Chapitre 28

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Après ma rencontre avec Lysara je repris mes recherches pour trouver Emirya, toujours troubler par la fae.

Je la trouvai finalement dans les jardins intérieurs. La lumière pâle de la lune baignait son visage, mettant en valeur ses traits déterminés et la lueur farouche dans ses yeux. Elle était belle, bien sûr, mais à cet instant, ce n'était pas cela qui me frappa. C'était la force qu'elle dégageait, la gravité de ses pensées, et la façon dont elle semblait porter le poids du monde sur ses épaules.

Elle ne bougea pas lorsque je m'approchai, mais je savais qu'elle m'avait entendu. Je restai là, quelques secondes, silencieux, observant son profil. Il y avait tant à dire, tant à réparer. Mais par où commencer ?

— Emirya... murmurais-je doucement, sentant ma voix trahir une émotion que je ne pouvais plus ignorer.

Elle resta immobile, ses bras toujours croisés, fixant l'horizon comme si mes mots n'étaient qu'une brise légère, incapable de la toucher.

— Il n'y a rien à dire, Cassian, répondit-elle finalement, sa voix froide coupant l'air entre nous. Tu as déjà dit tout ce qu'il y avait à dire, n'est-ce pas ?

Son ton me transperça, mais il y avait autre chose, quelque chose derrière cette colère. Un sentiment que, même elle, ne semblait pas totalement comprendre ou accepter.

— Non, je me suis trompé, dis-je rapidement, m'approchant d'elle. Je me suis mal exprimé. Ce que je t'ai dit ce jour-là... ce n'était pas ce que je pensais, ni ce que je ressens vraiment.

Elle tourna légèrement la tête vers moi, son regard sombre et perçant comme une lame. L'espace entre nous semblait soudainement minuscule et immense à la fois.

— Alors qu'est-ce que tu ressens, Cassian ? Parce que ce que j'ai entendu, c'est que je n'étais qu'un joli visage, un trophée que les hommes désirent. Est-ce là tout ce que je suis pour toi ? demanda-t-elle, une lueur de vulnérabilité dans sa voix, malgré le ton glacial qu'elle essayait de maintenir.

Je serrai les poings, tentant de canaliser les mots qui se bousculaient dans ma tête. Je ne pouvais plus me permettre d'être maladroit, pas cette fois.

— Tu es tellement plus que ça, murmurai-je avec une sincérité que je n'avais jamais exprimée auparavant. Je t'admire, Emirya. Ta force, ta détermination, la façon dont tu te relèves, encore et encore, malgré tout ce que tu as perdu. C'est toi, entière, qui m'impressionne.

Elle fronça légèrement les sourcils, comme si mes mots l'étonnaient autant qu'ils la touchaient. Mais elle ne laissa rien paraître, gardant cette distance glaciale qui semblait pourtant vaciller.

— Tu crois que je peux oublier ce que tu m'as dit ? demanda-t-elle, sa voix tremblante d'une colère mal dissimulée. Je ne suis pas comme ces femmes que tu peux simplement flatter ou... ou blesser sans conséquence.

Je fis un pas de plus vers elle, cette fois incapable de réprimer ce sentiment qui grandissait en moi. Ce n'était plus seulement une question de pardon. C'était cette connexion invisible, cette attraction que je n'avais pas voulu reconnaître jusque-là. Et qui, pourtant, était bien réelle. J'en oubliais ma rencotre avce Lysara .

— Je ne te demande pas de m'oublier, ni même de me pardonner tout de suite, dis-je doucement. Je te demande juste... de me laisser te montrer qui je suis vraiment.

Elle me regarda alors, ses yeux plongeant dans les miens avec une intensité qui me laissa presque sans souffle. Cette distance entre nous, ce vide que j'avais ressenti, n'était peut-être pas seulement de la colère. Il y avait autre chose, une tension électrique, une émotion partagée qu'elle tentait désespérément de réprimer.

— Cassian, murmura-t-elle, cette fois avec moins de froideur.

Je m'approchai encore, si près maintenant que je pouvais sentir la froideur de sa peau .

— Essaie, dis-je doucement, presque suppliant. Juste... essaie.

Elle détourna légèrement les yeux, sa respiration légèrement plus rapide, comme si elle luttait contre quelque chose en elle-même. Ce silence, lourd et plein d'émotions contradictoires, semblait s'étirer à l'infini.

Puis, lentement, elle relâcha ses bras, comme si elle baissait sa garde, juste un instant. Ses yeux se relevèrent vers les miens, cette fois sans colère, mais avec une vulnérabilité que je n'avais jamais vue chez elle auparavant.

— Je vais essayer, dit-elle finalement, sa voix à peine plus forte qu'un murmure.

Mon cœur s'emballa, mais je n'osai pas bouger. C'était un pas, un simple mot, mais il signifiait tout.

Un silence s'installa entre nous, mais cette fois, il n'était plus aussi lourd, plus aussi oppressant. La distance qui nous séparait, à peine quelques centimètres, paraissait infiniment plus proche qu'auparavant. Emirya n'avait pas reculé, elle n'avait pas tourné les talons comme je l'avais craint. Elle restait là, face à moi, et même si ses yeux cherchaient encore à comprendre ce qu'elle venait de dire, elle m'avait donné une chance.

Je savais que les mots ne suffiraient pas, pas encore. Il faudrait plus qu'une simple promesse murmurée sous les étoiles pour effacer les blessures de nos malentendus. Mais pour la première fois depuis des jours, il y avait une ouverture. Un espoir.

— Merci, dis-je doucement, mes yeux capturant les siens, cherchant à saisir ce moment avant qu'il ne s'échappe.

Elle hocha à peine la tête, comme si elle hésitait encore à regretter sa décision. Sa mâchoire était toujours crispée, et ses doigts se resserraient nerveusement contre le tissu de sa robe. Ce n'était pas de la faiblesse, non, mais un combat intérieur qu'elle menait pour garder le contrôle. Pourtant, derrière cette façade de force, je pouvais sentir quelque chose d'autre. Une vulnérabilité qu'elle cachait soigneusement, même à elle-même.

— Ne me déçois pas, Cassian, finit-elle par lâcher, presque à mi-voix, sans détacher son regard du mien.

— Je n'en ai pas l'intention, répondis-je, sans la moindre hésitation.

Elle acquiesça, mais ses yeux parlaient encore de doute. Peut-être n'était-elle pas prête à baisser toutes ses défenses. Peut-être qu'elle ne le serait jamais vraiment. Mais pour l'instant, c'était suffisant. Le simple fait qu'elle accepte d'essayer était déjà plus que ce que j'aurais osé espérer quelques heures auparavant.

Sans un mot de plus, elle tourna les talons, ses pas légers résonnant à peine sur les pavés du jardin. Je la regardai s'éloigner, le cœur battant encore trop vite.

Lorsque sa silhouette disparut derrière les arches du palais, je laissai échapper un long soupir, presque soulagé. Ce n'était qu'un début, et pourtant, c'était tout ce dont j'avais besoin.

Le peuple de l'air : La Princesse OubliéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant