Chapitre n°20

7 1 0
                                    

Chanson du chapitre n°20 : Taylor Swift - The Moment I Knew.

Chapitre n°20 :

« Bûche de Noël ».

1er décembre 2023 – 13h00.

« Tu étais tellement loin de moi. Tu ne peux pas revenir comme ça, aussi facilement, comme si de rien n'était, comme si tu n'avais pas fait de moi un vase en porcelaine brisé. Je n'ai pas encore recollé tous les morceaux, Axel. Mais tu es là, tu es revenu, et maintenant, mes mains tremblent et les morceaux m'échappent. Et tu me regardes comme si tu tenais sincèrement à moi. Et j'ai envie de te croire, tellement que mon cœur en bat la chamade ! Mais tu es parti. Où étais-tu pendant tout ce temps ? »

                                                                                                    Indigo, Sous le souffle d'un nouveau Printemps.

    L'heure qui suivit s'écoula assez vite et de façon à ce que je n'aie absolument pas le temps de bailler aux corneilles. En effet, entre les dernières arrivées à qui il fallait trouver une place dans les étagères, les clients qui téléphonaient pour réserver un livre, ceux qui me demandaient des conseils et les photos qu'il fallait prendre pour les différents posts Instagram de la semaine, je n'eus nullement l'occasion de me reposer sur mes lauriers. Mais j'adorais ça. C'était au milieu des livres que je me sentais le mieux. Et ce, depuis toujours.

    Petite, j'avais souvent fait des crises d'angoisse, notamment quand je me retrouvais parmi une foule, par exemple. Je paniquais facilement, perdais régulièrement mes moyens lorsque je devais parler à des inconnus ou devant la classe et me montrais plutôt anxieuse en règle générale. Même aujourd'hui, j'avais encore du mal à être totalement à l'aise socialement...Quand j'avais un appel important à passer ou un mail à écrire à un fournisseur, par exemple, j'avais toujours les mains moites et je devais me relire plusieurs fois avant d'envoyer le message. Et même après, je continuais à stresser et j'arrêtais de consulter ma messagerie pendant des heures par peur de la réponse...Je passais mes nuits à réfléchir à tout et n'importe quoi et à me remémorer chaque interaction de ma journée en boucle tout en tentant d'anticiper les prochaines...Je me faisais mille et un scénarios dans ma tête pour être parée à chaque éventualité, à chaque évènement potentiel qui pourrait m'arriver. Mais la réalité me surprenait toujours.

    C'était ma passion pour la lecture qui me permettait de surmonter tout ça. Quand je conseillais un livre à quelqu'un ou que je me trouvais dans une librairie, je me sentais bien plus confiante. Bien-sûr, ce n'était pas parfait, mais l'ambiance m'apaisait, en quelque sorte. Au milieu des livres, j'arrivais à m'ouvrir, à oser, et je me sentais en sécurité. Des fois, j'étais même fière de moi, parce qu'être ici, à faire ce travail, c'était non seulement comme un rêve devenu réalité, mais c'était surtout une victoire. C'était dans une librairie où je me sentais à ma place. Et je me considérais chanceuse de l'avoir compris aussi tôt dans ma vie.

    -Bonne journée, Merry ! me lança madame Orina, une habituée, en partant, deux magnifiques livres reliés dans les bras.

    -Merci, bonne journée à vous aussi, madame Orina !

    Je passai une main sur mon front en soupirant, épuisée. Il devait être près de quatorze moins le quart. Mon ventre criait famine et ma gorge était aussi sèche que le désert du Sahara. Il était grand temps de prendre une pause, visiblement. J'avais travaillé quinze minutes de plus que nécessaire mais étant donné mon taux de productivité ce matin, ce n'était pas du luxe. Et c'était aussi une manière pour moi de me faire pardonner mon manque de professionnalisme, même si je savais que Luc et Maë ne m'en voulaient pas vraiment. Sur ces bonnes considérations, je dévalai donc l'escalier central quatre à quatre et me précipitai vers la salle de repos, complétement affamée.

