Pendant tout le reste du voyage, Louis garde ses distances. Il se comporte comme si nous étions de vagues connaissances et s'adresse à moi uniquement s'il y est forcé. Lors de nos rencontres avec des groupes d'ados dans l'Illinois, l'Indiana et le Wisconsin, il raconte son arrestation et explique qu'il est prêt à tout dorénavant pour éviter la prison.
Il n'évoque jamais le fait qu'il a payé pour sa sœur. Je crois qu'il cherche à oublier cette partie de l'histoire bien qu'à mon avis, la réalité de ce sacrifice le hante jour après jour. J'aimerais arriver à le faire parler, mais il ne me fait plus du tout confiance.
Je doute d'ailleurs qu'il se fie à qui que ce soit.
Notre voyage s'achève demain. On loge dans une grande cabane au bord du lac Geneva, dans le Wisconsin. Il y a neuf chambres ; nous avons chacun la nôtre. Je n'arrive pas à dormir à la pensée que je vais à nouveau perdre Louis. À deux heures du matin, je vais jeter un coup d'œil dans sa chambre. Son lit est vide. Je panique en me disant qu'il a encore filé.
Une vague de soulagement m'envahit quand je l'aperçois par la fenêtre. Il est en train de faire des ricochets sur le lac.
Je tiens toujours à le convaincre de retourner à Paradise, mais je n'ai pas fait grand-chose pour y arriver. Ce soir est ma dernière chance. En repensant à ce que Vanessa m'a dit, je m'arme de courage pour affronter Louis une bonne fois pour toutes.
Je me glisse dehors par la porte coulissante. Le chant mélodieux des criquets m'accompagne tandis que je descends le chemin de gravier en direction du lac.
– Je suppose que le moment est venu... de nous dire adieu, une fois de plus.
Il ne me regarde pas. Fait un nouveau ricochet.
– Faut croire. Amuse-toi bien en Espagne.
Ça fait plusieurs semaines que je n'ai pas pensé à cette année que je dois passer à l'étranger. Le programme RESTART a été épuisant tant physiquement que moralement. J'ai appris une foule de choses sur moi-même depuis un mois. Je me suis liée d'amitié avec Ariana et Diane. On est presque comme des sœurs, maintenant. On discute pendant des heures.
Je m'assieds sur un gros rocher et j'observe Louis.
– Où comptes-tu aller ?
Il hausse les épaules.
– Arizona, probablement.
En Arizona ? C'est si loin. Il a trop de choses à régler avant de s'en aller.
– Reviens à Paradise, Louis.
– Fin de la conversation.
Je me lève et je viens me planter devant lui. Alors qu'il s'apprête à expédier un autre caillou,
j'attrape sa main et lui écarte les doigts pour qu'il lâche prise.– Reviens à Paradise, je répète.
Il baisse les yeux à terre, et je sens son désarroi comme si c'était le mien.
– Impossible. La dernière fois que je suis rentré, tous les Tomlinson jouaient à la famille idéale
alors qu'en fait, ils sont tous plus perturbés les uns que les autres. Je n'arrivais pas à faire semblant. Je ne peux toujours pas. Pas la peine de me le demander. Je suis déjà hanté par tant de regrets. Je ne vais pas en rajouter.
– Laisse-leur le bénéfice du doute. Ils ont besoin de toi.
Il secoue la tête.
– Je n'ai rien qui m'attend là-bas. Mme Reynolds est morte. La seule personne qui aurait pu me
faire revenir, c'est toi, mais notre histoire était foutue d'avance.
Il s'écarte de moi en se passant la main dans les cheveux. C'est un signe de frustration chez lui.
– Oublie ce que je viens de dire. Que j'aurais pu imaginer rentrer pour toi. C'était stupide.
J'attends qu'il me dise que notre délai de réflexion est écoulé, qu'il est prêt à nous donner une chance. Mais il n'en fait rien. Il s'est peut-être rendu compte que ça n'en valait pas la peine, surtout si je vais en Espagne et lui en Arizona.
Je pense aux fois où on s'est embrassés, étreints. J'avais eu la conviction que rien ne pouvait être plus fort, plus explosif. Aussi phénoménal.
– Tu as vraiment l'intention de partir ? je chuchote.
– Oui. Mais sans regret.
– Comment ça, sans regret ? Pourquoi répètes-tu ça sans arrêt ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
Il me saisit doucement le menton et lève mon visage vers le sien.
– Ça veut dire que je ne peux pas m'en aller sans avoir fait ça...
Il penche la tête vers moi. J'attends de sentir ses lèvres chaudes et pleines sur les miennes. Mon cœur s'affole. Sa bouche plane au-dessus de la mienne. Nous sourions tous les deux, nous rappelant un autre lac où on s'était taquinés l'un l'autre. Un jeu dangereux. Auquel nous jouons à nouveau. Cette fois, je décide d'en profiter et d'ignorer les signaux d'alarme dans ma tête.
J'essaie de me convaincre en fermant les yeux alors qu'il presse ses lèvres sur les miennes. Je savoure chaque seconde de ce baiser, lent, sexy, sensuel. Et non pas passionnel et vorace. Il m'enlace la taille et m'attire tout contre lui.
Ô mon Dieu ! J'ai envie de fondre dans ses bras, là tout de suite. Je noue les bras autour de son cou pendant qu'on continue à s'embrasser en se pressant l'un contre l'autre. Il me soulève de terre. Personne d'autre au monde ne peut me procurer ce sentiment d'être belle, invincible, digne d'intérêt ! J'ai envie de crier : Je t'aime, Louis ! Ne ressens-tu pas la même chose que moi quand on est ensemble ?
Ses lèvres s'écartent lentement des miennes. Il décroche mes bras cramponnés à son cou.
– Je ne regretterai pas ça... Jamais. Au revoir, Avigaël.
– Au revoir, Louis. Tu vas... me manquer.
– Toi aussi.
J'inspire à fond, refoulant le flot d'émotions qui m'assaille. Je l'écarte de mon chemin et me rue vers la cabane pour qu'il ne voie pas les larmes qui ruissellent sur mon visage. Je me jette sur mon lit et enfouis la tête sous mon oreiller. Je ne veux pas qu'il entende mes sanglots.
Pourquoi est-ce que je le laisse partir sans lutter ? Qu'est-ce qui me prend ? Je suis une poule mouillée, voilà pourquoi.
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Retour à Paradise
FanfictionDepuis que Louis a quitté Paradise, huit mois ont passé. Avigaël a mûri; elle pense avoir tourné la page de leur histoire d'amour et a repris sa vie en mains. Mais quand le jeune homme réapparaît lors d'un camp d'été, soudain ses certitudes vacillen...