Chapitre 10

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Un garde nous réveilla en toquant à nos portes, une douce lumière léchant le dessous des montants de bois grâce à la torche qu'il tenait.

– Un déjeuner vous attend dans la salle à manger, déclara-t-il d'un ton neutre.

Je me levais et sortit dans le couloir. Je jetai un coup d'œil à mes compagnons, qui faisaient de même. Kael était déjà alerte, malgré la fatigue visible sur son visage, tandis que Roger se frottait les yeux, encore à demi endormi. Roderic, fidèle à lui-même, paraissait totalement neutre. Nous suivîmes le garde jusqu'à la pièce dans laquelle nous attendait le repas.

De grandes fenêtres aux vitraux colorés laissaient passer les rayons de la lune, teintés de rouge et d'or. Au centre de la pièce, une longue table en bois massif était dressée, recouverte de plats aux arômes alléchants. La vue de tant de nourriture était surprenante dans un lieu aussi désolé, mais je supposais que Vagar et ses hommes devaient manger également. Je me demandais négligemment qui cuisinait avant de me dire que cela n'avais guère d'importance.

Nous nous installâmes en silence. Roger semblait mal à l'aise, ses yeux scrutant chaque recoin de la pièce, comme s'il s'attendait à ce que quelque chose surgisse de l'ombre à tout moment. Kael, lui, gardait son regard fixé sur la porte, toujours sur le qui-vive. Le maître des lieux brillait par son absence.

Je laissai mes doigts glisser sur le bord de l'assiette devant moi, mon appétit étouffé par l'inquiétude. Pourtant, il était vital de garder nos forces. Je pris une bouchée d'un petit pain tout chaud, appréciant plus que je ne voulais le reconnaître de goûter de nouveau à des aliments de qualité.

– Cette forteresse... murmura Roger, brisant le silence. Elle a vu tant de choses. Tant de vies brisées, consumées par la folie et le désespoir. Je ne peux m'empêcher de penser à ceux que nous avons croisés jusqu'ici... Ils étaient comme nous, autrefois.

Kael hocha la tête. Ses yeux trahissaient une réflexion intense, comme s'il pesait chaque option, chaque mot.

– C'est pour cela qu'il sera vital d'accepter le marché que nous proposera Vagar, grogna-t-il. Peu importe ce que ça doit nous coûter, il nous faudra aller jusqu'au bout, ou nous finirons comme tous ces gens.

Nous hochâmes la tête à l'unisson avant de nous murer dans le silence pour manger. La nourriture était excellente et comblait mon ventre affamé avec délice. Les gardes postés devant les différentes portes des salles rendaient néanmoins ce repas intimident. Les couverts glissaient sur les assiettes en silence, chacun perdu dans ses pensées. La nourriture, bien que fabuleuse, apportait un réconfort temporaire, mais aucun d'entre nous ne se laissait vraiment aller au plaisir de manger. Le poids des événements et de l'accord qui se profilait assombrissait l'air autour de la table.

Je relevai les yeux en entendant un léger bruit. Les chandelles vacillèrent, projetant des ombres mouvantes sur les murs. Une sensation glaciale parcourut ma colonne vertébrale. Là, dans l'encadrement de la porte, se tenait Vagar. Ses yeux perçants brillaient dans la pénombre, ses deux serpent le suivant fidèlement.

Kael posa immédiatement sa main sur le manche de son épée, son regard se durcissant. Roderic se redressa légèrement, ses yeux scrutant l'Apostat avec une attention toute particulière. Roger quant à lui, baissa instinctivement la tête, sa main se crispant sur le bord de la table.

Vagar s'avança lentement, chaque pas résonnant avec un écho sinistre. Il s'arrêta juste en face de moi, ses yeux dorés me fixant avec une intensité qui semblait transpercer mon âme. Mon cœur battait à tout rompre, et je luttais pour maintenir mon calme.

– Vous paraissez tous bien silencieux, dit-il, sa voix douce, mais glaciale. Il est rare d'avoir des invités dans ce château... et encore plus rare d'avoir des invités qui s'en sortent vivants.

Un Royaume Sans Aube - RomantasyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant