Chapitre 25 - Laël

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Mon poing se serre suite à l’appel du procureur qui me confirme qu’il a classé l’affaire Dalia sans suite faute de preuves. Putain. Ma main balaye au sol tous les dossiers qui étaient disposés en pile sur mon bureau. J’ai été assez nerveux ces derniers mois et cette nouvelle me met dans une colère noire. Je m’étais promis de faire tomber Stein et même ça je n’ai pas réussi à le faire. Qu’est-ce que j’ai réussi à faire de bien ces derniers mois ?

Ah si, faire partir Emma de mon appartement. Ce qui devait durer maximum une semaine s’est transformé en deux puis en un mois ensuite deux et j’ai enfin pu la déloger lorsque j’ai su que ses parents étaient rentrés de leur périple en Amérique du Sud et qu’elle pouvait enfin aller les rejoindre chez eux à Marseille. Je lui ai même acheté son billet de train et je me suis bien assuré qu’elle le prenne. Est-ce que je suis trop gentil ?

Il y a des moments où je me demande comment j’ai pu l’aimer un jour ou ne serait-ce que m’intéresser à elle. Tout ce qu’elle a toujours adoré c’est m’avoir entre ses filets et faire n’importe quoi de moi pour ensuite mieux me jeter comme un moins que rien. C’était toujours comme ça avec Emma, elle soufflait constamment le chaud et le froid.

Je sais que c’est de ma faute et que je n’aurais pas dû accepter de l’héberger mais comment refuser ? Je n’allais pas la laisser à la rue… J’ai fait mon maximum pour la croiser le moins possible, j’ai passé ces derniers mois au travail ou chez mes parents. Il y a même plusieurs soirs où j’ai dormi chez eux ou au commissariat car je voulais la croiser le moins possible. Bien sûr, je n’ai pas raconté à mes parents ce qu’il se passait, bien que j’aurais pu l'avouer à ma mère qui est assez compréhensive mais surtout pas à mon père qui adore me ridiculiser à chaque fois. Dans tous les cas, ils ne se doutaient de rien et ont mis sur le compte de la fatigue, le fait que je ne veuille pas faire la route pour rentrer chez moi.

Je me souviens d’un soir où je suis rentré à l’appartement. Emma avait préparé à manger et elle portait une tenue plutôt affriolante. Elle pensait vraiment me récupérer comme ça ?
Je souhaitais juste rassembler quelques affaires et aller dormir au commissariat lorsque qu’Emma s’est approchée de moi en frôlant mon torse de ses mains.

– Laël… je sais que tu me détestes pour tout ce que j’ai pu te faire… mais laisse nous une deuxième chance, je regrette et je t’aime tellement… Regarde, j’ai préparé ton plat préféré et je me suis faite belle juste pour toi. Tu te souviens quand on passait nos journées au lit… des journées plutôt sauvages a-t-elle dit en mordillant sa lèvre inférieure.

Je crois qu’elle aurait pu même être nue qu’elle ne me ferait plus aucun effet. Emma ne m’inspire plus que du dégoût et de l’indifférence.
J’ai rapidement retiré ses mains de moi.

– Tu restes uniquement ici car je ne veux pas que tu sois en danger dehors. Je ne t’aime plus Emma, je ne ressens plus rien pour toi. Dès que tes parents seront rentrés, tu partiras à Marseille et on ne se reverra plus jamais.

Elle s’était désespérément accrochée à mon t-shirt.

– Je sais que j’ai tout gâché mais jamais un homme n’avait fait tout ça pour moi. Et si tu le fais, ce n’est pas innocent Laël, c’est que tu m’aimes encore même si tu ne veux pas te l’avouer. C’est pour ça que tu fuis ton appartement non ? Tu as peur de craquer ? Ou c’est ta nouvelle copine le problème ?

Rien que de l’entendre parler de nouvelle copine m’avait fait exploser.

J’ai retiré une fois de plus ses mains de moi en m’agaçant :

– Il n'y a ni nouvelle copine, ni aucun amour inavoué, notre histoire a existé mais maintenant c’est du passé, il faut aller de l'avant. Je suis lieutenant de police et je ne vais pas te laisser en danger avec ton mec drogué, ça s’arrête là. N’y vois rien de personnel, toi ou une autre, j’aurais fait pareil.

Puis, j’avais récupéré mes affaires et avait abandonné Emma sanglotante dans l’appartement. Elle savait très bien faire semblant. Les journées m’ont paru interminables jusqu’à son départ qui a enfin eu lieu quelques jours avant Noël. Elle n’a cessé de me répéter qu’elle m’aimait encore jusqu’au quai de la gare alors que je n’avais qu’une envie : qu’elle quitte définitivement ma vie.

Ces derniers mois m’ont semblé une éternité et mes insomnies ne portaient qu’un seul prénom : Neva. J’ai l’impression d’avoir tout gâché avec elle et je m’en veux énormément. Tout allait bien avant qu’Emma n’apparaisse et que Neva me demande d’arrêter de la contacter. Qu’est-ce que j’aurais dû faire ? Ne pas respecter sa décision ? Je ne suis pas un forceur. Je m’en veux quand même chaque jour de ne pas avoir eu le courage de lui expliquer clairement la situation mais est-ce qu’elle allait comprendre et accepter que j’héberge mon ex ? Je ne voulais tellement pas la mêler à cette histoire et régler ça par moi-même. Je me questionne souvent :  est-ce qu’elle va bien ? Qu’est-ce qu’elle fait ?  Est-ce qu’elle a rencontré quelqu’un d’autre ? Est-ce qu’elle pense à moi ?

Moi je ne l’oublie pas et je me suis même surpris à rêver de son beau visage, de sa bouche qui me semblait douce, de sa répartie, de son humour...

J’affiche un léger sourire, chose qui était rare ces derniers temps.

Je tiens mon téléphone dans ma main et je le fixe depuis quelques minutes avec le pouce collé sur le numéro de Neva. Je devrais peut-être la prévenir pour l’affaire Dalia ?

Mais elle m’a dit qu'elle ne voulait plus rien savoir de moi. Peut-être même qu’elle a bloqué mon numéro ?

Je me ravise et balance mon portable sur mon bureau.

Laisse-la tranquille, si elle ressent le besoin de te parler, elle reviendra vers toi.



Quand le coeur balance...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant