42- rebondissements

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Pdv Heidna

La neige tombait depuis des heures, recouvrant les rebords des fenêtres et rendant le paysage uniforme.
La poudreuse illuminait la nuit, venant refléter les rayons de la lune.
Tout était si paisible.

Je me tournais vers Kays qui dormait profondément, une simple couverture couvrait ses hanches laissant son dos capturer la lumière passant au travers de la fenêtre.
Ses muscles ressortaient d'autant plus avec le contraste des rayons de lune et de l'obscurité de la pièce, il semblait perdu dans un autre monde, les traits de son visage étaient si doux et sa bouche légèrement entre ouverte, ses bras étaient fléchis au dessus de sa tête, lui donnant cet aspect presque enfantin.

J'aimais pouvoir admirer ses traits parfaits mais ce que j'aimais le moins c'était l'idée que jamais je ne le verrai changer, mûrir avec l'âge, avoir les marques de la vie se dessiner sur lui...

Je prie une grande inspiration et descendis les étages en direction de la cuisine mais se fut avant qu'un bruit violent de porte se fermant ne retentisse dans tout le hall d'entrée.
Je me stoppais net dans l'escalier et observais la silhouette noire qui  venait de s'introduire chez moi.
Ma respiration s'était arrêtée tout comme les battements de mon cœur.
Je ne pouvais que regarder fixement l'ombre qui avançait vers moi.

Un instant je crû avoir des hallucinations quand la silhouette se dédoubla...

- Je l'ai retrouvé dans les bois, on va devoir rester ici le temps que l'hiver passe.

Je fermai les yeux puis expira tout l'air de mes poumons, j'étais tellement soulagée de reconnaître cette voix .
Ascian était de retour avec la jeune fille à qui je devais toutes mes excuses, la femme à qui j'ai gâché l'existence, et à côté d'elle se trouvait l'homme qui avait pris la décision égoïste de gâcher la mienne.

Maintenant il fallait que je sois très patiente et capable de pardonner car je savais pertinemment qu'ils allaient rester tous deux vivre avec moi et Ascian le temps que la neige arrête de tomber, autrement dit, minimum 1 mois.

Je descendis le reste de l'escalier et sans adresser un regard à Ascian, je prie dans mes mains, les mains glacées de la jeune femme.

- Elle a fini sa transformation et elle s'appelle Elley.
M'indiqua Ascian d'un ton sec avant qu'il ne monte à l'étage.

Mon attention se reposait à nouveau sur Elley, je pouvais difficilement deviner ses traits dans le hall sombre de la maison mais je sentais sans aucun doute le sang humain sur elle.

- Je vais t'amener à ta chambre et on va essayer de laver ce sang d'accord ?

Elle retira ses mains des miennes et sans un mot elle entreprit de monter à l'étage.
Avec la boule au ventre et la culpabilité m'étouffant, je la suivis.

Une fois dans la salle de bain elle s'observa en détail.
Une larme coula sur ses joues pourpres alors que ses iris bleues étaient l'incarnation même de la peur et de la souffrance.

.
Sa douleur me frappa de plein fouet, non seulement j'en étais la cause mais je ne savais également pas comment l'aider car je n'étais pas mieux qu'elle en cet instant.
Je ne pouvais pas savoir entièrement ce qu'Elley ressentait, je savais juste que contrairement à elle je n'avais pas encore pris le temps de réaliser le changement qu'elle voyait dans ce miroir et en elle.

Alors je ne dis rien, ne sachant comment faire, ne sachant quoi dire ni ce par quoi elle pouvait bien passer.

Elle essuya sa larme puis elle détourna le regard de ce miroir, reprenant en une fraction de seconde le contrôle de sa personne.
Elle me sourit avant de me dire:
- Merci, je pense pouvoir me débrouiller seule maintenant.

Je restais de nouveau bouche bée devant cette femme qui semblait gérer ses émotions à la perfection sans se lamenter sur son sort et même remercier la personne responsable de son malheur.

- Je suis tellement désolée, Elley. Dis moi si tu as besoin de quoi que ce soit.
J'étais si confuse, je me sentais d'autant plus mal et coupable.

- Ce n'est pas à toi que je dois en vouloir.
Sur ses mots, elle prit une serviette et fit couler l'eau dans la baignoire.

Je quittais la pièce, réfléchissant à ses derniers mots en rejoignant Kays, encore plus tourmentée que tout à l'heure.

.

PDV de Ascian

- Tu devrais apprendre à fermer les portes.
Lui dis-je adossé à cette dernière, observant ses longs cheveux auburn coller à la peau claire de son dos alors qu'elle se trouvait assise dans la baignoire dans un silence étouffant.

- Tu devrais apprendre à passer ton chemin.
Sa réplique était piquante comme chaque mot qu'elle avait pour moi.

- Laisse moi tranquille Ascian, je veux être seule.
Sauf dans cette dernière phrase, où ses mots étaient tremblants, était-elle en train de pleurer ?
Pourquoi abîmer son beau visage avec ses larmes ?

J'avançais vers elle, attrapant une chaise au passage et la traînant bruyamment jusqu'à sa hauteur.

- Ascian...
Dit-elle dans un souffle rauque.
Je pouvais ressentir ses émotions, ressentir sa peine comme si c'était la mienne et une impression de déjà vu me pris, je sentais au plus profond de moi que je devais être ici et nulle part ailleurs. Je devais être à côté d'elle, pour une fois je devais pas fuir et rester, je ne devais pas tout gâcher avec une énième personne dans ma vie.

J'avais dit que je l'aiderais, que je réparerai mon erreur, eh bien je le ferai.

- Dis moi de quitter cette pièce et je partirai sans discuter.
Mon ton se voulait le plus prévenant possible, avec une pointe d'autorité que je peinais à  dissimuler.

Pour toute réponse, je me heurtais au silence.
Seul son regard se tournait vers moi, ses cils étaient collés entre eux et ses yeux bruns humides.
Elle avait pleuré, une vague de colère m'envahit.
Comment j'avais pu en une soirée faire souffrir deux personnes ?
Je me haïssais d'une violence inimaginable...

- Pardonne moi Elley.
Lui chuchotais-je.

Elle tourna la tête face à la fenêtre, me tournant en partie le dos.
Elle ramena ses jambes contre sa poitrine et posa son menton sur ses genoux, entourant ses jambes de ses bras.
Elle semblait partie très loin dans ses pensées et je ne savais plus quoi dire tellement que chaque mot me paraissait mal venu.
Alors je ne sais pourquoi, je pris un mouchoir en tissu que je gardais depuis des années dans ma poche, celui de Marius, le jour où il m'avait annoncé la pire nouvelle de ma vie et je le plongeais dans l'eau tiède avant de le passer délicatement sur la peau de son cou et sur son épaule, essuyant le sang séché de l'homme que j'avais enterré pour elle plus tôt.

Jamais je n'aurais cru en arriver là, et pourtant je ne désirais être nulle part ailleurs.

La Protégée du Vampire. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant