deux pas. Clic-clac, c'est bientôt fini. Elle peut enfin respirer, miss vipère s'est éloignée. Seulement l'inévitable ne s'évite pas, et miss vipère revient, s'accoude au bureau de Clara, tentant tant bien que mal de faire ressortir son soutient gorge push-up de son chemisier trop juste. 

   - Clara, Clara... Dis moi, Clara, que nous vaut l'honneur de ta présence au bureau ce matin ?  

    - Oh.. Bonjour Olivia. Quel plaisir immense de te voir ce matin. 

   La vipère détourne le regarde et s'éloigne, dépitée qu'on ai osé lui répondre. Victoire personnelle. De courte durée, d'ailleurs, parce qu'il faut (encore et toujours) se remettre à la tâche. Règle 1 : faire semblant d'etre occupée. Pianoter d'un air concentré sur son clavier en fixant l'écran, alors qu'on pianote nulle part et qu'on espionne juste les comptes Facebook des : ex/collègues de bureau/vipères. Règle 2 : prétexter une petite pause café et s'échapper par l'escalier de service pour aller se chercher un vrai café, et pas de l'eau diluée en machine, trop fréquentée par les quelques beaufs que comptent la compta et l'open space, qui discutent du "chouette week end en Normandie" et de cigarettes électroniques. Chacun son café. En fait, à part glandouiller en faisant semblant de travailler, des règles, il n'y en a pas tant. Sourire au passage du patron, en osant espérer une augmentation (bien assez peu méritée, tant qu'a faire) ou à la limite une prime de Noël d'au moins sept centimes, parce que le foie gras ça coûte cher. C'est tout. Rentrer chez soi, faussement exténuée, hésiter à appeler une amie, se raviser, se faire des pâtes avec une noisette de beurre (noisette de la taille d'un grain de riz, parce que oui, le beurre ça coûte cher aussi), les manger devant un énième épisode d'une énième saison de NCIS. Vie trépidante. Retour subit à la réalité. 

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 01, 2015 ⏰

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