Une promesse

01. Gravure

Théa

30 avril 2023

Tout le monde est en noir. Moi-même je suis vêtue d'une longue robe noire toute simple, accompagnée d'une paire de bottines de la même couleur, et d'un voile qui recouvre quasiment la totalité de mon visage.

Je n'avais aucune envie de me lever ce matin, tout comme ces quatre derniers jours d'ailleurs. Jamais je n'aurais cru que ce moment arriverait si vite. Honnêtement je n'y crois toujours pas, je ne réalise pas... je ne veux pas réaliser. Je ne veux pas admettre qu'il n'est plus là.

Qu'il ne le sera plus jamais pour écouter mes potins, pour m'aider à choisir ma tenue après que je sois resté quinze minutes devant ma penderie à me demander ce que j'allais bien pouvoir porter pour aller au lycée.

À me défendre, à me conseiller, à m'embêter, à me raconter sa journée et ce qu'il allait faire le lendemain. À l'écouter se lamenter sur les futurs examens qui arrivés ; et qu'il ne passera pas...

Le plus grand rêve de Mathias était de devenir photographe, de vivre de sa passion. C'est vrai qu'il a toujours été doué dans la photographie, il prenait tout et n'importe quoi, un brin d'herbe ou un éléphant peu importe, tout l'intéressait.

Je sais qu'il s'amusait à me prendre en photo contre mon gré juste parce qu'il savait que cela m'embêtait. Mon frère me répétait sans cesse que j'étais belle et prodigieuse... je ne l'ai jamais cru. Je n'ai jamais cru personne à ce sujet d'ailleurs.

Mathias voulait que j'aie confiance en moi. Il me poussait constamment vers le haut pour qu'un jour je puisse atteindre le sommet. C'était une de ses multiples façons de me montrer qu'il m'aimait.

Je me remémore aussi sans cesse le jour où je me suis plein de mes yeux verts, je ne les aimais pas à l'époque. Ils sont d'une couleur tellement vive que les gens les comparent à des yeux de chat. Cela me gênait.

Alors toute la matinée, Mathias a pris des dizaines et des dizaines de clichés de mes iris pour me prouver que mes yeux étaient bien tout le contraire que ce que je pensais. Ils étaient beaux. Mon frère a fait de mon complexe ma force. Lui c'était ça, son super pouvoir.

En ce moment, depuis cette fameuse nuit, je ne suis pas sûr que mes iris soit aussi vif qu'auparavant. Elles doivent plutôt ressembler à du pétrole qui tente de se fondre dans la mer, tout comme je me fond dans mes larmes.

C'est arrivé dans la nuit qui a succédé son arrivée à l'hôpital. Après lui avoir dit que son heure n'était pas encore venue, j'ai fait une crise d'angoisse puis je me suis ensuite évanoui.

Je pense qu'à ce moment-là, au fond de moi je le savais, mais je ne voulais déjà pas l'accepter. Le déni était devenu mon meilleur ami, alors je l'ai nié, de tout mon être, mais mon corps n'a pas supporté cette pression.

Mon frère s'est envolé dans la nuit du vingt-six au vingt-sept avril, à l'âge de dix-huit ans.

Son accident de voiture lui avait causé multiples blessures, mais on les a toutes jugées superficielle, rien qui allait « lui coûter la vie » d'après les médecins.

Ça allait peut-être être compliqué, ce genre d'accident laisse surtout des traumatismes, mais pour eux mon frère allez s'en sortir, il allait vivre, mais c'est dans ce genre de moment que la phrase : « Chaque minute est précieuse », prend tout son sens.

En effet, quelques instants plus tard, quatre médecins étaient autour du corps inanimé de mon frère, essayant de lui redonner vie.

Cela fait seulement quatre jours et il me manque déjà terriblement, plus qu'il ne m'a jamais manqué, et il me manquera toute ma vie, je le sais. On dit que la douleur disparaît avec le temps mais je n'y crois pas.