Chapitre 10 - Fauteur de troubles

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– Il y a forcément des traces. Il ne peut pas s'être échappé et volatilisé aussi facilement.

– Absolument tout jouait contre nous. Le système ne fonctionnait plus et il a mis hors service celui de secours.

– Même si nous avons agi rapidement, ce n'était pas assez. Si je ne m'abuse, il avait fait un petit saut par chez toi avant qu'on ne réussisse à le recapturer.

– En effet.

– Qui sait, s'il n'y serait pas retourné.

– J'en doute, mais on ne peut pas se permettre de ne pas aller voir. Tiens, as remarqué ? Ils ont stipulé dans le rapport que des embarcations de secours ont été retrouvées échouées un peu partout à proximité de la plage. Tant qu'à faire, autant aller y jeter un œil.

– Tu vas me dire qu'il a nagé du labo jusqu'au rivage sans qu'on ne le remarque ? En plus, on le maintenait dans un état de fatigue élevé.

– Il faut se rendre à l'évidence. Il a saccagé notre base, s'en est pris aux équipes et il s'est échappé.

– Notre plan était pourtant si bien préparé. Tant d'années à le mettre sur pied pour qu'il tombe à l'eau d'un simple claquement de doigts. Je refuse d'y croire.

– Alors n'y crois pas.

La tension entre Valentin et Basile augmentait. Le duc persistait à ne pas réaliser l'état actuel des choses. En plein déni, il lisait sans interruption les rapports qu'ils avaient pu récupérer. Attendre une réponse des plongeurs qui étaient partis sauver ce qu'ils pouvaient dans l'ancienne base, mettait ses nerfs à vif.

– Basile, ta fille l'a bien vu ? C'est aussi elle qui l'a en partie soigné ?

– Je n'en ai pas la certitude, mais c'est fort possible.

– Je veux lui parler.

– ...

– Pourquoi je ne t'entends plus ? Tu es contre ?

– Je réfléchissais simplement. Choisis bien tes mots au risque qu'elle t'ignore.

– Du peu que j'ai perçu, j'ai à peu près cerné le personnage.

En fin de journée, aucune information cruciale n'avait été dévoilée. Malgré tout, c'est d'une humeur moins massacrante que Valentin se présenta au domicile de son collègue.

– Bonsoir Julia.

– Bonsoir.

Décidé à en apprendre davantage, le duc alla rejoindre Malori. La croisant dans le couloir, il l'arrêta.

– Jeune fille, m'accorderais-tu un peu de ton temps ? J'aimerais échanger avec toi.

– Je vois difficilement en quoi ce sera utile. Je pense aussi que mon père sera celui qui vous procurera le plus d'informations.

– Basile est incapable de me fournir les réponses que je convoite.

– J'écoute, mais je ne promets pas que je répondrai.

– Comment ça se passe avec mon fils ?

– Comme sur des roulettes, enfin. Je n'ai pas l'intention de m'attarder sur le sujet avec vous. Il en va de ma vie privée et cela ne vous concerne pas.

– Je comprends. Dans ce cas, laisse-moi entrer dans le cœur de la problématique. As-tu oui ou non soigné un démon lorsque tu étais gamine ?

Malori fixait l'homme dans les yeux sans lui donner d'explication. Il en déduit donc que l'événement s'était produit.

– Est-il revenu auprès de toi au cours des dernières semaines ?

– D'accord, il se peut que j'aie servi d'infirmière à une créature il y a quelques années en arrière, mais récemment à part mes camarades et les membres de cette maison, je n'ai parlé à personne d'autre.

Les propos de son interlocutrice semblaient sincères alors malgré le doute qui persistait, Valentin décida de la croire.

– Fais bien attention à toi, il s'agit d'un être extrêmement dangereux.

– Je veillerai à ne pas croiser son chemin. Je présume que je devrai en parler à mon père, si je venais à le voir.

– Dans le meilleur des cas, oui.

– Entendu. Merci des conseils.

La soirée a suivi son cours normalement. Pendant que Julia nettoyait les plats, Malori mettait les couverts dans le lave-vaisselle.

– Tu comptes rejoindre ta mère ?

– Ma décision n'est pas prise. Je ne suis pas sûre de vouloir me tenir à ses côtés alors que ça fait tout juste quelques semaines, qu'elle a refait surface. Après, je reconnais que ça me fait plaisir de passer du temps en sa compagnie. Mon père m'ignorait à chaque fois que je mettais le sujet sur le tapis. Je ne sais d'ailleurs pas pourquoi ils ne sont plus ensemble.

Une main sur son menton, l'invité prêtait une oreille attentive à la conversation des deux femmes sans se douter un instant qu'il s'agissait d'une comédie soigneusement préparée par les deux femmes.

– Ta compagne et ta fille semblent s'être rapprochées.

– J'ai remarqué ça. Malori fait un peu moins la forte tête depuis que Julia vit avec nous. As-tu pu mettre le doigt sur ce qui t'intéressait ?

– Dans un sens. Sache qu'à partir de maintenant, je garde ta gamine à l'œil, et pense à installer des caméras à l'extérieur par mesure de sécurité.

– Je m'en occupe au plus tôt.

– Dernière chose. Tu ne m'avais pas partagé l'information concernant ta femme.

– Vu ce à quoi nous avons dû faire face, je n'ai pas jugé utile d'en parler. Si tu veux en savoir plus, la procédure de divorce a été entamée et comme nous sommes tous deux d'accord sur le fait d'en finir au plus vite, les choses se déroulent sans accroc.

– J'espère bien qu'elle ne viendra pas fourrer son nez dans nos affaires.

– Je mettrai un point d'honneur à la tenir éloignée.

– Malori compte la retrouver ?

– Pas de ce que j'ai compris. Selena lui a proposé plusieurs fois sans jamais obtenir de réponse positive. Pour une fois que son entêtement m'arrange, elle a mon soutien entier.

– Sur ce, merci pour tout. Tu féliciteras Julia pour le repas.

– C'est Malo qui l'a préparé, Julia s'est occupée du dessert.

– Étonnante, ta fille. Je maintiens mes propos. C'était vraiment très bon.

– Je n'y manquerai pas. À demain.

Sur la route, Valentin était lancé à vingt kilomètres au-dessus de la limitation autorisée. Malgré les phares qui éclairaient le bitume, il ne vit pas la créature lui foncer dessus. Le véhicule effectua plusieurs tonneaux, avant de retomber sur les roues. Pourtant sonné par le choc, le duc n'hésita pas à empoigner son arme.

Le démon se trouvait face à lui, prêt à charger une seconde fois. Bien décidé à lui rendre la monnaie de sa pièce, le conducteur vida son chargeur sur la créature qui n'avait pas le temps de s'attarder sur la scène de l'accident. Soudainement, le blessé se mit à rire à gorge déployée tel un fou. Dès qu'il récupéra son téléphone — lui aussi amoché — il appela Basile.

– Il se décide enfin à passer à l'action. Cet incapable a envoyé un laquais jouer au taureau.

– Tu vas bien ?

– Ma voiture s'est changée en attraction, mais oui, je me porte comme un charme. En agissant comme il vient de la sorte, il nous montre qu'il ne restera pas les bras croisés. Tiens-toi prêt mon ami.

Déchéances T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant