Acte 10

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Jour vingt, mois quatre, année neuf-cent-vingt

Célian détestait passer dans le grand hall les jours où les réunions du Consulat avaient lieu car, inévitablement, il se retrouvait à croiser tout ce beau monde. Or si certains étaient agréables à discuter et même intéressants à écouter comme Auguste, Bilal ou Florentina, d'autres il voulait les fuir comme la peste dont Blanche-Rose, Deimos ou même le Premier Consul en personne.

- Mon Prince, quelle délicieuse surprise.

Se mordant l'intérieur de la joue, il se retourna pour adresser un sourire de façade à madame Blanche-Rose justement. Son secrétaire particulier, Pierre, restait en arrière mais lui fit un signe de tête en guise de salutations. Célian préférait traiter avec lui qu'avec sa patronne depuis qu'il avait mis au clair ne pas vouloir de « services particuliers » avec sa personne quelques années auparavant.

- Dame Blanche-Rose, vous êtes aussi splendide que l'aurore sur notre ville.

- Haha, flatteur. Dites-moi très cher, puisque vous êtes ici c'est que vous êtes libre n'est-ce pas ? J'aimerais que nous allions discuter, j'ai de nouveaux candidats à vous proposer. Cela n'engage à rien bien sûr.

- Je suis fiancé, je me trouve déjà bien assez engagé.

Elle s'approcha de lui, déjà grande par nature, ses talons hauts la faisaient dépasser Célian de plusieurs bons centimètres. Son parfum floral lui envahit le nez alors que le vert pâle de ses yeux était d'une froideur glaciale malgré le sourire qui courbait ses lèvres si savamment maquillées. C'était clairement de l'intimidation malgré ses airs de femme du monde.

- Mon Prince, éclat de notre monde, espoir de l'avenir... Votre naïveté est si charmante mais elle est inutile. L'amour est futile, il ne vous aidera pas à progresser et honnêtement, votre amant sera bien plus en sécurité loin de vous. Il n'a ni argent ni réputation et encore moins de magie pour se protéger et vous le savez. Vous l'avez toujours su n'est-ce pas ? Vous êtes un danger pour lui et sa famille.

- Je... Vous ne savez rien de Javier et moi !

Son cœur battait fort dans sa poitrine alors qu'elle lui balançait au visage toutes les peurs qu'il avait au fond de lui. Perdre Javier, de tout un tas de façons possibles. Par sa faute.

- Soyez raisonnable Majesté. Et cessez d'être égoïste, pensez à lui plutôt qu'à vous. C'est un conseil d'amie, vous savez ?

Le sourire qu'elle lui adressa se voulait chaleureux mais rien ne brillait dans son regard si ce n'était la malveillance. Il était... égoïste ? Vraiment... ? Depuis le début le Prince de Lumière s'accrochait à Javier de tout son cœur, de toutes ses forces... Il était son amour, l'incarnation de ses rêves et de ses espoirs... Mais lui ? Qu'apportait-il à Javier hormis des inquiétudes ? Célian sursauta quand une main agrippa son poignet et le tira en arrière, son dos heurtant gentiment un torse qui ne lui était pas familier. La voix qui résonna par contre, il la connaissait bien. Et ne l'appréciait pas tellement plus.

- Blanche-Rose, c'était donc vous qui reteniez le Prince. Nous avions convenu de déjeuner ensemble et je commençais à m'inquiéter de son retard.

Elle toisa son jeune collègue un instant avant de croiser les bras sous sa poitrine, faisant remonter celle-ci et la rendant encore plus pulpeuse dans son décolleté.

- Bastien, très cher, je l'ignorais puisque son Altesse ne m'a pas dit être attendue. Bien entendu que, sinon, je ne l'aurais pas retenu. Question d'étiquette.

- Evidemment. Je suis sûr que cet oubli est dû à la passionnante conversation que vous aviez. N'est-ce pas ? fit-il avec un sourire tout aussi faux que celui qu'elle lui adressait.

Amber of TimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant