CURIOSITÉ MALSAINE

19 | Loélia

Loélia Wealer

Le ciel grisâtre qui nous surplombe accentue l'ambiance morose qui règne. La réalité semble avoir perdu ses couleurs, tout est si maussade.

Je n'ai jamais assisté à un enterrement, et si on m'avait dit que le premier serait celui de Benjamin, j'aimais je n'y aurais cru. Encore moins si la personne aurait précisé que je serai à l'origine de sa mort.

L'affaire est classée, ce sont ses propres parents qui ont décidé que les recherche serait inutile. Ça ne m'étonne pas plus que ça, ils n'ont jamais eu une très bonne relation.

Après avoir évoqué sa vie de jeune homme gentil et innocent, qui ne méritait pas ce tragique destin. Il y a eu une lecture des mots des proches, et à la fin, son cercueil a été mis en terre.

Je t'épargne les adieux larmoyants que ta famille t'a accordés, Benji, c'était ridule.

D'ailleurs.

Je m'assieds sur sa pierre tombale en expirant.

"Benjamin Charles Lester

06/07/01 au ?/09/23

Fils et ami aimant"

Ne m'en veut pas, mais j'ai mal aux jambes, pouvoir te parler en privé a été long.

Bref, je suis là pour te dire que ta vie était merdique.

Ta mère s'efforçait à pleurer, ton père a quitté l'enterrement avant la fin pour répondre à un appel. Ah et ton meilleur ami Evan n'était pas là, il s'est trop soulé hier. Je rajoute cette précision car je ne veux pas que tu penses que tu es important, mais il n'a pas bu pour t'oublier... Puisqu'il a préféré s'oublier dans les bras de ton ex-copine.

Tu le sais déjà, mais t'es vraiment un connard, et si je pensais que tu méritais ta mort, je n'en suis plus si sûre.

Je t'ai fait un cadeau en te tuant, car t'as vraiment une vie de merde. J'aurais dû te laisser en vie pour pouvoir te pourrir.

J'ai mis fin à ta souffrance alors que tu as ravivé la mienne en la rendant plus intense.

Tu as tout gagné et j'ai tout perdu.

Par ta faute, je ne mange qu'à moitié, je ne dors qu'à moitié, je ne respire qu'à moitié, une partie de moi est morte avec toi. Une partie de moi que je ne pourrais jamais retrouver. Je n'ai plus gout à rien, je ne me supporte même plus, et je n'aspire à rien... Tout me parait si fade à présent.

Tu m'as volé ce qui me tenait encore en vie, mes parents et mes amis, qui ne sont maintenant que des entités gravitant autour de moi sans jamais m'atteindre.

Je te déteste, et en même temps, je t'envie, car tu es mort, toi.

C'est drôle n'est-ce pas, je me suis démenée pour cacher à tout prix que je t'avais tué. Et maintenant, tu me regardes devoir faire semblant de t'apprécier et même te pleurer.

J'ai versé trop de larme par ta faute, tu n'es toujours pas satisfait ?

Tu m'as détruite, et ensuite ?

Tu me connais, je suis du genre optimiste alors, j'essaie de chercher du bien là où il n'y en a pas.

Ne rêve pas trop, il n'y en a pas en toi.

Je me suis dit que je devrais profiter de ma vie au maximum et ce genre de connerie. Mais tout le monde sait que c'est trop beau pour être vrai. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne.

Mes pensées ne sont constituées que d'émotions négatives. Impossible de voir quelque chose de trop positive.

Je vais devoir vivre avec malgré moi, en espérant que ça me passe comme l'a dit Rayn.