Mon souvenir perdu (Mein verlorenes Gedächtnis)

Chapitre 22

     Un mois. À peine un mois et je vais déjà partir. Je ne veux plus, je ne peux plus.
Il me hante.
Comment ? Pourquoi ? Je n'ai jamais éprouvé ça à personne auparavant. Est-ce que c'est de l'amour déjà ? Je ne saurais répondre à mes propres questions. Et si c'était juste de l'attirance ? J'ai peur de lui en plus, après ce qu'il s'est passé.
  À chaque fois que je le vois, je deviens nerveux et c'est embarrassant pour moi et énervant pour lui.
  Pourquoi je suis attiré par lui ? Il est si froid et ne veut clairement pas faire ami-ami avec moi pour commencer, alors espérer plus de sa part est inconcevable.
Je ne me comprendrai jamais.
Je ne sais même pas s'il aime les hommes ! Et s'il est homophobe ? Est-ce qu'il peut aimer déjà ?
  Désolé d'être trash, mais avec son comportement... Je ne sais pas s'il veut faire fuir tout le monde ou faire un casting de méchant pingouin pour un film Hollywoodien.
Non parce qu'on ne peut pas connaître plus froid que lui.
  Quoique, il m'a l'air proche de Hans quand même. Et il paraît moins renfermé avec lui. Ils sont amis, ça c'est sûr. Mais qui sait ? Peut-être plus au final...
  Non, je ne veux pas savoir ça. Je ne veux plus avoir affaire avec Bastian ou quoique ce soit qui se rapproche de lui.
Il a découvert mon "secret" et depuis, Hans me pouponne comme un enfant. Il fait attention à ce que je fais quand il est dans les environs. Il vérifie même si je me sens bien ou pas !

  De plus, j'ai eu assez de scénarios dans ma tête avec Bastian pour être envieux d'en avoir plus, de recevoir même un petit traitement spécial de sa part. Un peu d'attention au moins. Rien qu'un échange de regard qui signifie plus que "tu es mon assistant et moi ton supérieur" ou qu'il s'occupe de moi comme quand je ne me sentais pas bien sur le canapé.
  Je vous promets que ces "scénarios" n'étaient pas voulus. Je ne peux pas contrôler mon imagination et mon corps. Bien que j'aimerais, ça m'aurait évité de terminer une boîte de mouchoirs pour ça...
Hein ? Oubliez ça.

Je me gare dans le parking de l'entreprise et sort de ma voiture. Je prends ma sacoche et m'avance vers l'entrée du bâtiment.
C'est petit mais c'est spacieux et bien entretenu. Je me présente à la secrétaire et elle me donne le chemin pour me rendre au bureau du co-directeur. Je suis ses instructions et toque à la porte. Je suis un peu nerveux et mes mains sont moites.
"Entrez donc !" me dit la personne alors qu'elle ouvre la porte en grand.
Elle fait un pas sur le côté pour me laisser entrer. Je le salue d'un signe de la tête en entrant dans la pièce. Il ferme la porte derrière moi et tire l'une des chaises de son bureau vers l'arrière pour que je puisse m'assoir dessus.
Un vrai gentleman.
Je le remercie et m'assois sur le siège en face de son bureau. Il rejoint sa propre place derrière celui-ci.
Un bureau plus petit que ceux dont j'y étais habitué. Néanmoins, il est plus accueillant et coloré que celui dans lequel je passais mes journées entières.
"Bonjour, je suis J-...
- Jisung Joon-ho. Je sais, j'ai lu votre dossier."
Il me coupe la parole et pourtant, je ne suis pas agacé. Il a pris le temps de lire mes documents alors que l'autre non. D'ailleurs, il est habillé d'un grand sourire amical et chaleureux.
Ça change de d'habitude.
"Pourquoi voulez-vous [...]"
Puis nous parlons.
Je l'apprécie déjà. Il est gentil, charmant et sympathique - tout ce qu'il n'est pas.

Au bout d'une heure ou moins, je me lève de la chaise et nous nous serrons la main respectueusement et toutefois, amicalement.
"On se reverra bientôt, M. Jisung.
- Je l'espère aussi, M. García."
On se lâche la main avec un sourire poli. Je me retourne pour rejoindre la sortie mais il ajoute :
"Mettez autre chose la prochaine fois qu'on se voit, M. Jisung. Une tenue correcte est obligatoire ici. Excusez-moi pour ça mais ce n'est pas moi qui ait fait les règles au sein de notre compagnie."
Je me sens idiot. J'aurais dû m'en douter mais je me suis ramené avec la même tenue que j'ai l'habitude de mettre partout - un sweat-shirt et un jean. Ça ne m'arrange pas du tout mais je n'ai pas le choix.
"Je m'inquiétais que vous ayez chaud à cause du port d'un costume et que j'ai à vous rassurer de la bonne climatisation qu'on dispose ici mais vous portez déjà un pull en plein été."
Je ris légèrement mais nerveusement, embarrassé.
"Oui, en effet. Je tâcherai de mettre un costume la prochaine fois. Bien, à très vite, monsieur !"
Et je m'en vais en fermant la porte de son bureau derrière moi.