_ Tu dois te préparer, dis-je d’une voix où perce du regret.
Elle fait passer ses jambes par-dessus le lit. Tu parles d’un timing. Ce n’est pas le moment de la faire sortir dans le froid, mais nous n’avons pas le choix. Je ne peux pas la laisser montrer son visage.
Je la prends par le coude, l’aide à se lever, mais elle me repousse. Je suis blessé quand elle me rejette, et surpris également.Comme si je ne le méritais pas.
Je l’ai prise violemment, sans même la préparer. Mais une punition est une punition, et je ferais bien de ne pas m’attendrir avec elle.
Je prends la petite culotte et la lui tends.
_ Tiens.
Elle me l’arrache des mains et rassemble le reste des vêtements avant de se rendre dans la salle de bain.
_ Jacky, protesté-je en essayant de la rattraper.
Mais elle m’arrête en levant la main et en prenant une profonde inspiration.
Je dois faire appel à toute ma volonté pour lui laisser l’espace qu’elle souhaite, surtout maintenant. Surtout au moment où des hommes l’attendent dans le salon.Je remarque ses petits pas et sa façon de se tenir droite pour cacher sa gêne. Elle ne veut pas que je le sache. Mais je le sais.
Le message est clair lorsqu’elle ferme la porte et pousse le verrou d’un geste ferme. Il me faut encore plus de contrôle pour ne pas la suivre et casser cette satanée porte. Je ne peux que faire les cent pas jusqu’à ce qu’elle sorte, un instant plus tard, habillée, mais les cheveux toujours hirsutes autour de son visage.
_ Assieds-toi, ordonné-je en la poussant sur le banc devant la commode.
Il a beau être matelassé, elle grimace quand ses fesses le touchent.Je trouve des chaussettes et une paire de baskets puis m’accroupis devant elle. Cette fois-ci, elle ne proteste pas quand je les lui enfile avant de nouer les lacets.
_ Écoute-moi, Jacky, dis-je en me redressant et en lui prenant le menton. Ils vont juste te poser quelques questions puis ils s’en iront.
Elle me fixe sans ciller, ses yeux sombres dans le vide. Comprend-elle seulement ce que je suis en train de lui dire ?
___ Tu comprends ? lui demandé-je avant d’ajouter à contrecœur : Si l’envie te prend de me trahir, souviens-toi de ce qui est en jeu.
Elle déglutit, puis hoche la tête.
___ Brave fille, dis-je en me baissant pour l’embrasser sur les lèvres. Ça ne prendra que quelques minutes. Tu pourras vite retourner te coucher.
Elle ne répond pas.
Je saisis la brosse sur la commode et m’efforce d’être doux en la passant dans ses cheveux, mais les poils se prennent dans les nœuds. Mes gestes remuent sa tête dans tous les sens. Elle ne résiste pas ni ne se plaint quand la brosse se coince.
Lorsqu’elle est plus ou moins présentable, je repose la brosse et l’attrape par le coude pour l’aider à se lever.
_ Comment vas-tu ?
Elle se dégage.
_ Je vais bien.
Je serre les poings pour résister à l’envie de lui reprendre le coude et m’empare de son manteau sur le dossier de la chaise pour le lui poser sur les épaules.
Le vent glacé nous fouette le visage quand j’ouvre la porte.Une rafale fait tanguer le yacht. Je passe mes mains autour de sa taille par-derrière quand elle manque de perdre l’équilibre et, malgré ses protestations, je la maintiens en l’entraînant vers l’escalier. Sa cage thoracique se gonfle sous mes paumes quand elle prend une profonde inspiration tandis que nous passons devant la fenêtre au travers de laquelle on aperçoit les hommes en uniforme bleu.