j'avais couché avec noé une fois, une nuit, un toit, un vent frais sur nos corps nus. des étoiles. y avait rien de prévu, y avait rien de prévisible, et d'ailleurs c'était souvent comme ça avec noé.c'était pas de l'amour, je m'en suis rendu compte plus tard, c'était juste deux corps paumés, deux têtes malades, deux mecs largués. mais c'est pas grave, parce que c'était imparfait, et c'était beau.
alors nos bras s'étaient trouvés, nos ventres bouillaient, ses cheveux rouges sur mon torse étaient comme des filaments de son cœur éparpillé, de ses tripes recousues, puis il y avait le silence. on faisait l'amour dans le plus grand des silences, sous la réprobation du monde.
j'avais oublié comment je m'appelais, où je vivais, et ce que je voulais faire de ma foutue vie. il y avait juste noé et noé dans mes poumons et noé dans mes yeux et noé dans ma tête. noé partout, coulait comme du miel sur ce toit et sur le ciel, avec sa tristesse rouge.
mais là, peut-être parce qu'on était nus, peut-être parce que j'étais si prêt de lui qui je voyais sous son visage, j'avais vu les tâches. celles qui sont sous la peau, celles qui ne se lavent pas. j'avais vu le bleu qui ne partira jamais. son corps-prune, son corps peint tout entier. et c'était horrible, tout ce bleu.
alors j'avais pleuré dans le silence. j'avais pleuré parce que noé ne le faisait pas.
- je sais, c'est triste, il m'avait juste dit.mais il avait jamais lâché un sanglot. il m'avait regardé lui en offrir mille comme des pétales de roses.
- pleure pas. c'est débile, les larmes ne sont pas des gommes.
je l'avais regardé. deux secondes.
- t'es con noé, t'es vraiment trop con.
j'avais entendu son rire s'accrocher aux étoiles et exploser dans l'une d'elle.
j'entendais le saignement de ma tête parce que nos corps ne pouvaient être que deux et qu'il devait se sentir si seul sous sa peau.
et au fond je sentais qu'il était loin noé.
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noé ne m'aime pas
Short Storyet ils firent l'amour dans le plus grand des silences, sous la réprobation du monde