Chapitre 14

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Même si je n'arrêtais pas d'insister, Flint refusa de me dire ce que signifiait son étrange surnom. Raah ! Il était tellement énervant ! A la place, il me demanda ce que je savais sur l'art de la divination :

« Apparemment, le démon qu'on pourchasse serait un devin. Tu sais ce que c'est gamin ?

– C'est pas quand on peut voir le futur ?

– Presque. Mais c'est un poil plus compliqué que ça. En gros, c'est voir des milliards de possibilités sur ce qui va se passer, et décider laquelle réaliser.

– Hein ?

Il m'avait perdu. D'ailleurs, ça devait se voir, car il sourit et me dit :

« Je vais essayer de t'expliquer plus simplement. Regarde, là je suis juste assis sur un banc. Mais il y a différents futurs qui existent. Le futur où je me lève, le futur où je reste assis, le futur où je m'endors sur ce banc, le futur où je te demande d'aller me chercher une bouteille d'alcool... Et il en existe quelques milliards.

– Ouah. Ça fait beaucoup. Mais on ne devient pas fou ? Je veux dire, avoir autant de possibilités dans la tête d'un coup...

– C'est pour ça que la plupart des devins ne regardent qu'une ou deux secondes dans l'avenir.

Je comprenais mieux... Mais alors, ça voulait dire que le démon saurait quel coup je voudrais lui donner ! Enfin, à condition qu'on le trouve bien sûr. Flint se leva alors du banc et s'étira, puis me demanda :

« Eh gamin, tu voudrais pas me ramener un peu d'alcool ? Ce futur là me semble bien.

Euh... quoi ? Il me prenait pour son larbin ou quoi ?! Mais au moment où j'allais lui dire, il me désigna le comptoir d'accueil du doigt :

« Les gars de l'accueil en ont une sacré réserve. En plus...

– C'est non.

– Allez quoi ! Et puis tu seras rémunéré...

– C'est d'accord !

Je souris. Un peu d'argent ne me ferait pas de mal ! Mais avant, j'avais une question :

« Comment vous savez qu'il y a de l'alcool à l'accueil ?

– Disons que j'ai tapé dans leur réserve il y a quelques années. Si tu veux mon avis, ils m'en veulent toujours...

Je soupirais. Pas étonnant venant de sa part ! Flint reprit :

« Ils ont de la bière, du curaçao, du saké, de la vodka, de la limoncello... ils ont même du whisky ! Si tu pouvais m'en rapporter quelques bouteilles, ce serait parfait.

Sérieusement, il en avait fait un inventaire ou quoi ? Mais bon, je devrais être habitué à force... Je me dirigeais alors vers le comptoir. C'était là que les Chasseurs venaient chercher leur argent. Leurs primes. Et parfois, certaines sommes étaient énormes ! A se demander comment la Guilde avait autant d'argent...

Mais bon, je n'étais pas là pour ça. Je me dirigeais vers la première réceptionniste, une femme d'une vingtaine d'année, brune aux yeux verts. Lorsqu'elle me vit, elle fronça des sourcils :

« Je ne t'ai jamais vu... Qu'est-ce que tu fais ici ? Ton mentor t'accompagne au moins ? Et puis qui est-il ? Sérieusement, ils recrutent de plus en plus jeune, c'est n'importe quoi... D'ailleurs, toi tu t'appelles comment ?

– Euh... Je m'appelle James Crew. Et je ne suis pas si jeune que ça, j'ai 17 ans !

– C'est bien ce que je disais, un vrai gamin. Bon plus sérieusement, tu veux quoi ?

– Bah en gros, on m'a dit que vous aviez de l'alcool, et je voulais savoir si je pouvais en prendre quelques bouteilles ? Du whisky de préférence.

La jeune femme me regarda d'un air moqueur et me dit :

« T'es trop jeune pour boire. Ne vas pas t'imaginer que je suis sympa et que je vais t'en passer.

– Non, c'est pas pour moi !

– C'est pour ton maître, hein ? Bah dis-lui de venir en personne. Au fait, c'est qui ?

– C'est l'homme là-bas, assis sur le banc, mais c'est pas mon maître.

Tout en parlant, je pointais Flint du doigt, qui me fit un petit signe de la main. S'il avait vraiment tapé dans leur réserve, les réceptionnistes devaient avoir une dent contre lui. Mais la brune semblait trop jeune pour l'avoir connu. Je n'avais plus qu'à espérer. Heureusement, elle dit :

« Connais pas. Mais bon, je suppose que je peux t'en donner... du whisky, c'est ça ?

– Oui, merci beaucoup.

– Attends deux petites secondes, il me faut la clé de la réserve. NOÉ !!!

Je sursautais. Bon sang, elle avait des cordes vocales en titane ou quoi ? Le temps que mon coeur se calme, un homme au visage couvert de cicatrices arriva derrière elle. Sûrement le fameux Noé. Il me dévisagea avec dédain et me demanda :

« C'est quoi le nom de ton maître ?

– En fait, c'est pas mon maître, mais plutôt mon employeur...

– Je m'en fous. C'est quoi son nom ?

Aïe, aïe, aïe... Lui et Flint avaient toutes les chances de connaître ! Je ne donnais pas cher de ma peau si je lui disais... Mais au moment où j'allais donner un nom au pif, Flint m'appela :

« Mon whisky, c'est pour aujourd'hui ou pour demain ? Dépêche-toi un peu gamin !

Et m*rde. L'homme au cicatrice regarda d'où venait la voix, et quand il vit Flint, son visage devint rouge. Sur le coup, j'avais bien cru que la veine de sa tempe allait exploser ! Au même moment, Flint le vit et sourit :

« José, comment ça va ? T'as renouvelé ta réserve d'alcool ?

– C'est pas José, c'est Noé !

– Oui, oui, c'est ça...

Noé sortit en trombe de derrière le comptoir et alla se planter devant Flint, qui souriait d'un air désinvolte. Non mais sérieux, il s'était mis combien de mecs à dos ? Noé se redressa alors de toute sa hauteur, mais même comme ça, Flint faisait une bonne tête de plus que lui. En même temps, peu de gens mesurait plus de 1m90 ! C'était un vrai géant ! Je plaignais presque Noé...

D'ailleurs, attirés par les cris de ce dernier, les autres Chasseurs présents dans le hall formèrent peu à peu un cercle autour d'eux. Je n'arrêtais pas d'entendre des chuchotements :

« ... une bagarre ?

– Mais alors...

– ... volé... alcool...

A croire que les bêtises de Flint étaient connues dans toute la Guilde... Je soupirais : comment arrivait-il à s'attirer autant d'ennuis ?

Un peu difficilement, je réussi à sortir de la foule. Si je ne voulais pas me faire piétiner, j'avais intérêt à rester près du comptoir. D'ailleurs, je pouvais même y grimper pour mieux voir la bagarre. Une fois dessus, je m'aperçus que Flint ne réagissait pas. Noé avait beau lui hurler dessus et le menacer, Flint ne bronchait pas. Soudain, j'entendis une voix derrière-moi :

« Super, il a du Woodford Reserve Distiller's Select ! Mon whisky préféré...

– Flint ?

Mon employeur se tenait accroupi derrière le comptoir, en train de dévaliser la réserve d'alcool. Qu'est-ce qu'il faisait là ?! Il était toujours là-bas pourtant ! Je voyais Noé en train de lui crier dessus ! Flint leva les yeux vers moi et sourit d'un air coupable :

« Oups...


Les chroniques d'Alastor : Ange déchuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant