Eldoria

11.

L’Éveil de la Détermination.

Je n’avais pas fermé l’œil de la nuit. Le silence du manoir, lourd et oppressant, ne m’avait offert aucun répit. Chaque battement de mon cœur était un rappel douloureux de la conversation que j’avais eue avec Hadrien. Mais tandis que les premières lueurs de l’aube se glissaient à travers les rideaux de ma chambre, une décision s’imposait en moi, claire et inébranlable.

Hadrien, avec ses yeux empreints de tristesse et ses mots hésitants, ne serait plus une distraction. Je ne pouvais plus me permettre de m’accrocher à cette faible lueur d’espoir qu’il avait représentée. Il m’avait menti, m’avait laissée dans l’ignorance face à un destin cruel, et pour cela, il ne méritait plus ma confiance. Je devais me protéger, me battre seule pour ma propre survie. Plus jamais je ne laisserais quelqu’un d’autre décider de mon sort.

Je me levai du lit avec détermination, effaçant les traces de larmes de mon visage d’un geste rapide. Le reflet dans le miroir me renvoyait l’image d’une femme que je ne reconnaissais plus, une femme brisée par la peur et la trahison. Mais je savais que cette image devait changer. Si je voulais avoir une chance de survivre, je devais devenir plus forte, plus résolue. Je devais creuser, découvrir ce que signifiait vraiment cette marque, et surtout, comprendre ce qui s’était passé avec l’ancienne reine.

Mes pensées tournaient à toute allure tandis que je revêtais une robe simple, de couleur sombre, symbole de mon état d’esprit. Fini les robes élégantes qui m’avaient été offertes en arrivant ici, fini les sourires feints et les attentes déçues. À partir de maintenant, je me battrais pour moi-même, sans compter sur l’aide de qui que ce soit.

J’étais prête à quitter ma chambre pour me rendre à la bibliothèque lorsqu’un léger coup résonna contre la porte. Je m’arrêtai, surprise. Qui pouvait bien venir me voir à une heure aussi matinale ? L’espace d’un instant, j’espérai que ce soit Hadrien, mais je secouai la tête pour chasser cette idée. Non, cela n’avait plus d’importance.

« Entrez, » dis-je d’une voix ferme, déterminée à ne plus montrer la moindre faiblesse.

La porte s’ouvrit doucement, révélant une femme que je n’avais jamais vue auparavant. Elle était grande, élancée, vêtue d’une robe de velours gris. Son visage, encadré par de longs cheveux noirs tressés, était d’une beauté froide, presque sévère. Ses yeux d’un bleu perçant me scrutèrent avec une intensité qui me mit mal à l’aise, mais je me forçai à soutenir son regard.

« Agnès, » dit-elle d’une voix douce mais ferme, s’inclinant légèrement devant moi. « Je suis Geminin, votre nouvelle dame de compagnie. Le maître Gautier m’a désignée pour veiller sur vous. »

Je plissai les yeux, méfiante. Gautier, encore lui. Il avait sûrement une raison derrière cette soudaine attention. Mais je ne laissai rien paraître de mon trouble et me contentai de hocher la tête.

« Pourquoi maintenant ? » demandai-je, croisant les bras pour dissimuler mon agitation. « Pourquoi Gautier a-t-il décidé que j’avais besoin d’une dame de compagnie à présent ? »

Geminin esquissa un léger sourire, mais il n’atteignit pas ses yeux. « Le maître souhaite simplement que vous vous sentiez entourée, que vous ne soyez pas seule dans ces temps difficiles. »

Je devinai que ces mots avaient été choisis avec soin. C’était une manière habile de me rappeler ma situation précaire, tout en déguisant cela sous des intentions bienveillantes. Mais je n’étais pas dupe. Gautier n’avait rien fait jusque-là par pure bonté d’âme.