Poema serrait très fort la main de Blake. Elle ne tremblait plus de froid grâce à lui, blottie dans ses bras réconfortants.
L'ancien prince marchait d'un pas assuré, silencieux. Il se dirigeait vers le port comme il l'avait dit à la belle sirène : il comptait la ramener dans un endroit qu'il connaissait bien, un lieu où ils seraient en sécurité pour la nuit avant de reprendre la route.
Après quelques minutes, Poema se décida à parler.
- Blake, où m'emmènes-tu exactement ? Le port est près de la ville, on ne te reconnaîtra pas ?
- Ne t'inquiète pas, à part les habitants du palais, peu de gens savent à quoi je ressemble exactement : le peuple me voit seulement quelques fois par an lors des cérémonies, et ce de loin. Pour ce qui est de l'endroit où nous allons... C'est une surprise.
Il lui sourit avec tendresse et continua :
- Depuis que je suis petit, j'ai l'habitude de m'enfuir hors de l'enceinte du palais. Je venais voir la mer, même si cela ne durait jamais longtemps. C'est comme ça que je me suis fait de bons amis, ils m'ont accueilli chez-eux à de nombreuses reprises, je suis sûr que tu vas les adorer ! Ce sont les seuls à savoir que je suis le prince, tous les autres en ville pensent que je suis un simple marin... C'est grâce à mes amis si je sais naviguer un bateau, au palais, les gens ont bien trop peur qu'il m'arrive malheur pour me laisser faire quoi que ce soit... C'est à peine si je peux faire deux pas sans avoir plusieurs gardes à mes trousses... Je dois inventer mille et un stratagèmes afin de tromper leur vigilance et m'échapper, et à mon retour, je me fais sermonner. Mes instituteurs, ma famille et la cour tout entière s'occupe de moi comme si j'étais encore un enfant. C'est ironique car je sais que la plupart d'entre eux a peur de moi et n'ose même pas me contredire... Prince puissant ou enfant, je ne sais jamais comment l'on va se comporter avec moi. Je ne sais pas pourquoi je les laisse agir ainsi avec moi et m'ôter toute liberté... Ce doit être à cause de l'habitude, j'ai eu beaucoup de mal à passer d'enfant à adulte dans de telles circonstances. On m'apprend l'art de la guerre et le maniement d'armes mais on me maintient prisonnier soi-disant pour ma protection ? Je ne les comprends pas, ils savent bien que je suis un excellent épéiste et que rien ne peut m'arriver à l'extérieur du palais ! À moins que... Ce ne soit la mer qui les effraie autant. On n'a pas arrêté de me conter d'affreuses légendes concernant votre peuple, mais je n'ai jamais cru leurs mots, au fond de moi, j'ai toujours su que... La mer... Je... Je regrette de ne pas avoir quitté cette prison bien avant...
Il s'arrêta un instant, puis regarda Poema dans les yeux, plein d'émotions. Se confier à elle lui faisait le plus grand bien, comme toujours.
- Mais tu es là maintenant, et je ne reverrai sûrement plus jamais le palais et ses habitants. Je le reconnais, ça fait un bien fou d'être dehors... Avec toi...
- Tu as changé pour le mieux, ton regard s'est éclairé depuis que tu as été libéré. Je suis heureuse que tu m'aies accompagnée. Je n'avais aucune idée de tout ce que tu traversais.
- Tu sais, ce n'est pas seulement cela qui m'a ranimé. Depuis que je t'ai rencontrée, je sens que je deviens chaque jour meilleur... Tu es tellement incroyable... Tu n'as pas eu peur de moi contrairement aux autres... J'étais à la fois entouré de gardes et seul au monde, pas une once de tendresse... Si le passé n'était que prison, guerre et solitude, le présent n'est qu'amour, beauté et liberté... J'ai hâte de découvrir le monde avec toi, Poema...
Disant cela, Blake s'était rapproché de sa bien-aimée, qu'il tenait encore dans ses bras.
Il effleura la joue de la sirène avec sa main froide et ferma les yeux. Il ne sentait pas le vent frais car la chaleur de Poema l'entourait et ses mots résonnaient en lui : "Je suis heureuse que tu m'aies accompagnée".
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Entre Terre et Mer
FantasíaCette histoire parle d'une jeune fille issue du peuple de la mer et d'un prince vivant sur terre. Tout les oppose. Leurs peuples étant ennemis, le prince et sa bien-aimée, qui est en réalité une véritable sirène au chant d'or, se font bannir. Où vo...