    J'arrivai devant la porte de la pièce pile au moment où Cal et Tommy en sortaient. Ils me sourirent et je fis de même.

    -Qu'est-ce que vous faîtes encore là ? leur demandai-je, étonnée.

    En effet, ils auraient déjà dû être repartis travailler, normalement, afin d'assurer le roulement mis en place pour qu'il y ait toujours quelqu'un de disponible à la librairie. Néanmoins, ce n'était clairement pas moi qui pouvais leur en faire la remarque actuellement... Thomas leva les yeux au ciel.

    -Figure-toi que Maëlia nous a empêché de sortir ! m'apprit-il en grommelant dans sa barbe fraîchement rasée de ce matin.

    -Comment ça ? m'écriai-je presque.

    -Un nouveau plan de sa part, me répondit tout simplement Calem avec un calme imperturbable. Nous avions l'interdiction d'aller retourner bosser tant que nous ne l'avions pas aidée à « planter le décor » comme elle nous a dit, quand bien même le café réouvre dans même pas quinze minutes et que notre patron attend certainement du renfort.

    -Je n'y crois pas..., chuchotai-je, de plus en plus désemparée. Qu'a-t-elle prévu, cette fois-ci ?

    Mes deux amis s'échangèrent un regard que je ne compris pas avant que Tommy ne m'adresse un sourire amusé.

    -Tu verras bien, se contenta-t-il de me dire. Mais pour une fois, sache que je valide à cent pour cent son projet, même si je suis contre sa façon de faire, nous ne sommes pas ses chiens...

    -Clairement. Mais moi aussi, je trouve son projet génial, approuva même Cal, et je me demandai sérieusement ce que Maë avait imaginé pour mettre tout le monde d'accord de la sorte. Sur ce, Merry, profite-bien. Nous, on retourne travailler.

    Thomas acquiesça et me fit un clin d'œil complice avant de rejoindre Calem qui se dirigeait déjà en direction du café. Je lui aurais bien demandé qui était la jeune femme avec qui il avait discuté tout à l'heure mais je me retins. Je préférais finalement qu'il vienne m'en parler de lui-même, sans que je n'aie à l'interroger. Peu importe si cela prendrait plus de temps, Tommy n'aimait pas que nous nous mêlions de sa vie privée. Cela serait bien que ma curiosité l'accepte, pour une fois.

    Je vis Lek sortir des cuisines lorsque Cal le rejoignit mais je décidai de ne pas trop y prêter d'attention. Il avait peut-être simplement envie de décorer les plans de travail...Ce n'était pas mon rôle de vérifier tout ce qu'il faisait comme si j'étais sa mère, il était assez grand pour savoir comment s'occuper de lui. Mais sa présence au sein de notre petit cocon aux odeurs de livres et de thé m'intriguait. Et me plaisait, également. Ce que je découvrais de lui me plaisait, sans grand étonnement. Il était comme un magnifique mystère que j'aimerais percer à jour et apprendre à connaître, au milieu de millions d'autres mystères qui ne parvenaient pas à m'intéresser comme il y parvenait, lui.

    Je me détournai. En effet, cela serait vraiment bien que ma curiosité arrête de me titiller dès qu'un détail l'interpellait. Ce disant, je poussai la porte de la salle de repos et entrai. Soupçonneuse quant au fameux nouveau plan de Maëlia, je m'attendais à y trouver la pièce sens dessus dessous ou remplie jusqu'à ras-bord de Pères Noël chantant mais la réalité fut tout autre et me cloua sur place de stupéfaction. Sur la table principale, au centre de la salle, trônaient différents bols de toutes les couleurs. Certains contenaient des chips, d'autres des bonbons, d'autres encore les derniers cookies de la grand-mère de Lek et certains même de minuscules sandwichs au thon, au poulet ou au tofu végétarien. Je balayai le reste de la pièce des yeux, bouche-bée. Des guirlandes aux teintes pastel avaient été accrochées sur les murs et des ballons en forme de cœur ou d'étoile flottaient joyeusement au plafond. Un poste radio avait été placé sur une petite commode dans un coin et un CD reposait à sa droite.

Les Gens HeureuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant