Ce matin Théo a mit beaucoup de temps à finir de se préparer, et maintenant je suis à la bourre pour aller au boulot. Nous sommes arrivés à l'école dans les temps mais habituellement je le dépose beaucoup plus tôt pour pouvoir arriver à l'heure au café. Ce matin, le moins que l'on puisse dire c'est que c'est raté.
Je roule au maximum de la vitesse autorisée en priant pour ne pas être trop en retard par peur de me faire taper sur les doigts, mon patron ne m'appréciant pas beaucoup. Il pourrait me virer juste pour un retard j'en suis certaine et c'est bien la dernière des choses dont j'ai besoin en ce moment.
Mon téléphone se met à sonner sur la banquette du côté passager et je jette un rapide coup d'œil à celui-ci. Je soupire, c'est ma mère. J'hésite à lui répondre un instant mais décrète finalement que ça peut attendre. Je prends alors mon téléphone et le met en mode vibreur, tout en gardant un œil distrait sur la route. En le reposant sur le siège passager, la voiture devant la mienne s'arrête soudainement, sûrement à cause d'un autre véhicule un peu plus loin.
Je freine précipitamment mais n'ai pas le temps de m'arrêter au vu de la distance qui nous séparait. Ma voiture rentre dans celle devant la mienne, pas très violemment certes, mais assez pour l'amocher.
- Et merde ! Jurais-je
Sonnée, je vérifie mon état en tâtant mon corps. Celui-ci est entièrement contracté et je suis légèrement étourdie mais je vais à priori relativement bien, si on omet le fait que je sois sous le choque. Je souffle un bon coup en essayant vainement de calmer le rythme effréné de mon cœur et lève la tête vers la voiture que j'ai heurté. Je plisse les yeux dans l'espoir de voir l'intérieur du véhicule à travers la lunette arrière afin de vérifier que la personne qui s'y trouve se porte bien. J'arrive à reconnaître la main d'un homme qui me fait d'ailleurs signe de me garer sur le côté, mais rien d'autre. Sa main avait l'air d'aller bien, en tout cas.
J'hésite pendant un instant à fuir, je n'ai absolument pas les moyens de payer les réparations d'une voiture aussi belle et récente, ma vieille Saxo ne peut qu'en témoigner. Je décide tout de même de me garer sur le côté par peur qu'il ne prenne la matricule de ma voiture et que les flics ne toquent à ma porte demain matin. J'ai cru mourir un instant mais, actuellement, ce qui me fait le plus peur c'est de devoir régler les frais de réparation du véhicule d'en face. Et du mien. Pourquoi ai-je pris ce fichu téléphone.
L'homme sort de sa voiture et se positionne à côté de celle-ci avant d'en faire le tour, probablement pour constater les dégâts. Je détourne rapidement le regard quand je l'aperçois amorcer un mouvement pour se tourner dans ma direction, trop gênée et occupée à me demander comment je vais faire pour le rembourser tout en ayant les moyens de me nourrir avec autre chose que les sourires de mon fils pour les quatre prochains mois.
Je prépare mentalement mes excuses et souffle un bon coup, espérant que ça me donne un semblant de courage, avant de sortir également de ma voiture plus que modeste.
En me voyant sortir de mon habitacle, l'homme s'approche dans une démarche assurée, les sourcils froncés. Il n'a pas l'air ravi de me rencontrer. J'aimerais pouvoir en dire autant mais je suis trop occupée à observer son visage. Diable, ce qu'il est beau. Un regard sombre à en faire tomber une sexagénaire, une mâchoire carrée joliment ornée d'une barbe de trois jours, des boucles brunes qui lui tombent au niveau du cou ainsi qu'une peau légèrement hâlée. Diable, ce qu'il est beau.
J'arrête de rêvasser quand il arrive à mon niveau, son regard noir me rappelant la raison malencontreuse de notre rencontre. Il me toise de toute sa hauteur et je lui offre un sourire crispé, sentant le sang me monter aux joues. Il me met mal à l'aise et je n'arrive pas à savoir si c'est sa colère palpable ou sa prestance qui me fait cet effet. Peut-être un mélange des deux.
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Renaissance
RomanceCharlotte Andrieu, ce nom résonne dans le néant. Elle n'est personne, elle ne l'est plus. Voilà plusieurs années qu'elle est à l'autre bout du monde, la pauvreté lui collant à la peau. Endettée jusqu'au cou, elle tient bon. Elle tient bon pour l'un...