04 - Le pinzutu

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10 juillet - 19:30

Ange

— Bon, il fout quoi, le Parisien ? Je crève la dalle.

— Ça va, il est encore tôt, tente de me calmer Francè. On prend un pastis, si tu veux.

Dédé nous sert rapidement l'apéritif et complimente les filles. Il faut dire qu'elles se sont mises sur leur 31 pour souhaiter la bienvenue au nouveau. On va assister à l'élection de Miss Village et personne ne m'a prévenu. Je les imagine tellement dans la chambre de Santa avec une montagne de fringues sur le lit, en train de se prendre en photo. Il vaut mieux que j'évite de me figurer la scène où elles font leurs essayages. C'est inhumain d'être amis avec ces trois canons.

L'anis apaise ma faim et mes nerfs.

— On pourrait réserver une table pour la soirée de vendredi, qu'est-ce que vous en pensez ? propose Francè. Je peux m'en charger, c'est mon cousin qui prend les réservations.

— Je croyais qu'on avait une table réservée d'office, en tant que stars de la soirée ! plaisante Santa.

— C'est clair ! approuve Lucia. Ils devraient même nous payer pour l'animation !

— Salut.

Nous nous retournons dans un même élan, tel un monstre à cinq têtes. Le mec a troqué sa tenue de mariage contre un tee-shirt avec une inscription en anglais, brodée au niveau du cœur. Il a dû se rendre compte qu'on n'était pas à Saint-Tropez ici.

— Trop cool que tu sois venu, déclare Santa. Tiens, installe-toi à côté de Lucia, on t'a gardé une place.

Je prie pour développer un superpouvoir. Celui grâce auquel mes pupilles pourraient lancer des éclairs. Sans ciller, Lou m'attrape la main sous la table. Elle me signifie qu'elle est autant ravie que moi.

Le nouveau s'exécute sans broncher, sans un sourire non plus. Aussi sympa qu'une porte de prison.

— Au fait, moi, c'est Santa. Lui, c'est François, dit Francè. Elle, c'est ma sœur, Joséphine.

— Moi, c'est Lucia et lui, c'est Ange.

Il hoche la tête tandis que la commissure de ses lèvres se rehausse.

— Vous avez des noms spéciaux ici. C'est pas une légende.

Si c'est pour dire des conneries pareilles, il valait mieux qu'il reste dans son silence. Je lève un sourcil et l'interpelle en me penchant en arrière :

— Toi, tu t'appelles comment ?

— Clément.

— Je préfère t'appeler le pinz'.

— Le quoi ?

— Le pinzutu, intervient Lucia d'une vois douce pour calmer le jeu. C'est pas méchant, c'est juste le nom qu'on donne aux continentaux.

Clément me dévisage. Son sourire agaçant n'a pas envie de le quitter.

— Je me demande comment on t'appellerait si tu débarquais dans mon groupe de pote à Paris.

— Le Corse, je réplique du tac au tac.

— Ouais, c'est vrai.

Pour la première fois depuis qu'il est arrivé, il rit franchement. J'aime bien sa répartie. Il est peut-être moins con que prévu. Je lui laisse le bénéfice du doute.

L'incident étant clos, une pluie de questions s'abat sur le pinzutu qui répond le plus souvent par oui ou par non. Il vit à Paris (sans blague), vient de passer son bac, mais est confiant quant aux résultats et va entrer en école de commerce : le portrait parfait du mec détestable. Il est en train de perdre le peu de points que je lui avais accordés. Et les filles qui boivent ses paroles ! Si ça se trouve, il s'invente une vie... Qu'elles sont naïves !

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Le parfum salé d'un été qui se meurtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant