À l'horizon, le soleil se couche. Le regard braqué sur la route, cela fait plus d'une heure que je prends sur moi. En retournant dans la chambre de Pearl, j'ai revêtu mon masque de crâneur afin de la taquiner, mais au fond... je suis mort de trouille.
La voir sourire, rire et rayonner à l'approche de Poppy m'a fait éprouver tout un tas de sentiments très douloureux en silence. Elle est tellement jeune. Cela fait des années que je me prépare à la possibilité qu'un matin, elle ne se réveille plus, que son corps fragile la lâche pour de bon ; que ses poumons défectueux ne tiennent pas une journée de plus. Oui, je vis avec cette peur au ventre depuis que j'ai dix ans, et au fil du temps, même si elle s'est atténuée, elle n'a jamais vraiment disparu. Elle est restée tapie là, dans un coin sombre de mon esprit, dans l'attente. Aujourd'hui, elle a ressurgi avec une force étonnante. On n'est jamais prêt pour la pire des fatalités.
Nous n'avons vraiment pas de bol, putain !
Les mains serrées autour du volant de ma Jeep, mes jointures virent au blanc. Mes dents craquent sous la pression de mes mâchoires contractées, au point où le grincement me provoque une légère douleur. Cette dernière m'aide à canaliser ma colère, ma frustration, ma peine.
— Knight ?
La voix de Poppy me ramène à elle, assise sur le siège passager. Son regard inquiet me provoque des palpitations. J'ai essayé de faire semblant que tout allait bien, et même si je suis plutôt doué dans l'art du bluff, cette fille a un don pour me percer à jour.
— Tu es bizarre depuis tout à l'heure. Il s'est passé quelque chose ?
— Qu'est-ce qui te fait dire ça ? rétorqué-je en focalisant à nouveau mon attention sur notre trajet.
— Tu es revenu dans la chambre sans le soda de ta sœur, observe-t-elle.
— Il n'y en avait plus, mens-je.
La vérité, c'est que je n'ai jamais atteint cette cafétéria.
— Excuse-moi de te dire ça et de peut-être foutre en l'air tes rêves si jamais le métier d'acteur t'attire, mais ton acting craint.
Son honnêteté pleine d'ironie m'arrache un rire bref, mais il est rapidement remplacé par ce sentiment d'angoisse, d'oppression qui me prend depuis tout à l'heure. Je me sens noyé dans un océan d'air vicié, incapable de remonter à la surface pour reprendre mon souffle. Ma vue se brouille pendant un court instant, mais suffisant pour me faire flipper de nous envoyer dans le décor. Dans un crissement de pneus, je gare abruptement la voiture sur le bas-côté.
Les extrémités tremblantes, j'ai du mal à me débarrasser de ma ceinture alors que je dois quitter cet habitable, respirer à plein poumons, gueuler ma frustration au vent... que sais-je, mais si je ne sors pas tout de suite je crois que je vais mourir.
Poppy m'observe sans ne rien dire, c'est même grâce à elle que j'arrive à me débarrasser de mon entrave et à sortir de la Jeep. La portière claque sur mon passage, la première chose que je fais, c'est courir tout droit vers la descente d'herbe verte qui s'étend à perte de vue à ma droite.
M'élancer à travers la lande permet à mon corps d'évacuer toute cette tension accumulée, comme si chaque pas que je faisais était une libération. Je me laisse porter par l'élan de ma course, le vent fouettant mon visage, avant de m'arrêter d'un coup sec, mon cœur battant la chamade, et de hurler à m'en casser la voix dans cette clairière à mi-chemin entre Richmond et Oak Ridge.
Les membres secoués de spasmes à chaque fois un peu plus puissants, je me laisse tomber à genoux sur la végétation. Les muscles de mes jambes me lâchent, tout comme mes nerfs. Mes yeux se brouillent de larmes, et je réalise que je suis à bout. Je n'en peux plus.

VOUS LISEZ
Oak Ridge Campus #2 Knight © (SOUS CONTRAT D'ÉDITION)
Romance#campus #romance #baseball #enemiestolovers #maladie #spicy "Dans le diamant, nous brillons, éblouis par la gloire." La poisse semble coller à la peau de Knight, le lanceur vedette de l'équipe de baseball de l'université d'Oak Ridge. Que ce soit da...