𖤓 Chapitre IV 𖤓

1 1 0
                                    

Assise seule sur mon lit, je contemplais les rideaux qui bougaient doucement sous la brise du dehors. La solitude commençait à se faire sentir.

La maison semblait vide, malgré Nonno dans l'arrière cours, ma présence remplissait un silence assourdissant. Le soleil filtrait à travers les rideaux de dentelle éclairait faiblement ma chambre et mon visage baignant sous ce rayon. Je m'allongea sur le matelas modeste, je me sentais fatiguée, dépourvue de toute énergie.

Il devait être quinze heures et demie, Nonna n'était toujours pas rentrée et Nonno toujours pas réveillé, enfin c'était ce que je croyais. On toqua à la porte de ma chambre, deux petits toquées timides. Ça devait être lui, je l'invita à ouvrir.

- Ça va ? Demanda-t-il
- Oui merci. Je suis juste un peu fatiguée.
- Moi aussi, j'ai besoin de ma sieste après déjeuner. Tu tiens de ton grand-père !
Il souriait, ça me fit chaud au cœur de le voir comme ça.

Je n'avais l'occasion de voir mes grand-parents seulement pendant les fêtes et ai droit à une simple lettre de leur part pour mon anniversaire, ça me faisait plaisir. Mais ce qui me fait encore plus plaisir, c'est de les voir pour de vrai, de les entendre, les voir rigoler.

Ils étaient encore un mystère pour moi, je ne connaissais pas grand chose sur eux, de leur vie ou même de comment ils se sont rencontrés. Mais ce que je savais au fond de moi, c'était qu'ils sont de bonnes personnes. Ils inspirent la confiance et je ne voulais pas les remettre en question.

- A toute à l'heure Nonno, souriai-je en retour.
Il ferma la porte derrière lui et j'entendis ses pantoufles dans l'escalier. Je me leva aussitôt pour fermer les volets bleus, et pouvoir m'assoupir tranquillement. Seulement, dans la rue en bas ,trois filles marchaient en rigolant. Sans trop faire de bruit, je me retrouvai à les observer à travers la dentelle des rideaux.

Lorsqu'elles passaient en dessous de ma fenêtre, je pus mieux les distinguer. L'une d'elle, une rousse, avait un cornet de glace qu'elle passait aux deux autres filles. Chacune d'elles le lécher puis se le faissait passer. Berk, pensai-je.
Elles avaient des robes en marinières, pourquoi étaient-elles habillées toutes pareilles ? Était-ce des triplettes ? Pourtant l'une d'elle était rousse à côté des deux brunes.

D'un même pas, je les regardai s'éloigner en partageant cette glace. Rêvassant un peu, je fermai pour de bon les volets et m'allongea sur mon lit. La légère couverture montée jusqu'à mon abdomen, et mes mains jointes me donnaient un air de cadavre. Un défunt qu'on aurait habillé et préparé pour ne pas choquer la famille de sa pâleur extrême. Puis, je sentis mon corps s'enfoncer dans le matelas, comme s'il était aspiré. Je ferma les yeux et me laissa emporter par la fatigue...

𓆝 𓆟 𓆞 𓆝 𓆟

-Tu peux mettre les tomates cerises si tu veux, Nonno en raffole. Affirma Nonna.
Il était vingt heures, j'aidai Nonna à préparer à manger. Au menu ce soir, salade de tomates et tarte aux pommes. Les cigales s'étaient calmées, mais la chaleur n'était pas du même avis. Toujours vêtu de mon léger t-shirt, j'avais relevé mes épais cheveux en un chignon. Certaines mèches veinées chatouiller ma nuque mais l'air de la maison les faisait voler, me donnant une impression de fraîcheur.

Je coupai les tomates cerises en deux avant de les laisser tomber dans le bol en porcelaine.
Nonno était déjà assis à table, le journal en main, il sirotait son ricard. Le soleil était toujours de sortie, à peine visible entre les branches de l'Olivier derrière la maison. La baie vitrée de l'arrière cours était ouverte et les rayons chauds se frayèrent facilement un chemin jusque dans le salon. Mon ventre gargouillait à la simple odeur de la tarte aux pommes qui chauffée dans le four. Je n'étais pas la seule du même avis..
- On n'peut pas commencer par la tarte Giuseppina ? Demanda Nonno l'eau à la bouche.
- Aldo ...
Mon regard jonglait entre les deux amoureux. Un sourire sur les lèvres de Nonno, et une moue sérieuse sur celle de Nonna, qui allait céder ?
- On ne commence jamais par le sucré. Basta.
- Mio vida, c'est un jour spécial, Caramella est avec nous ce soir !
Les deux me regardèrent, Nonna semblait pensive.
- C'est fou comme elle ressemble à sa mère.
- Tu changes de sujet ! S'écria Nonno

Sans même dire un mot, mon visage criait le mal à l'aise. Je sentais mes joues rougirent, Nonna me regardait. J'avais terriblement peur que plus son regard s'attarderait sur mon visage, plus elle se rendrait compte que je n'avais rien en commun avec ma mère. Que je ressemblais simplement à mon père, qui est partie vivre ailleurs en laissant derrière lui une magnifique femme et une pauvre adolescente. Sans me l'avouer, je savais pertinemment qu'à côté de ma mère, on me prenait pour sa nièce.
- La tarte n'a pas encore fini de cuire. Disai-je, pour changer de sujet aussi vite que possible.
J'alla m'installer à table, Nonno et Nonna se lancèrent un regard surpris.
- La bambine a tranché. Rigola Nonno, un peu gêné de mon ton si froid.

Nonna finit d'assaisonner la salade de tomates, et vint la poser sur la table pour s'asseoir à côté de moi. Nonno commença à se servir sans plus attendre, laissant Nonna le regarder de travers.
Nous mangions tranquillement tous les trois autour de cette petite table ronde, clairement dessinée pour deux personnes. Mes grand-parents parlèrent de la pluie et du beau temps, de tout et n'importe quoi pendant que je mangeais mon assiette en silence.

Je n'arrivais pas à m'enlever de ma tête les remarques que l'on m'a faites sur moi et ma mère. Pourquoi disaient-ils que je lui ressemblais ? Ça devait être leur statut qui les forçait à dire ça, à coup sûr. Ce sont mes grands-parents maternels ? Très bien, alors disons que je ressemble à ma mère ! Même du côté de mon père, ses parents plaidaient ma ressemblance avec lui. On me l'a toujours dis et je l'ai peut être enregistré comme ça, que j'étais seulement la fille à mon père.
Nous mangions notre part de tarte aux pommes devant le petit post tv, devant TF1. C'était une toute nouvelle chaîne apparue depuis le début d'année. Elle a remplacé la RTF, et j'avouerai que TF1 sonne plus classe. Une fois ma part finie, je souhaita bonne nuit à mes grand-parents et monta aussitôt dans ma chambre.

Les volets n'étaient plus fermés, quelqu'un a dû les rouvrir, peut-être Nonna. Avant de les fermer, je m'attardai quelques petites secondes sur la vue du village. Le soleil commençait à se coucher laissant le ciel devenir orangé, c'était beau. La fontaine coulait toujours et un couple s'embrassait à côté. Gêné de ce moment on ne peut plus intime, je ferma pour de bon les volets et alluma une bougie avant de continuer la lecture de mon roman.

De leur amour, plus bleu que le cielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant