Fragment 1

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#lescalepinsdozias

Je sentis passer une pensée. Elle se pansa d'essence et se dépensa en sens. Et alors que sa coquille vide tombait sur le fond de l'océan de mes pensées, une autre pensée l'engloutit frénétiquement. Elle se pensa alors pansée. Mais un tentacule émergea, tout en ventouses de quêtes, et l'écrasa sur un plancher océanique de luxures. Nuit d'insomnie.

Les calepins d'OZIAS


Givrés

Le hublot était embué, du moins c'est l'impression que j'avais. Il avait cet aspect translucide et brumeux qui évoque la moiteur. J'émergeais à peine d'une sieste soudaine. Sur l'écran en face de moi, le film se poursuivait.

Quelques lourdeurs dans mes muscles m'ont incité à me redresser pour m'étirer. Ma voisine, la passagère d'à côté, était là. Toujours aussi illisible. Calée dans son siège avec son regard lointain. Elle paraissait si distante.

Je jette un regard par le hublot. L'astre solaire dardait une marre de nuages quelque part au loin. Et l'horizon me paraissait peint sur un quai de métro. Entre lui et moi, des rails, des lignes, des nuages. Le vol était paisible. De mon point de vue en tout cas.

La voisine venait de bailler. Elle a retiré ses lunettes et se frotte méthodiquement les paupières. Pas brutalement, de façon compulsive et désordonnée comme j'aurais fait. Mais avec douceur et délicatesse. Elle exerçait une infime pression avec son pouce et son index, chaque doigt ayant l'air de caresser avec bienveillance le globe oculaire plutôt que de l'écraser. Cette femme avait une douceur naturelle qui m'intimidait.

Je jette un nouveau regard par le hublot et j'ai l'impression que les ailes sont couvertes de givre. Givrées ! Comme ces humanoïdes qu'elles convoient. Ces ailes affrontaient le froid du ciel et la vitesse de cet oiseau volant qui avait dans ces flans plusieurs dizaines d'âmes. Des univers miniatures, aussi similaires que différents.

Le coude de ma voisine vient de heurter le mien. Elle m'adresse un presque sourire en signe d'excuse. Mais pourquoi ses lunettes lui donnent cet air sage ? Et pourquoi elle me fait penser à Mia Khalifa ? Elle n'a pourtant rien d'oriental, en tout cas pas de mon point de vue.

Elle dégageait une noblesse simple et un parfum vanillé qui m'interpelait. Une inconnue. Je ne connais même pas son nom. Son histoire encore moins. A part un bonjour, nous n'avions échangé qu'un ou deux regards. Elle et moi, n'étions que des trajectoires qui s'effleurent, comme tous ces passagers à bords.

Tous givrés surement. Et portés par les ailes givrées d'un tube d'aluminium qui viole le ciel, suspendu au-dessus des nuages.

A suivre


Mon miel, ne t'affole pas.

Au fond je m'en fous que tu me parles ou que tu te taises. Je comprends suffisamment le langage de ton silence pour te savoir à demi-mot, ou à demi silence pour le coup. Ce que tu ne diras pas m'atteindra quand même. Il suffit que tu le vibres. Je suis de cette nature-là et tu le sais. Une corde de violon que le moindre frémissement de tes émotions fait geindre. Une peau de tambour un peu trop tendue qu'il te suffit d'effleurer pour la rompre.

Les calepins d'OZIAS


#lescalepinsdozias

Bruno

Le hall de l'aéroport avait cette atmosphère impersonnelle qui m'égare souvent. Ce son réverbeux et enveloppant, reconnaissable entre mille. Me voilà dehors. Pourquoi ma seule préoccupation est d'allumer une cigarette ?

LES CALEPINS D'OZIASWhere stories live. Discover now