Oraison Funèbre (terminé)

Chapitre 19 - L'unique témoin

Murder in my mind - YNW Melly

Rebekah

L'extérieur me fait froid dans le dos. C'est un bâtiment immense, recouvert de mousse et de végétation. Il semble sur le point de s'effondrer. Autrefois, c'était un sanatorium, un terme plus attrayant pour désigner un endroit aussi glauque que celui-ci.

Il y a des centaines de fenêtres et l'herbe autour est si haute qu'on pourrait y disparaître. Je me faufile à travers le trou du grillage, le souffle d'Avery contre ma nuque.

— Je t'avais dit que ton plan craignait.

Je ne prends même pas la peine de répondre à sa tentative d'humour et continue d'avancer vers cette ruine. L'énergie qui en émane n'aide pas à calmer mon cœur sur le point d'exploser.
Le ciel est sombre, seule la lune nous éclaire. Elle seule nous voit, notre unique témoin.

Nous nous arrêtons devant la porte à moitié ouverte. J'ai un terrible pressentiment et si je m'écoutais, je partirai en courant d'ici.
Nous sommes sur le qui-vive, à l'affût du moindre danger. On ne voit presque rien à l'intérieur.

— On fait quoi ? On va vraiment entrer dedans ?

Elle veut s'assurer de ce que nous allons faire.

— Je crois qu'on n'a pas vraiment le choix. Tu passes devant ?

Elle m'éclaire le visage de sa lampe quelques secondes et me pousse en avant en lâchant un
« dans tes rêves. ».

L'entrée est plongée dans le noir, si bien que je me félicite d'avoir pris des lampes de poche. J'éclaire rapidement la pièce tout en la découvrant. L'ambiance de cet endroit est particulière, terrifiante mais excitante. Tout un panel d'émotions s'entrechoquent. Des morceaux de murs recouvrent le sol et un fauteuil est sur le côté, éventré. Il y a ce long couloir, avec plusieurs portes qui semble infini. Un gouffre sans fond.

Nos pieds craquent sur le sol recouvert. Plus nous avançons, plus nous découvrons de pièces. Certaines n'ont pas de portes et nous laissent une vue imprenable sur le chaos qui l'encombre.
Il y a un dortoir, les lits sont alignés et les miroirs au-dessus des robinets sont en morceaux, striés. Ils reflètent nos visages tel une mosaïque.

Des fils pendent du plafond, ce ne sont plus que les vestiges d'une autre vie. La constatation de l'inexorable passé. Nous entrons dans une immense salle, celle-ci est entièrement vide. Si le reste du sanatorium est saccagé, cette partie est dépourvue de gravats ou de papiers. D'immenses escaliers nous apparaissent enfin. Je les fixe, ne pouvant pas m'empêcher de me demander ce qui se trouve là- haut. À quel point cet endroit est-il vaste ?

Un frisson me parcourt l'échine. La mort rôde ici. Elle est partout, tapie dans l'ombre. Un craquement nous fait sursauter, on se colle instinctivement l'une à l'autre.

— C'était quoi ça ?

Je n'ose même pas répondre à Avery. Si je suis friande de sensations fortes, ce que je ressens à cet instant dépasse toutes mes limites. J'entend un nouveau craquement, plus fort cette fois. Accompagné d'un rire. Un putain de rire.

Une ombre qui s'approche de nous, elle est de plus en plus imposante. Elle s'avance et s'apprête à nous avaler. Mon souffle se coupe, je recule très légèrement.
Alex est là. Devant nous.

— Vous l'avez ramené ?

Je me racle la gorge et tente de prendre le ton le plus assuré possible.

— Oui.

Elle s'avance doucement, sortant de l'ombre d'une pièce. Elle était là, elle nous observait depuis le début.