Chapitre 15

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Pov Sarah:

On resta de longues secondes à se dévisager ainsi. Lui dans son salon, moi sur le pas de la porte. Les choses auraient pu s'arrêter là, auraient dû s'arrêter là, devant cette dernière barrière invisible, celle qui me séparait de ce monde qui n’était pas le mien. 

- Entrez, m’invita Aylan.

 J’avais peur. Cette vérité me percuta lorsque je fus incapable de m’avancer vers le chanteur. J’avais goûté à l’enfer, et je n’avais pas oublié son goût amer. Cette fois-ci si je tombais je n’aurais plus le courage de me relever, je n’aurais plus envie de me sauver. Les larmes s’accumulaient derrière mes paupières. Je le sentais au prochain battement de cils je risquais de tout laisser tomber, d'arrêter de me battre contre l’inévitable.

 April.

 April.

 April. 

Elle m’avait recueilli, elle m’avait offert un foyer, elle avait tout lâché pour moi. Je ne pouvais pas me permettre d’être égoïste, pas si ma grand-mère avait à subir ma lâcheté. Trouver un objectif, une chose qui m'empêchera d’abandonner. C’est comme ça qu'elle m’avait élevé. 

Je finis par rejoindre le chanteur. 5 ans. C’est le laps de temps que la vie avait accepté de lui offrir. 5 misérables petites années. Ce serait ça mon nouvel objectif, 1825 jours. Seulement après je me permettrais d’aviser. 

- Vous vous sentez bien? me demanda Aylan lorsque je fus à sa hauteur. Vous aviez l’air ailleurs.

 Ne rien laisser paraître, sourire, ne rien laisser paraître quitte à mentir.

 - Il faut dire que je ne suis pas habitué à découvrir les appartements de Mayfair par delà leur façade. 

Aylan esquissa un sourire triste, cette fois-ci c’est le chanteur qui semblait être victime de ses pensées. Je le détailla quelques instants. T-shirt blanc et jean délavé par les années, au milieu de Piccadilly Circus il aurait été impossible de deviné que des foules se déplacaient pour l’entendre chanter. 

 Scott avait les yeux perdus dans le vide alors que le silence s'étirait sans pour autant être pesant. Il était doux. J’avais l’impression qu'à cet instant personne n’attendait rien de moi. Je laissai mes yeux errer autour de moi, découvrant la vaste pièce qui s’étendait derrière lui. La lumière inondait l’espace, les fenêtres recouvraient tout un pan du mur. Pourtant ce n'était pas la vue imprenable sur Londres qui réussit à happer mon regard, mais le piano le plus beau qu’il m’est un jour était donné de voir. Mes pieds foulèrent le parquet sombre vers la pièce maîtresse du salon, sans même que je m’en rende compte. Le revêtement des touches en ivoire luisait de propreté. 

-Vous jouez ? Me demanda le chanteur qui s'était rapproché. 

Je secouais ma tête  imperceptiblement. 

- J’avais un ami qui pouvait passer des heures derrière un clavier, répondis-je au bout de quelques instants.

Cole. Son image apparut soudainement dans mon esprit, assis bien droit devant son piano, concentré, comme si rien d’autre n’existait. Une douleur familière se réveilla, aussi vive que cette nuit-là.

Penser à lui serait donc toujours aussi douloureux…

Aylan ne posa pas d’autres questions, peut-être avait-il senti que la musique ne résonnait plus en moi depuis longtemps. Il vint se placer à ma gauche et laissa ses doigts glisser sur les touches. La mélodie qui s’échappa de l’instrument était grave, presque rauque, comme une plainte sourde. Chaque note était lente, mais si précise qu’on pouvait goûter à chaque son. La douceur amère de cette musique me bouleversa. Mon cœur battait en un même tempo, s’accélérant et ralentissant au gré des accords. Les notes semblaient effacer tout autour de moi, jusqu’à ne plus laisser que la musique, et elle seule. C’était enivrant. 

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 04 ⏰

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