Chapitre 12

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Il marque une pause avant de prendre à nouveau la parole.

_  Tu veux qu’on arrête ce jeu ? demande-t-il en frottant plus fort et en poussant plus profondément.

Là, je le sens.

Ce n’est pas seulement inconfortable. Ce n’est pas une simple irritation. C’est sacrément effrayant.

Sa façon de me frotter, ça ne va pas. Et ça va, en même temps. Il en est conscient. Il sait que c’est la seule manière pour que je jouisse. Et quand ça commence, j’aperçois le changement d’expression dans ses yeux. Je vois l’éclat diabolique qui lui donne l’air d’un démon.

Cet homme est celui que j’ai épousé.

Nos regards se croisent. Je suis sûre qu’il lit sur mon visage la confirmation qu’il a gagné. Que je suis allée trop loin. Que c’est terminé, et que je jouis.

Je ne ferme pas les yeux. Moi aussi, je le vois. Je le vois tandis que je me livre nue devant l’homme tout habillé qui se fait appeler mon mari. J’attrape sa main, celle qui se trouve entre mes cuisses, et je la sens. Je sens ses doigts se crisper sur la détente. J’essaie de l’arrêter, mais seul mon cœur cesse de battre. Mon plaisir explose, la peur décuplant toutes les sensations. Je la vois en dépit des brumes de l’orgasme. La fin. Je n’ai pas besoin de regarder. Je sens les mouvements de son doigt quand il s’apprête à appuyer sur la détente.

....

#Martin

La femme nue sur le lit est l'objet de tous mes fantasmes. Ses cheveux  sont emmêlés et collés à la peau moite de son front. Une couche luisante recouvre sa peau brune. Sa poitrine se soulève alors qu’elle essaie de respirer et son ventre plat frémit des contrecoups de son orgasme.

Elle a les jambes écartées et mon poing est enfoncé entre ses cuisses, le canon de mon arme dans son sexe. C’est sale et vulgaire, plutôt choquant. Mais que je sois damné si ce n’est pas le spectacle le plus excitant que j’ai jamais vu, si ce n’est pas la femme la plus belle sur laquelle j’ai jamais posé les yeux.

De violentes émotions déforment ses traits. L’extase d’après l’orgasme. L’incertitude de l’issue. La peur de mourir. La honte, peut-être. La plus frappante est la colère. Plus un contrecoup du choc que le résultat de mes actions. Je l’ai lu dans ses beaux et grands yeux. Elle n’était pas certaine que je n’allais pas presser la détente.

Elle n’en est toujours pas sûre. C’est la raison pour laquelle elle me regarde, pétrifiée telle une femme totalement brisée.

Elle attend.

Elle a compris la leçon.

La partie est finie.

Je retire le canon d’entre ses jambes en faisant attention de ne pas la blesser avec le viseur. Le revolver est recouvert de son excitation. Je n’avais pas l’intention d’aller si loin, mais elle n'a pas arrêté de me pousser à bout.

Je ne m’en sors pas intact. Loin de là. Je la désire trop.

Je pose l’arme sur la commode et me dirige vers la douche pour mettre un peu de distance entre nous. Je n’ai pas encore atteint la porte que je sens qu’elle bouge. Je ne sais jamais à quoi m’attendre venant d'elle, mais ce que je vois en me retournant me laisse figé sur place.

Elle a bondi du lit et a attrapé le revolver pour le pointer sur moi. Les bras tendus, serrant la crosse à deux mains. L’arme tremble énormément. Ce ne sont pas que ses mains qui vacillent, mais tout son corps. Son visage est déformé par la haine et la fureur.

Sa voix tremble autant que le reste tandis qu’elle vise mon cœur.

_ Espèce de malade.

Je lève les mains.

_  Calme-toi, honey.

_  Me calmer ? éclate-t-elle de rire. Tu aurais pu presser la détente.

J’essaie de garder un ton posé.

_  Je ne l’ai pas fait.

_ Ton doigt aurait pu glisser.

Je déboutonne ma chemise et me dirige à nouveau vers la salle de bain.

_  Je connais les armes à feu. Je ne tire pas depuis hier.

Elle semble à deux doigts de la crise de nerfs.

_  Ne fais pas un pas de plus.

Je me retourne vers elle, la chemise qui pend, ouverte.

_ Qu’est-ce que tu vas faire ? Me descendre ?

_  Je devrais, réplique-t-elle en claquant des dents. Tu m’as fait croire que tu allais tirer. Tu as foutu le bordel dans ma tête.

Sa voix devient hystérique.

_  Ça t’a plu, ce jeu pervers, hein ?

Je m’avance lentement vers elle.

_ Tu es en colère parce que je n’ai pas tiré ?

Ses narines frémissent. Le revolver tremble encore plus dans ses mains. Elle m’a poussé à bout. Maintenant, c’est à mon tour.

Quelles sont ses limites ? Jusqu’où est-elle prête à aller ?

_  Tu aurais dû le faire, espèce de lâche, crache-t-elle.

Je me poste devant elle pour lui permettre d’appuyer le canon sur mon torse.

Je me penche pour lui murmurer tendrement :

_ Rappelle-toi Jacky, ta vie m’appartient et je décide quand j’appuie sur la détente.

Je recule en souriant pour l’observer. Les traces bleu pâle de mes doigts marquent ses joues. Je regrette d'avoir laissé des marques, mais elle l'a bien cherché. Pourtant quelque chose me serre la poitrine quand je la vois qui me tient tête, paraissant si fragile et courageuse avec cette arme dans ses mains. Je doute qu’elle en ait jamais tenu une auparavant.

POURQUOI J'AI TUÉ MON MARI ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant