Chapitre 65 - Jonas

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Lundi...

Le clocher de l'église résonne à huit heures trente, marquant chaque coup comme un rappel du temps qui s'écoule inexorablement. Nelly gare sa petite voiture verte sur la place de parking. Jonas est déjà là, adossé au mur du bâtiment, la posture décontractée, un pied calé pour stabiliser sa position comme si tout est sous contrôle. Yan l'a prévenu que des paparazzi l'ont déjà photographié ici, et Jonas est conscient qu'il doit faire preuve de prudence. Chaque geste compte. Il doit maîtriser son comportement, surtout avec Nelly. Rien ne doit transparaître de ce qu'il ressent.

Elle s'approche, vissant son bonnet sur ses oreilles, comme pour se protéger à la fois du froid et de la réalité qui l'entoure.

— Salut, lance-t-elle d'une voix qu'elle veut posée, maîtrisée.

— Salut, répond Jonas doucement, son regard pénétrant cherchant à capter la moindre de ses émotions enfouies.

Nelly s'avance pour ouvrir la porte du petit bâtiment, l'air glacial de l'automne saisissant ses joues. Jonas l'observe. Elle pousse le battant et entre, ses pas résonnant légèrement sur le sol. Elle se dirige vers le bureau au fond du couloir et s'y installe, presque avec automatisme, laissant son sac tomber près de ses pieds. Jonas, la suit à quelques pas, ne peut s'empêcher de remarquer chaque détail. Il scrute le balancier de sa queue de cheval, le mouvement de son corps, qui lui paraît plus fragile, moins fluide que d'habitude. Une ombre traverse ses pensées. Elle est mince, trop mince peut-être. Il remarque aussi la façon dont ses épaules se voûtent légèrement, comme sous le poids invisible d'un fardeau qu'elle ne parvient plus à porter seule. Sa démarche reste souple, mais il y a une tension sous-jacente. Jonas passe la porte et referme le battant derrière lui, les yeux encore rivés sur elle. Il se dirige vers les fenêtres et tire discrètement les rideaux. Il veut créer une bulle d'intimité, un espace où elle pourrait se sentir en sécurité, même si le silence qui tombe entre eux semble pesant. Et surtout un lieu où les paparazzi ne capterons pas leur proximité... Nelly lève brièvement les yeux vers lui.

— Qu'est-ce que tu fais ? murmure-t-elle, la voix vacillante, mais avec une note d'agacement, cherchant à couper court à ses pensées qui tourbillonnent.

Sans la moindre hésitation, Jonas prend une grande inspiration, sa mâchoire se contractant légèrement avant de lâcher, sans détour :

— Est-ce qu'il te bat ?

La question frappe Nelly de plein fouet. Son corps se fige, son souffle suspendu. Les mots résonnent dans la petite pièce, comme une bombe qui vient d'exploser dans son esprit. Elle tourne lentement la tête vers lui, ses yeux s'agrandissant sous le choc. Le monde semble vaciller autour d'elle, et tout devient flou l'espace d'un instant. Comment ose-t-il ?

Elle avale sa salive avec difficulté, sa gorge nouée, incapable de répondre tout de suite. Son regard papillonne un instant, trahissant son malaise, mais elle reprend rapidement contenance.

— Quoi ? souffle-t-elle, tentant de masquer sa stupeur, même si sa voix la trahit.

Mais Jonas ne recule pas, ses yeux se posant fermement sur elle, comme s'il attendait qu'elle lui avoue tout. Il sait que quelque chose ne va pas.

— Est-ce que Bertrand te bat ? répète-t-il, cette fois plus doucement, presque avec tendresse, comme pour ne pas la brusquer davantage.

Nelly sent une vague de panique monter en elle, son cœur battant si fort qu'elle a l'impression qu'il va exploser dans sa poitrine. Elle se redresse instinctivement, comme pour se défendre, comme si ses mots pouvaient effacer la réalité.

— Bien sûr que non, répond-elle, sa voix un peu plus forte cette fois, dans un élan de défense. Comment oses-tu dire ça ?

Elle lui faire face, son regard est plein de colère, mais derrière cette façade, la peur transparaît, comme un animal traqué cherchant une issue.

Joue-moi, l'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant