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I bet on losing dogs - Mitski

Point de vue de Gabriel :

J'ai passé le restant de la nuit dans son canapé, m'assurant que mon rival allait mieux, avant de m'éclipser dès le soleil levé.
Je pense qu'il est mieux pour nous deux qu'il ne sache pas ce qui s'est passé, il était bien trop arraché pour se rappeler de quoi que ce soit de toute façon.

Comment cet homme a-t-il pu tomber si bas en si peu de temps ? Comment est-il passé de ce politicien l'image sur de lui et prétentieux à cet homme qui n'est que souffrance et désespoir ?

Je souhaite l'aider, mais je ne sais pas comment m'y prendre, la situation est bien trop délicate. Il a trop de fierté pour accepter de l'aide, et encore moins de la part de son adversaire politique.
L'humiliation de savoir que j'ai assisté à l'un de ses pires moments risquerait même d'aggraver son état.

Mais il est seul, il n'a personne à qui je pourrais en parler, pas de famille, pas d'amis, rien.
J'ai l'impression qu'il est de mon devoir d'aider Jordan à sortir la tête de l'eau, comme si j'avais été presque investi d'une mission divine. Je suis le seul à avoir remarqué sa souffrance, alors je suis le seul à pouvoir l'en sortir.

Le lendemain, Jordan arrive au bureau, comme si de rien était.
Je ne lui adresse pas la parole, mais me décide à reproduire la même chose ce soir, en le laissant chaque jour un peu moins longtemps dans ce bar.

21h

Lorsque j'entre dans cet enfer, je me prépare au pire, pas encore tout à fait remis de mes émotions de la veille.
Je le retrouve effondré, ravalant tant bien que mal ses larmes, tremblotant et complètement ivre.

Nous arrivons dans son appartement, et le schéma de la veille prend place, presque comme une routine que nous avons instaurés malgré nous.
Lorsque je le recouvre d'un plaid, l'homme murmure des paroles presque indiscernables.
Une me percute « Ne me frappe pas s'il te plaît Peter, je t'en supplie. » je me fige, pas sur d'avoir bien compris ce qu'a balbutié mon adversaire.

Je me retourne et vois l'homme toujours entrain de trembler, le souffle court, maugréant des paroles incohérentes mais qui partagent un point commun : la peur.
Il semble effrayé, comme une proie face à un prédateur.

Je le déteste et pourtant en cet instant, je ne souhaite que lui apporter le peu d'amour qu'il semble ne jamais avoir reçu.
Je m'allonge à côté de lui, mes bras autour de son corps froid, chevrotant.
Son corps est victime de spasmes violents, les larmes coulent telle une pluie de souffrance.

Je lui caresse les cheveux, tentant de lui apporter un peu de réconfort, je murmure des paroles douces dans ses oreilles, lui essuie chacune de ses larmes.
Son rythme cardiaque se calme, si bien que nos coeurs finissent par battre à l'unisson.
Son corps calé contre le mien finit par se réchauffer, à tel point que cette chaleur me fait tomber dans les bras de Morphée.

Je me réveille en sursaut, dans la même position, la tête de Jordan sur mon torse, ma main dans ses cheveux noués, l'homme n'a pas cillé.
Je me lève délicatement, tentant de ne pas réveiller mon rival qui semble enfin avoir trouver la paix qu'il cherche désespérément par tous les moyens.
Il est 3h du matin, quand je claque la porte de chez lui, délicatement, le cœur lourd.

« on ne blesse que ceux qu'on aime »Où les histoires vivent. Découvrez maintenant