Le Fil Rouge

Chapitre 3 : Liens aveugles

Oka Makino

12h30 - Lycée du centre

Cela faisait maintenant cinq jours que j'étais au lycée. J'avais eu le temps de m'habituer à cet établissement et je pouvais m'y balader librement sans craindre de me perdre. C'était d'ailleurs ce que j'étais en train de faire. J'avais laissé mes amis dans la salle de classe où nous prenions notre déjeuner afin d'aller aux toilettes.

Tiens ? Elles n'étaient pas par là, les toilettes ?

Visiblement, je ne maîtrisais pas mon environnement comme je le croyais. Pas grave. Tant que personne ne me voyait faire demi-tour...

– T'es perdue ?

Ah... raté.

Je me tournais afin de découvrir à qui appartenait cette voix. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je vis le garçon qui s'asseyait juste derrière moi en classe.

Oh putain ! Reste calme, Oka ! Respire !

Mon coeur fit un bond. Il était grand, avec un parfum qui semblait m'attirer comme un aimant. C'était la première fois que je me trouvais si près de lui et je remarquais de fines taches de rousseur qui constellaient sa peau brune. Ses yeux, qui me fixaient intensément, étaient d'un vert clair hypnotisant. Ses cheveux noirs, courts et bouclés, n'étaient que la cerise sur le gâteau.

OK, l'homme est beau. Vraiment beau.

– Ça se voit tant que ça ? demandais-je, un sourire un peu nerveux aux lèvres.

– Un peu, ouais, répondit-il en me rendant mon sourire.

Non, ne me souris pas, mec.

Je m'attardais sur son uniforme, cherchant son nom : Akio Shimoda.

– Shimoda, tu ne saurais pas où sont les toilettes par hasard ?

Bien joué, Oka !

Il sourit à l'entente de son nom, puis prit lui aussi le temps de regarder le mien inscrit sur mon uniforme avant de me répondre.

– Juste là-bas, Makino, dit-il en pointant du doigt une porte à quelques mètres de nous.

Les enfants, voilà comment j'ai rencontré votre père !

– Merci beaucoup, répondis-je en m'éloignant.

En avançant vers les toilettes, je croisais une fille qui souriait de toutes ses dents. Elle devait avoir vu quelqu'un qu'elle aimait beaucoup. J'aimerais bien pouvoir sourire à quelqu'un comme ça, moi aussi... Enfin, ce n'était pas en côtoyant Rin tous les jours que ça allait arriver.

– T'as fini ? demanda quelqu'un derrière moi.

– Oui, on y va ?

C'est bizarre, cette voix me semblait familière.

Ce n'est pas mon futur mari, quand même?

Je ne pouvais pas être trahie aussi tôt dans la relation. Je me devais de vérifier si je venais de me faire tromper en direct ou non. Mais en me retournant pour jeter un coup d'œil discret, j'eus l'impression qu'on me transperçait le cœur avec une épée. Shimoda avait enroulé son bras autour des épaules de cette fille, et ils s'éloignaient ensemble dans le couloir, loin de moi.

C'était pour lui qu'elle souriait. Et c'était elle qu'il attendait non loin des toilettes.

Aïe.

Ce n'était pas grave, des gars aussi beaux que lui, il y en avait plein les rues ! Enfin, sauf celle de Rin...

J'ouvris la porte des toilettes en faisant mine de ne pas voir mon égo brisé en mille morceaux par terre. Comment avais-je pu penser qu'un beau gosse comme lui était encore célibataire ? Et, en prime, qu'il s'intéresserait à moi ?