Chapitre 29

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Le lendemain matin, le palais était en ébullition. Les bruits métalliques des armures que l'on ajustait, des épées que l'on affûtait, et des chevaux piaffant d'impatience emplissaient l'air. Des soldats se précipitaient d'un bout à l'autre de la cour, leurs visages tendus, concentrés sur les préparatifs. On chargeait les charrettes avec des caisses de provisions et des caissons d'armes. Des arcs et des flèches bien rangés attendaient leur utilisation, tandis que la fumée s'échappait encore des forges où les derniers boucliers étaient façonnés.

L'atmosphère était lourde d'anticipation. Nous partions en guerre, et chacun savait ce que cela impliquait. La campagne ne serait pas simple. Angel n'était pas un adversaire ordinaire, et son armée encore moins. Mais dans ce chaos organisé, une question me hantait : où était Emirya ?

Depuis notre échange de la veille, je ne l'avais pas revue. Peut-être m'évitait-elle à nouveau, ou bien, comme toujours, elle était simplement concentrée sur la mission, sur l'objectif. Cela ne changeait rien à ma frustration grandissante.

Je m'apprêtais à monter sur mon cheval lorsque je la vis enfin. Elle marchait d'un pas rapide et assuré, ses longs cheveux noirs attachés négligemment, la tête haute, le regard farouche. Sa démarche trahissait une détermination froide, presque implacable. Emirya était prête pour cette bataille bien avant l'aube, tout comme son esprit, affûté comme une lame.

— Nous sommes prêts, dis-je doucement, ajustant la bride de mon cheval, mes yeux la suivant du coin de l'œil. Tu te sens prête ?

Elle hocha la tête, jetant un regard rapide dans ma direction, avant de détourner les yeux aussi vite. Un geste bref, presque impersonnel, mais je savais que c'était sa manière d'accepter la situation. Nous avions un objectif commun, et tout le reste devait passer après.

— Oui, répondit-elle d'une voix aussi tranchante que l'acier. Il est temps de partir.

Alors que nous nous apprêtions à monter en selle, une silhouette familière s'approcha.Lysara Sylmaris, la fae au teint mat et aux boucles brunes soignées, avançait avec une grâce naturelle. Un parfum doux, légèrement sucré, flottait dans l'air, contrastant avec l'odeur brute de l'acier. Ses yeux dorés me fixaient intensément, un sourire à peine perceptible aux coins de ses lèvres. Elle était belle, presque magnétique, et sa proximité ne laissait pas indifférent.

— Prince Cassian, ravi de vous revoir dit-elle d'une voix douce, presque caressante.

—Heu de meme dis je

C'est alors qu'Emirya, alertée par mon changement d'attitude, tourna la tête vers Lysara. Ses yeux se plissèrent instantanément, une lueur de méfiance se reflétant dans son regard. Elle n'était jamais quelqu'un qui montrait facilement ses émotions, mais là, sa réaction était glaciale, presque hostile.

— C'est qui, elle ? lança Emirya d'une voix froide, son ton coupant comme une lame.

Lysara, qui n'avait visiblement rien remarqué de la tension croissante, s'inclina légèrement avant de répondre avec une courtoisie impeccable.

— Je suis Lysara Sylmaris, votre Grâce, dit-elle d'une voix douce mais assurée. Mon seigneur Gavriel m'a chargé de rester à vos côtés pour vous guider à travers les montagnes. Je connais bien ces terres et je pourrai vous mener à bon port.

Emirya plissa encore plus les yeux, son regard se durcissant. L'idée ne semblait pas du tout lui plaire.

— Hors de question qu'elle vienne, déclara-t-elle sèchement, ignorant complètement les politesses de Lysara. J'ai déjà Azura avec nous. Je n'ai pas besoin de me coltiner une nouvelle personne. Je vais en parler à Gavriel.

Elle se mit à chercher Gavriel du regard, visiblement prête à se plaindre directement. Je vis sa mâchoire se serrer, signe que sa patience était au plus bas.

—Je connais bien ces terres et je pourrai vous mener à bon port. Dit elle

Emirya resta silencieuse un instant, ses yeux scrutant Lysara de haut en bas avec une froideur qui tranchait avec la chaleur naturelle de l'instant précédent. Finalement, elle hocha la tête.

— Très bien, dit-elle simplement, mais son ton était sec, coupant. Fais ton travail, et reste en dehors de mes affaires.

Elle monta ensuite en selle avec une grâce glaciale, ses mouvements précis et déterminés, comme si elle cherchait à rappeler à tout le monde, moi y compris, qui commandait ici.

Je me tournai vers Lysara, sentant le poids de l'échange, et tentai de détendre l'atmosphère.

— Ne t'inquiète pas, dis-je en souriant, cherchant à alléger la tension. Emirya est... sur les nerfs ces derniers temps.

Lysara sourit à son tour, mais son regard doré restait fixé sur Emirya, comme si elle évaluait la situation d'un œil plus subtil.

— Elle est fascinante, murmura-t-elle, presque pour elle-même. Une femme de pouvoir.

Je l'observai, surpris par la perspicacité de ses paroles, mais également perturbé par la proximité qui s'était installée entre nous. Il y avait quelque chose chez Lysara qui attirait, quelque chose d'inexplicable. Une tension douce, presque sensuelle, qui rendait sa présence intrigante. Mais au fond de moi, je savais que c'était Emirya qui restait le centre de mes pensées, aussi difficile que cela puisse être.

— Je sais, dis-je simplement, en remontant en selle.

Lysara hocha doucement la tête, son sourire mystérieux toujours aux lèvres.

— La guerre et les alliances compliquent toujours tout, murmura-t-elle avant de tourner les talons pour aller récupérer sa monture.

Je regardai un instant sa silhouette disparaître dans la foule, puis mon regard se reporta sur Emirya. Elle était déjà en tête de l'escouade, dirigeant tout avec une maîtrise implacable. Si elle avait été affectée par l'échange, elle n'en laissait rien paraître.

Je la rejoignis rapidement, laissant la tension entre nous se dissiper dans le bruit des sabots frappant le sol.

— Prête pour ce voyage ? lui demandai-je, d'une voix légèrement plus détendue.

Elle me jeta un bref regard, froid mais pas hostile, avant de répondre :

— Nous n'avons pas le choix. L'important, c'est d'arriver avant qu'Angel ne renforce ses troupes. Il n'y a pas de place pour les distractions.

Ses mots, bien qu'impersonnels, sonnaient comme un avertissement. Un rappel que, malgré tout ce qui se passait autour de nous, la guerre restait notre priorité.

Le peuple de l'air : La Princesse OubliéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant