Il est vingt-deux heures. L'heure où le château commence à sombrer vers le sommeil. Les femmes de ménage font leur dernière ronde et mes parents vont se coucher. Je marche dans le couloir comme les insectes miniatures marchent sur l'eau, émettant la moindre onde de choc sur sa surface limpide. Les immenses fenêtres à ma droite reflètent les lumières des chandeliers, comme un océan reflète celles des étoiles. Tandis qu'à ma gauche, le regard désapprobateur de mes ancêtres m'intimide légèrement. Je hais ce couloir. Je hais le poids de l'atmosphère glaciale qui y règne, mais c'est le seul du bâtiment qui mène à la serre.
Tous ces visages peints avec une grande affinité sur de vastes toiles, observant mes moindres faits et gestes, jugeant chacune de mes pensées, me rappellent le destin que je n'ai jamais choisi. Je rêve de pouvoir quitter mon nid familial, de pouvoir explorer le monde. Et peut-être même pouvoir bâtir un foyer par delà les frontières de ce royaume dont je suis prisonnier. Je me sens comme un oiseau en cage, laissé pour mort dans une volière au milieu d'une forêt colorée. Tant de choses à découvrir alors que je suis coincé entre ces murs froids et inertes.
Étant jeune, je parcourais les étagères bondées de livres dans le bureau de mon père. Les centaines de couvertures ternies par le temps et la poussière, leurs élégantes dorures tracées par la main la plus habile du pays, je les contemplais comme l'on observe une ballerine être absorbée par le souffle magique que lui chante la musique. Parfois, je partais à l'aventure vers de nobles royaumes où tous vivaient le comble du bonheur. D'autres fois, je devenais celui qui défendait le peuple contre les attaques venant de par delà l'océan. Certaines fois encore, j'étais l'ennemi qui ravageait les frontières, détruisait le camp adverse, rasait les vallées. Mais mes romans préférés étaient ceux où nous pouvions s'élancer vers des contrées inconnues et pleines de forces magiques incontrôlables. S'aventurer dans les milieux les plus hostiles, faire face à des situations inexplicables dont seul l'hôte de cette sorcellerie pouvait éclaircir. Chaque jour était un nouveau périple vers un univers différent du mien, là où je pouvais fuir les défauts du monde réel.
Par chance, j'ai eu le bonheur d'avoir un ami pour m'accompagner durant ces dix-sept longues années de vie. Quelqu'un sans qui je n'aurais probablement pas survécu à cet enfermement à long terme. Père m'empêche de trop traîner avec lui. Selon lui, et je cite : "Notre statut social ne doit en aucun cas être affecté par de simples domestiques". Mais Han Jisung n'est aucunement un simple domestique. Il est comme mon frère, une nécessité, un incontournable, j'ai besoin de lui autant qu'il a besoin de moi. Nous nous aidons mutuellement à faire face aux péripéties de nos histoires que nous vivons différemment.
Il est mon meilleur ami depuis notre plus jeune âge et il est hors de question que mon père, malgré qu'il est le roi, m'empêchent de voir mon ami encore tous les soirs. Cela fait maintenant six ans que nous nous donnons rendez-vous toutes les nuits dans la serre du château.
-Lee Minho !
La voix tonitruante de mon père me fait sursauter et revenir à la réalité.
-Où vas-tu comme ça, jeune homme ?
Je me retourne lentement et cette fraction de seconde que je prends pour trouver une excuse me parait une éternité.
-Je vais ramasser un bouquet d'hibiscus syriaques pour Youngsoon, Père. Elle me l'a demandé, mentai-je.
Tout le monde à la Cour sait que ce sont les fleurs préférées de ma sœur jumelle. J'avais alors supposé que cette explication lui suffirait.
Un vrai gentleman. Mais la prochaine fois, dis-lui qu'il y a des serviteurs pour ça.Je le vois sourciller légèrement et sens dans sa voix qu'il n'est que peu convaincu par la réponse que je lui ai fourni sur le vif, mais il ne rajoute rien et s'éloigne, en direction de l'énorme escalier menant à la chambre des maîtres. Je reste figé quelques secondes, à attendre, comme pour m'assurer qu'il est bel et bien partit rejoindre sa femme. Je tourne les talons et continue mon chemin en direction de cette pièce verdoyante où j'ai rendez-vous avec Jisung.
Au moment où j'entre dans la pièce en question, j'ai l'impression d'avoir traversé un portail menant à la jungle. L'air ici est lourd, mais apaisant. L'humidité ambiante se colle à mes vêtements et je peux sentir mes paumes devenir moites. La serre est ma pièce préférée du château, après la bibliothèque. Les nuits où le ciel est dégagé, moi et Han pouvons passer des heures à observer et à détailler chacune des constellations qui se trouvent dans le ciel obscur et sans nuages.
J'aperçois alors mon ami assis sur un banc recouvert de mousse, sous la lumière argentée de la Lune. Celle-ci lui donne l'apparence d'un ange descendu du ciel, malgré sa cicatrice sur la mâchoire et son air morose. Ses yeux noirs d'obsidienne se mettent à briller comme les étoiles au-dessus de nos têtes, lorsqu'il me voit faire irruption à quelques mètres de lui. Son mécontentement remplacé par sa joie de me voir me fait chaud au coeur. Il se lève et vient me saluer. Je lui rends son sourire en le serrant dans mes bras. Comme à chaque fois, nos cœurs se synchronisent pour battre au rythme l'amitié qui nous unie depuis si longtemps.-NOTE DE LECTURE-
Je tiens à préciser qu'aucune de ses informations concernant Han ou Lee Know sont vraies, alors ne prenez pas pour acquis que les autres autres personnages tel que Youngsoon sont des vraies personnes. Ma fanfiction est classée sous cette catégorie pour la seule raison que mes personnages principaux sont basés très brièvement sur Lee Know et Han et leur relation. Dans mon histoire, Han est un fils de domestique comme vous l'avez sans doute compris, et Lee know est un prince. Je ne considère en aucun cas Han comme inferieur!!! Vous comprendrez en lisant ..
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Héritiers d'un même destin
FanfictionLa société se préoccupe de ceux qui sont mis sous la lumière, dévoilés et démasqués, mais on oublie souvent que chaque être est maitre de sa propre vie, tous ont la même valeur. Nous sommes tous les héritiers de notre propre destin.