Chapitre 6 - Confrontation, partie 1

102 6 149
                                    

Las Albas, Tierraroja (5e étage de la Tour)

19 juillet 3202, à l'aube

« Buenos días ! » S'exclama une voix pleine d'enthousiasme au moment où la clochette de la porte d'entrée tintait pour signaler son ouverture. 

« Bonj... oh ! B-Bonjour ! »

La couturière - qui semblait avoir une trentaine d'années - s'interrompit, dévisageant celui qui venait tout juste d'arriver avec la stupéfaction la plus totale.

C'était le premier client de la journée : peu de personnes entraient chez Debbie Vestirlo à une heure aussi matinale. Et pourtant, il était loin de passer inaperçu : avec sa chevelure d'or soyeuse et ses iris aux multiples nuances de vert, ses habits tout en splendeur et ses bijoux à n'en plus finir - jusqu'à la monture de ses lunettes, en or massif - Soren Fyrklöver ne pouvait que laisser une forte impression partout où il passait.

Tout sourire, le nanti s'avança jusqu'au comptoir où il vint s'accouder, faisant face à la jeune couturière blonde. Celle-ci se tortillait désormais les mains en regardant vers le sol, le visage empourpré.

« Euh... B-Bonjour ! » Répéta-t-elle en détournant le regard, donnant l'impression que sa tête voulait s'enfoncer dans son uniforme pour ne plus jamais en ressortir. « En euh... en quoi puis-je vous aider ? »

« Oh, je ne doute point qu'une personne aussi gracieuse que vous puisse m'aider en bien des points, señorita. » S'amusa-t-il en dévoilant des dents d'une blancheur éclatante, alors que chacun de ses mots teintait d'avantage de rouge son interlocutrice. « Mais j'espérais surtout, en m'aventurant dans un magasin de couture, que vous puissiez m'y proposer des vêtements. Cette boutique m'a été chaudement recommandée comme étant la meilleure de toute la ville. »

« Aaaah, n-naturellement ! » Bafouilla la couturière en agitant précipitamment les mains. « J-Je vais... »

« En v'la un minois qui n'vient pas du coin... » L'interrompit une voix rauque. « F'sait longtemps que j'avais pas vu une face aussi pâle qu'la tienne, l'jeunot. »

Une vielle femme au teint bronzé portant un uniforme similaire à celui de la jeune couturière venait d'émerger de l'arrière-boutique. L'air sévère, elle vint se planter juste devant Soren, les poings sur les hanches.

« Alors, qu'est c'qu'il t'faut, donjuán ? » Grogna-t-elle, grincheuse.

Loin de se faner, le sourire du nanti s'élargit jusqu'aux oreilles.

« J'adorerais essayer plusieurs de vos chemises. Si vous en avez avec une belle teinte émeraude, vous feriez de moi un homme comblé. Le vert est comme qui dirait ma couleur, fufu. »

« À n'en point douter... » Murmura doucement la jeune couturière, le regard perdu dans ses yeux.

Se rendant compte qu'elle venait de parler à voix haute, elle sursauta et ses oreilles devinrent écarlates.

« M-Mes excuses, je vais chercher ce qu'on a en stock tout de suite ! » S'empressa-t-elle de dire avant de se précipiter dans la pièce d'où était sorti sa patronne.

La vieille femme - qui était assurément Debbie Vestirlo en personne - leva les yeux au ciel.

« J'vous jure ! » Souffla-t-elle, exaspérée. « Un bellâtre qui s'pointe, et les v'la qui déraillent ! C'filles ont trop pris du mari, pour c'qui est d'être futé. Et d'vriez voir leurs frères, c't'encore pire ! Dios mío, 'core heureux qu'elles aient au moins hérité d'mon talent pour l'travail du tissu. »

SKY KEEPOù les histoires vivent. Découvrez maintenant