Chapitre 6 : Menace

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Yuta Tatsumi

15h35 - Quartier du haut - Maison de Yuta

Le monde était clairement contre moi.

À peine dix minutes s'étaient écoulées depuis le début de notre partie de Uno, et j'avais déjà dû piocher vingt cartes. Sérieusement, avais-je été maudit ?

Maiko et Seki étaient arrivés chez moi il y a environ une heure, et nous étions maintenant installés dans ma chambre. Cela faisait plus de deux semaines que Seki n'avait pas mis les pieds ici. Il avait été interdit de sortir de chez lui, sauf pour aller au lycée, toujours sous l'œil vigilant d'un garde du corps.

Il nous avait raconté toute l'histoire. Tout ce qui s'était passé ce jour-là. Le comportement et les inquiétudes de ses parents avaient complètement changé son quotidien, et le nôtre avec. Il se retrouvait à passer la majorité de son temps avec Kaoru Murayama, une fille de sa classe, dont les parents, amis des siens, étaient également inquiets. Ils allaient ensemble au lycée, rentraient ensemble, et, le pire, c'était qu'ils déjeunaient ensemble. Ce qui faisait que, n'étant pas dans la même classe, nous ne partagions plus ces moments habituels tous les trois.

Heureusement, après plusieurs jours passés à ne communiquer que par message, son père avait finalement consenti à le laisser nous rendre visite.

– Tiens, plus quatre ! déclara Seki en riant. Et Uno !

– Tu crois vraiment que je vais encore piocher avec les cinquante cartes que j'ai déjà en main ? Plus huit, ripostais-je avec un sourire en coin.

Nos regards se tournèrent simultanément vers Maiko, qui affichait une mise désespérée.

Elle soupira, résignée, avant de tendre la main vers la pile pour piocher. Mais, au dernier moment, un éclat de lumière traversa ses yeux.

– Plus douze ! lança-t-elle en déposant triomphalement une carte "+4" au-dessus de la mienne.

Seki éclata de rire, suivi de près par Maiko.

– Non... soupirais-je en le fixant.

– Oh que si, Yuta...répondit-il, un sourire victorieux sur les lèvres.

Quelqu'un m'a définitivement jeté un sort...

Il déposa un dernier "+4" sur le jeu. Mais heureusement pour moi, il remporta la partie avant que je n'aie à piocher ces seize cartes supplémentaires.

Plus tard, nous étions tous les trois allongés sur mon lit, discutant de tout et de rien. C'était une habitude que nous avions gardée depuis l'enfance : fixer le plafond, chacun plongé dans ses pensées, tandis que nous évoquions les sujets les plus divers, sans la moindre crainte ou gêne.

Soudain, une sonnerie de téléphone brisa le calme de la pièce.

"Who run the world? Girls (girls). Who run the world? Girls (girls)"

– T'as encore cette sonnerie ? demanda Seki en se tournant vers Maiko, un sourcil levé.

Son téléphone, posé par terre à l'endroit où nous jouions quelques minutes plus tôt, vibrait doucement. C'était Seki, il y a quelques années, qui lui avait suggéré de mettre cette chanson comme sonnerie.

Elle n'avait pas l'habitude de recevoir des appels, ce qui expliquait sa surprise.

– Évidemment, répondit-elle en souriant fièrement.

Mais elle n'avait toujours pas compris.

Je l'observais, sourire en coin, attendant de voir combien de temps il lui faudrait pour comprendre. Le sourire de Maiko vacilla, ses lèvres se figèrent, et ses yeux s'écarquillèrent en réalisant enfin ce qui se passait.

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