10. Une semaine magique

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Sacha resta seul dans la chambre. Il entendaiit le bruit étouffé de la musique et des voix qui montaient depuis le rez-de-chaussée. Son cœur battait encore fort dans sa poitrine, la scène qui venait de se dérouler tournait en boucle dans sa tête. La confusion, la proximité, le baiser interrompu, la gêne... tout ça avait suffi à lui retourner l’estomac.
Assis sur le bord du lit, il passa une main sur son visage, essayant de se calmer. Il savait que la situation ne tenait plus qu’à un fil, un fil tellement mince qu’il aurait suffi d’un rien pour que tout éclate. Mais il n’y avait rien à faire maintenant. Gabin avait pris Océane par la main et était retourné à la fête, et lui, il restait ici, seul, à essayer de comprendre ce qu’il voulait vraiment.
Il se leva et se dirigea vers la porte, hésitant. Peut-être qu’il ferait mieux de descendre, de noyer tout ça dans un verre ou deux et de feindre un sourire. Mais avant même qu’il puisse poser la main sur la poignée, celle-ci tourna lentement.
Gabin était là, seul cette fois. Sacha releva les yeux, surpris de le voir de retour aussi rapidement.
— Tu fais quoi ? demanda Sacha en fronçant les sourcils.
Gabin resta immobile, comme s’il cherchait les mots.

— J'peux pas, je sais très bien que ça marchera pas.
Sacha resta silencieux. Il n’avait pas besoin de lui demander ce qu’il voulait dire, il savait exactement à quoi il faisait référence.
— Ces dernières semaines... ça a été l’enfer, reprit Gabin en entrant dans la chambre. Ne plus te voir, être avec elle… Je vois très bien que ça me convient pas.
— Alors quoi ? Tu comptes faire quoi ? continua Sacha, la voix légèrement cassante.
— J’en sais rien, merde, mais j’arrive pas à rester avec elle et faire comme si de rien. C’est trop compliqué. C’est...
Gabin se tourna vers lui, son regard troublé se posant sur lui, comme s’il attendait une réponse, une solution qui ne viendrait jamais.
— Qu’est-ce que tu veux que j’te dise ? répliqua-t-il en croisant les bras, le cœur serré. C’est toi qui t’es mis dans cette situation.
Gabin soupira profondément, se passant une main dans les cheveux.
— Je m’y suis pas mis tout seul dans cette situation. Écoute, j’ai peur de faire une connerie juste à cause de ce truc entre nous deux, juste à cause d’une passe un peu étrange mais… En ce moment, j’ai qu’une envie, c’est de te voir. De te voir tous les jours. J’veux plus essayer de t’éviter, j’veux plus faire ça, admit-il maladroitement. Je vais... essayer de quitter Océane.
Les mots résonnèrent comme un coup de poing dans l’air. Sacha sentit son souffle se bloquer. Il avait rêvé de ça, ces dernières nuits, de ce moment où le couple se séparait, mais maintenant que c’était là, il se sentait soudain piégé.
— T’es sérieux ? Tu vas la quitter pour moi ? murmura-t-il, incrédule.
Gabin secoua la tête, comme s’il luttait contre ses propres pensées.
— Non... pas pour toi. Pour moi. Parce que je peux plus continuer comme ça, à jouer ce rôle. C’est trop dur.
Sacha déglutit, les mots restant coincés dans sa gorge. Il voulait que Gabin quitte Océane, c’était certain. Mais en même temps, il se rendait compte que tout ça impliquait bien plus qu’ils n’étaient prêts à assumer.
— Et après ? Tu crois qu’on va faire quoi, nous deux ? Qu’est-ce que tu crois qu’on est, Gab’ ?
— Je sais oas, j’en sais rien… Je veux pas me prendre la tête. J’ai juste besoin de... respirer, tu vois ? Être avec toi, sans me poser toutes ces questions.
Adossé contre le mur, il le regardait sans un mot. Il fronça légèrement les sourcils, se demandant où tout ça allait les mener. Ça sonnait tellement... irréaliste.
— Tu vas vraiment la quitter, Océane ? demanda-t-il, la voix un peu trop aigue. Ou c’est encore une idée que t’as dans la tête, sans savoir si tu vas le faire ?
— Ouais... Je crois. Je sais pas comment encore, mais j’arrive plus à continuer comme ça, dit Gabin, presque à mi-voix, comme s’il avait peur de ses propres mots.
Sacha sentit un mélange de satisfaction et de panique monter en lui. Il avait imaginé ce moment, pensé à ce que ça impliquerait. Mais maintenant que Gabin était à deux doigts de tout lâcher, tout ça semblait soudain bien plus réel, bien plus effrayant. Il acquiesça finalement, un mélange d’appréhension et d’espoir dans son regard.
— D’accord, murmura-t-il.
Ils quittèrent la chambre ensemble, un accord tacite scellé entre eux, même si les mots n’avaient pas été prononcés. Une nouvelle étape se dessinait, mais l’ombre de ce qu’ils allaient laisser derrière eux pesait lourdement.

Vision NocturneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant