"Les Derniers" 🚀 Roman SF - En Cours- 15 Chapitres

8. Les Racines ©️

Mon père faisait partie de ces gens qui vous marquent pour toujours. C'était un aventurier qui avait bourlingué à travers le monde entier. Les artéfacts légendaires avaient sur lui un pouvoir attractif obsessionnel. Cette addiction compulsive le dévorait nuit et jour, tous les jours de l'année.

Lorsque nous recevions, il était une source inépuisable de récits extraordinaires et d'anecdotes hors du commun, alors que le reste des conversations ne lui faisait pas décrocher un mot.
Chacun de nos visiteurs avait droit à un exposé détaillé et passionné de ses recherches à travers le globe. Il y mettait tellement de cœur que n'importe qui était transporté sur les lieux et écoutait religieusement ses histoires rocambolesques et exotiques de trésors et d'objets insolites à déterrer.

Je me souviens de lui comme de quelqu'un de torturé et de farfelu, qui ne tenait pas en place. Autour de lui semblait se déplacer une aura mystérieuse et magnétique.

Lorsque nous avions la chance de le voir entre deux de ses expéditions, il passait tout son temps dans son bureau. Une pièce lugubre, véritable cabinet de curiosités où il exposait un capharnaüm d'objets hétéroclites ramenés de ses expéditions.
Son nom lui-même, Isidore, sentait la naphtaline et était en parfaite adéquation avec cette ambiance du chercheur fou.

Au centre une table entière débordait de vieilles cartes sur lesquelles il griffonnait des codes et des notes dans une langue inconnue. Pour l'aider dans ses recherches, il avait amassé au cours des années une quantité astronomique de livres anciens contenant des pièces extrêmement rares.
C'était une collection unique qu'il exposait dans une bibliothèque monumentale digne des plus grands musées.

Je devais être âgé d'à peine quatre ou cinq ans, lorsqu'un jour il me fit monter sur ses genoux pour me montrer un de ses plus beaux trésors : un petit bout de papier à moitié déchiré, à première vue insignifiant, auquel il tenait comme à la prunelle de ses yeux.

- Regarde Marcus, me dit-il sur un ton solennel, c'est la plus belle récompense qui soit donnée à un homme dans sa vie.

Avec mes petits yeux de jeune enfant émerveillé et innocent, je regardais incrédule cette trouvaille historique. Mon père avait un regard magnifique dans cet instant de partage intense entre nous deux. Le regard de la passion, le regard de la consécration, depuis j'ai compris à quel point la découverte est une puissante drogue qui fait oublier tout le reste. Si on n'y prend pas garde elle peut même rendre fou.

- Plus tard quand tu seras grand, tu partiras toi aussi pour des contrées lointaines et je te donnerais les clés pour poursuivre mes recherches, murmura-t-il.

- Oui, je veux être un aventurier comme toi, avais-je répondu plein d'allégresse.

C'était un secret entre nous, du moins c'est ainsi que je le compris. Je me gardais bien de le dévoiler à quiconque et surtout pas à mes insupportables frères.

Il y avait aussi, dans cet antre à la décoration atypique, des parchemins énigmatiques qui m'attiraient comme un aimant. Mon père les sortait parfois de ses tiroirs avec le plus grand soin pour nous les montrer de plus près.

C'était un de mes moments préférés. Il nous traduisait les signes étranges qui y étaient inscrits depuis des temps immémoriaux. Ce tour de force m'impressionnait beaucoup. Je donnais à ses connaissances exceptionnelles un pouvoir quasi-surnaturel et me demandais par quel moyen, il réussissait à déchiffrer des symboles inconnus de tous. C'était mon héros !

Il allait de découvertes en découvertes. Mais sa recherche cruciale, celle qui lui aurait donné la gloire et la célébrité, restait inaccessible. Le Lion aux mille diamants, une pierre légendaire qui d'après les écrits ouvrait sur un autre monde.