Deviens ma plus belle chanson

CHAPITRE XXI-2

Dimanche 14 novembre, San Diego

— Alexandrine, commence-t-il en relevant les yeux sur moi alors que je reste plantée devant lui, surprise par le ton énervé de sa voix et par ses traits tirés, je ne vais pas hurler et ne prends pas mal ce que je vais te dire. Mais, bordel, crie-t-il alors que je sursaute, quand tu pars, pense à prendre ton fichu portable. Ce matin, Ryan me prévient que tu vas rejoindre Paul au mariage de sa fille à San Fernando, pour prendre des photos, mais que tu seras quand même là pour la fin des répétitions. Sauf que tu n'es pas là. J'appelle Paul et il m'annonce que tu es restée un peu plus longtemps que prévu, mais que tu seras là pour le début du concert. Sauf que tu n'es pas là. Ryan passe toute la première partie du concert à t'appeler. En vain. Je tente ma chance durant l'entracte et c'est Marty qui décroche. Il m'annonce que la voiture, que tu as prise, n'est toujours pas là, au contraire de ton portable. Tu imagines un peu ce que j'ai pu ressentir ? me demande-t-il abattu ce qui m'attriste. Je me suis fait un sang d'encre, Alexandrine. Tu as plus de quatre heures de retard.

— Je suis vraiment désolée, je m'excuse en m'asseyant devant James et culpabilisant de lui avoir fait peur. Je me suis retrouvée prise dans un bouchon à la suite d'un accident, et quand j'ai voulu prévenir Ryan, j'ai remarqué que je n'avais pas mon portable. Ce matin, il m'a tellement pressée pour partir que je l'ai oublié sur ma couchette. Et, je ne connais aucun numéro de téléphone à part celui de Liz, donc aucun moyen de te prévenir.

— J'ai vraiment eu peur, reprend-il plus doucement, qu'il te soit arrivé quelque chose. Je me suis imaginé mille et un scénarii tous plus horribles les uns que les autres.

— Je me doute, je grimace en posant ma main sur la sienne qui est sur la table.

Alors qu'il me fixe, je sens sa main se soulever sous la mienne. Et quand il entrelace nos doigts, je vois, enfin, un sourire prendre place sur son visage et je sens mon cœur cogner plus fort contre ma poitrine. Au départ, c'est parce que j'ai été surprise qu'il crie, mais maintenant, c'est dû au contact de sa peau sur la mienne. Durant ces deux mois passés sur les routes américaines, on a beaucoup parlé, rigolé et appris l'un de l'autre, ce qui a permis à notre relation de se renforcer un peu plus chaque jour. Voilà pourquoi je comprends parfaitement sa réaction d'aujourd'hui. Je sais que si les rôles avaient été inversés, j'aurais eu aussi peur que lui qu'il lui soit arrivé quelque chose de grave.

— Promets-moi que tu feras attention la prochaine fois, me demande-t-il à voix basse.

— Je te le promets James, je souris en le fixant pour qu'il voie que je suis sincère.

— Sinon, je vais être dans l'obligation de te coller un garde du corps aux fesses qui te suivra vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

— Non merci, ça ira, je réponds amusée.

— Comment s'est passé le mariage ? questionne-t-il alors qu'il ne lâche pas mes doigts et qu'il a retrouvé un visage plus doux.

— Super, je réponds en récupérant le bouquet de mon autre main et en le posant sur la table.

— Tu as attrapé le bouquet ?

— En réalité, il a atterri directement dans mes bras, je n'ai même pas pu faire semblant de le rater.

— Tu seras donc la prochaine à te marier, c'est un bon présage ça.

— J'ai déjà donné et je ne suis pas près de recommencer.

— Tu ne voudrais pas te marier dans le futur ? me demande-t-il surpris.

— Je n'en sais rien. Comme on dit, chat échaudé craint l'eau froide. Et puis, ce n'est pas près d'arriver. Et toi ? Tu y as déjà pensé ?