Jour huit, mois dix, année neuf-cent-dix-huit
Alors que la toile du destin se dessine...
Quelques jours plus tard, Célian avait repris du poil de la bête. Ces histoires de révolutionnaires avaient plus ou moins ravivé une flamme en lui, un quelque chose qui commençait à n'être que braises sur le point de s'éteindre : son envie de liberté. Ainsi, il passa un nombre considérable de d'heures à farfouiller dans diverses bibliothèques et à déambuler dans des librairies, surtout les plus anciennes. Louison l'accompagnait diligemment tout en se posant des questions et pourtant, il les gardait pour lui. En un sens, ne pas savoir ce que traficotait exactement le Prince était aussi une soupape de sécurité pour eux. S'il se faisait interroger ou que l'on fouillait sa mémoire, il n'y aurait pas d'informations supplémentaires à exploiter contre eux. Etre parano était une déformation professionnelle et puis... Son meilleur ami avait bien plus d'ennemis qu'on pouvait le penser. Et ce n'était pas fait pour le rassurer.
Très heureux de sa trouvaille du jour, il rejoignit Javier avec un sourire étincelant et un grimoire massif dans les mains. Si le jeune homme s'interrogea de savoir de quoi cette pavasse pouvait bien parler, il se doutait que son adorable chéri allait lui expliquer plus tard. Il eut raison, évidemment, car une fois le dîner fini, Céli vint se glisser dans ses bras et bien installé sur ses genoux, dégaina son énorme bouquin. Il n'était pas rare que le Prince de Lumière vienne dans son petit chez lui, adorant être dans ce logement certes modeste mais infiniment plus chaleureux que sa chambre spacieuse fournie par le Consulat. Et la vue sur l'Opéra de l'Ether n'améliorait pas son humeur. S'il le pouvait, il se serait définitivement installé entre ces murs. En attendant leur mariage, et donc le fait que Javier vienne vivre avec lui car malheureusement, on ne leur accorderait pas l'inverse, il profitait de ces moments de liberté et d'un bonheur domestique ordinaire qui réchauffait son être. Parcourant les pages de l'ouvrage il prit la parole.
- Vois-tu Javier, j'ai fait pas mal de recherches sur la chronomagie. Du moins, avec le peu qui est en répertorié mais j'ai trouvé ceci.
- Et qu'est-ce qu'il y a d'intéressant dans ce parpaing datant de je ne sais quand ?
Il se sentait d'ajouter une petite touche d'humour et de voir la bouche de son amoureux se relever d'un léger sourire le récompensa largement.
- Regarde. Ceci disais-je, fit-il en désignant un croquis sur une page jaunie, est une table de courbage temporel. Une technologie mise au point par Istaroth elle-même.
- Celle qui a inventé la chronomagie... ? lança-t-il d'un air peu sûr.
Décidément, il aurait peut-être dû écouter un peu plus pendant ses cours d'Histoire. Célian le corrigea rapidement, ladite Istaroth n'avait pas inventé la chronomagie mais l'avait rendu plus accessible, plus codifiée en un sens. Elle était la plus connue car elle s'en était beaucoup servie. N'ayant pas appris les langues anciennes, Javier lui faisait confiance alors qu'il lui désignait les textes alambiqués ainsi que leurs significations. La table de courbage temporelle pourrait permettre des miracles car elle donnait la possibilité d'étirer le Temps, amincissant la membrane qui le protégeait des intrusions. Techniquement, un voyage dans le Temps était déjà de l'ordre du possible mais infiniment dangereux et imprécis. Là, en choisissant un instant T, et avec le prix adéquat payé, c'était plus réalisable. D'un point de vue théorique.
- C'est une autre sorte d'ambre Javier. Une ambre qui n'emprisonne pas le temps des gens mais qui utilise leurs souvenirs pour fonctionner. Comme pour la déesse et Aether.
- Pourquoi des souvenirs en particulier ?
- Parce que nous sommes faits de souvenirs. La somme de tout ce que l'on a vécu fait ce que nous sommes aujourd'hui. Se séparer d'un morceau de cette masse va changer l'addition et donc le résultat final de notre être, de nos décisions, de notre personnalité. Mais cela peut aussi changer un nombre incroyable de choses autour de nous.
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Amber of Time
FantasíaLe pays du Nord est régit par le Consulat ayant à sa tête le Premier Consul, prophète et guide du peuple. Pourtant, celui que la population adore est Célian, affectueusement surnommé le Prince de Lumière pour ses ailes faites de particules lumineuse...