Chapitre 15

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{April}

Un mois est passé depuis que la journaliste a révélé que des cambrioleurs ont tué une famille. Ces mêmes cambrioleurs qui sont la cause de mon traumatisme. L'un d'eux, celui qui a un autoportrait, est bien le pire des deux. Et je suis sûr que c'est lui qui a mutilé l'aînée de la famille. Le fait que cette affaire est liée à celle de ma famille m'effraie. J'ai d'ailleurs appelé ma mère. Je voulais qu'elle me rassure, mais rien. La seule chose qu'elle m'a dite, c'est : « Tu te fais des films, April. Vie ta vie comme tu l'as toujours fait et ne t'occupe pas de ce qui ne te regarde pas. Fous-moi la paix et ne me parle pas de ton père et du passé. Ça ne m'intéresse pas, je suis passé à autre chose. Tu devrais faire de même. » Ça m'a fait mal au cœur. Comment peut-elle dire ça alors que j'ai assisté à toute la scène. Que j'aie vu mon père mourir alors que je n'avais que 13 ans. J'étais une gamine et personne n'est préparé à voir son papa mourir d'une telle façon. Après sa mort, j'ai dû être mis en hôpital psychiatrique parce que je n'étais plus capable de m'occuper de moi. Je ne mangeais plus, ne buvais plus. Je ne dormais plus non plus. À chaque fois que je fermais les yeux, le corps inerte de mon père apparaissait sous mes yeux. Et quand ce n'était pas lui, c'était mon agresseur et cambrioleur. Il m'a touchée, volé mon innocence, m'a détruite. Et j'ai peur qu'il revienne me faire du mal. Je sais que cela paraît stupide, mais je ne peux m'empêcher de penser que demain, ces hommes soient derrière ma porte. Je psychote. Je n'arrive pas à faire une nuit complète sans me réveiller en pleurant et en tremblant. Je n'arrive même plus à sortir de chez moi toute seule. Je rate de plus en plus de cours et même si je l'ai rattrapé avec l'aide de Logan, je sens que je régresse au niveau des études. Depuis ce jour-là, je ne parle plus à Aaron. Il m'envoie des messages, m'appelle, mais j'ignore tout. Quand j'arrive à aller au lycée, je l'ignore. C'est difficile parce que nous sommes dans la même classe, mais j'y arrive. Je ne veux pas qu'il me voit aussi faible. Parce que oui, je suis faible.

Faible et fragile.

Quand je ne vais pas au lycée, Logan vient chez moi vers 18 h pour me donner mes cours et me faire des résumés des leçons. Aaron ne le sait pas. Je lui ai demandé de ne rien lui dire. Je ne veux pas qu'il se sente en retrait ou je ne sais quoi... Je l'ignore, mais ce n'est pas sa faute, c'est moi. Je ne veux pas le mêler à ma vie. Pas à se coter de ma vie.

Ruby, elle, vient souvent dormir à la maison ou je vais dormir chez elle. Ça me rassure. Je suis vraiment devenu paranoïa et je n'aime pas ça. Je veux juste vivre une vie normale comme les gens de mon âge. Pourquoi ce n'est pas possible ? Pourquoi il a fallu qu'il arrive ce traumatisme il y a quatre ans. Quand j'y pense... Je serai au Portugal à l'heure qu'il est. Je n'aurais pas abandonné mes amies et ma grand-mère... Je l'aime tellement. De temps en temps, j'ai des nouvelles, mais rien d'exceptionnel. Elle me manque... Mais je n'aurais pas rencontré Ruby... C'est le point positif dans cette histoire. J'ai rencontré mon âme sœur, ma sœur, ma meilleure amie, ma confidente. Sans elle, je ne sais pas ce que j'aurai fait dans ce pays. J'aurais sûrement dû retourner dans un asile. J'ai eu du mal à y ressortir. Il m'a fallu neuf mois. Et encore, ils ne voulaient pas me laisser partir. C'est quand j'ai recommencé à m'alimenter et à dormir. Ou du moins essayer. Je leur ai fait croire que j'allais mieux. J'ai essayé de faire l'actrice. Au début, ça ne fonctionnait pas, vu qu'ils m'entendaient pleurer et crier dans la nuit. Mais au fur et à mesure, ils m'ont cru. Ma mère a tout fait pour me laisser sortir et nous sommes arrivés en Californie un mois après. J'ai dû me relever plus vite que prévu après que ma mère a commencé à boire un peu trop généreusement. Jusqu'à finir par devenir alcooliques. Il y a deux semaines, j'ai reçu un papier en disant que ma mère était officiellement divorcée. Ça m'a fait un pincement au cœur. J'ai déchiré cette lettre et la brûlée.

***

Je suis dans mon lit et derrière la porte, j'entends sa voix. Il me dit qu'il va rentrer.

— Ma jolie. Ouvre-moi, on va bien s'amuser.

BEFORE YOUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant