14. Retrouvailles brutales

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Quelques minutes plus tard, il se tenait devant le miroir de la salle de bain, ajustant sa coiffure avec un mélange de nervosité et d'anticipation. Quand Émilie entra dans la pièce, ses yeux brillaient d'excitation.
— Tu vas être magnifique comme ça !
Sacha se força à sourire.
— Merci…
Émilie l’entraîna à l'extérieur. Alors qu'ils marchaient dans la nuit fraîche, elle parlait avec enthousiasme de l'endroit où ils se rendaient. À mesure qu'ils approchaient du club, Sacha commença à ressentir un léger doute.
Arrivés dans une rue un peu plus sombre, sa sœur regarda son téléphone et ralentit.
— Euh, attends… Je crois que c’est par là.
Il la regarda, un frisson d'incertitude lui parcourant l’échine.
— Tu es sûre que tu connais cette boîte ?
Émilie se tourna vers lui avec un sourire désinvolte.
— Oui, enfin, c’est juste que… j’y suis allée la dernière fois avec des amis, et on a un peu… trop bu. Je ne me souviens pas très bien du chemin.
Sacha plissa les yeux, mais décida de lui faire confiance.

Ils marchèrent encore quelques minutes avant d’atteindre un bâtiment où une longue file d'attente serpentait à l’entrée. L’atmosphère était vibrante, presque électrique. Émilie semblait à l’aise, mais Sacha commençait à ressentir une légère anxiété. En regardant autour de lui, il remarqua des groupes de jeunes surexcités, rigolant, s’accrochant les uns aux autres et criant presque alors qu’ils n’étaient pas encore entrés.
— C’est vraiment bondé, murmura-t-il, un brin mal à l'aise.
Émilie haussait les épaules.
— C'est normal, c’est un bon club. Tu verras, on va bien s’amuser.
En attendant dans la file, Sacha observa les gens qui entraient et sortaient.
— Tu sais, ce genre d'endroit, c'est parfait pour danser pour que je puisse danser sans me faire emmerder.
Il n’eut pas le temps de lui demander ce qu’elle voulait dire par là, qu’elle poussa la porte du club et qu’ils furent immédiatement frappés par l'intensité des lumières et la musique vibrante qui pulsait à l'intérieur. L'air était chargé d'une énergie électrisante, presque palpable, et le jeune homme sentit son cœur s'accélérer.

À l’intérieur, le décor était à la fois moderne et éclectique. Des néons multicolores illuminaient les murs, se reflétant sur des miroirs qui semblaient agrandir l’espace. Des projections de formes abstraites dansaient sur le sol, accompagnant le rythme entraînant de la musique électronique.
Les gens qui les entouraient étaient plongés dans l’instant. Ils riaient et dansaient, leurs visages illuminés par les jeux de lumière. Sacha remarqua immédiatement les couples homosexuels qui se tenaient par la taille, d'autres qui s'embrassaient avec passion, échappant aux conventions, enivrés par l'ambiance festive. L'atmosphère est à la fois libérée et chaleureuse, mais il fit un pas en arrière.
— Euh, tu m’as vraiment enbarqué dans une boîte gay ?
Émilie sourit, presque trop largement.
— Peut-être !
— Em’, je ne suis pas…
— Oh, arrête un peu ! T’as déjà couché avec un mec, non ?
— Ce n’est pas la même chose !
— De toute façon, on est juste là pour profiter de l’ambiance, non ?
Sacha, les joues brûlantes, tenta de protester mais n’y parvint pas.
Émilie continuait de rire alors qu'ils s'enfonçaient dans la foule colorée, et malgré son hésitation, sa curiosité le poussait à explorer ce que la nuit avait à offrir. Il se frayait un chemin dans la foule, une légère appréhension nouant son estomac. La musique pulsait à un rythme entraînant, mais il se sentait un peu décalé, presque étranger dans cet environnement vibrant. Son regard errait sur les visages souriants et les mouvements fluides des danseurs, et il se demandait s’il appartenait vraiment à cet univers.

Émilie, elle, était complètement absorbée par l’ambiance. Elle dansait déjà, se laissant porter par le rythme, un sourire éclatant sur le visage. Sacha la regardait un instant, puis détournait le regard, se concentrant sur son propre malaise. À cet instant, un homme un peu plus vieux que lui s’approcha. Il était grand, avec des cheveux frisés très bruns, et un sourire éclatant qui illuminait son visage. Il portait un t-shirt qui accentuait sa silhouette athlétique, et une paire de jeans ajustés.
— Eh, t’es nouveau ici ? demanda-t-il d’une voix chaleureuse, presque enjouée.
Sacha, pris au dépourvu, balbutia :
— Euh, oui, c’est la première fois. Je… je viens avec ma sœur.
— C’est cool ! C’est vraiment sympa ici, il y a toujours une bonne ambiance. Je m’appelle Thomas, au fait.
Il lui serra la main, surpris par la confiance qui émanait de cet homme.
— Sacha.
— Allez, viens danser ! lança Thomas, en gesticulant légèrement au rythme de la musique.
Il hésita, son instinct le poussant à reculer. Il se sentait comme un poisson hors de l’eau.
— Je ne sais pas danser… murmura-t-il, un peu gêné.
— Pas besoin de savoir danser ! répondit l’autre homme avec un sourire encourageant. Regarde les autres, ils se laissent juste aller.
Sacha regarda autour de lui, observant les corps qui se déhanchaient avec aisance. Il se sentait plus nerveux qu’excité.
— Vraiment, je… je préfère rester là, je suis un peu perdu.
Thomas plissa les yeux, amusé, mais un brin sérieux.
— Eh, les gens sont là pour se détendre, pas pour juger. Allez, juste un petit pas, tu verras, tu le regretteras pas.
Il sentait cette pression douce, mais insistante, qui émanait de Thomas. Ce dernier continuait de bouger avec un naturel qui semblait contagieux, et il finit par céder à la tentation.
— D’accord… juste un petit moment, dit-il, un sourire timide se dessinant sur son visage.
Thomas l’entraîna vers la piste, mais Sacha se sentait toujours un peu maladroit. À chaque pas, il se débattait avec sa gêne. Cependant, alors qu’il se laissait porter par le rythme, la vague d’adrénaline commença à le libérer des chaînes de son appréhension.
— Tu viens souvent ici ? demanda-t-il, essayant de masquer sa nervosité.
— Pas trop, mais j’adore l’ambiance, et je rencontre toujours des gens sympas. Comme toi, par exemple, dit-il avec un clin d’œil.
Sacha rougit, réalisant qu’il était ici, en train de danser avec un homme, loin des jugements qu’il craignait tant. Quand la chanson se termina, dans un élan de confiance, il décida de se donner un coup de pouce. Il se dirigea vers le bar, sa sœur et sa nouvelle connaissance sur ses talons. La musique pulsait toujours, et il avait besoin d’un petit coup de fouet pour chasser ses dernières hésitations.
— Allez, un shot pour se mettre dans l’ambiance ! s’exclama Émilie en riant.
Il hocha la tête, déterminé. Après tout, il était là pour s’amuser. Ils commandèrent trois shots de tequila, et Sacha avala le sien d’un trait, la chaleur de l’alcool se répandant dans son corps. Un sourire s’étira sur son visage alors qu’il se tournait vers Thomas. Ils enchaînèrent avec un deuxième shot, puis un troisième. Il commençait à se sentir plus léger, plus audacieux. La musique résonnait dans son crâne, et il se laissait emporter par le rythme, se rapprochant de plus en plus de Thomas.
Bientôt, il se mit à danser plus près, laissant ses hanches se balancer au rythme entraînant. Thomas, enjoué, lui lança un regard complice, ses yeux pétillants d’amusement.
La tension entre eux était palpable, et Sacha se sentit envahir par une vague de désir. Il n’était plus juste un homme dans une boîte, il était là, vivant. Les mouvements de l’homme étaient sûrs et sensuels, et il se sentait à la fois attiré et nerveux. Il n’arrivait pas à chasser Gabin de sa tête. Alors que leurs corps se frottaient presque l’un à l’autre, il avait des flashs dans sa tête, des souvenirs de sa relation avec son ami, de leurs embrassades.
Quand il sentit le souffle chaud de son partenaire de danse dans son cou, il sentit une vague de chaleur l’envahir. L’alcool avait brisé ses dernières réserves, mais une part de lui était encore hésitante. Lentement, son regard bascula sur les lèvres de Thomas et son instant de doute fut balayé. Alors, dans un mouvement audacieux, l’homme l’attira encore plus près. Leurs lèvres se touchèrent doucement d’abord, puis se firent plus insistantes. Sacha se perdit dans ce baiser, oubliant tout ce qui l’entourait, même les hésitations qu’il avait eu plus tôt. C’était nouveau, exaltant, et enivrant.
Ils s’éloignèrent légèrement l’un de l’autre, leurs yeux s’accrochant, et, enivré par l’instant, il se pencha vers lui de nouveau. Leurs langues s’entremêlèrent avec une intensité qu’il n’avait jamais ressentie auparavant. Et alors qu’il s’enfonçait dans cette sensation euphorique, un frisson d’alarme parcourut son échine. Il sentit une ombre se glisser derrière eux, mais il était trop tard.

Un bras se glissa entre leurs deux corps, une force brutale qui le sépara violemment de l’autre homme. Sacha, choqué, ne comprit pas tout de suite ce qui se passait. La musique battait encore dans ses oreilles, mais son cœur s’arrêta un instant quand il vit le visage familier de Gabin.
Il était là.
Ses yeux étaient enflammés de colère, et son expression, à la fois dure et dévastée, lui fit l’effet d’un coup de poing.
— Qu’est-ce que tu fais, espèce de connard ? rugit Gabin en direction de Thomas, les poings serrés.
Sacha recula d’un pas, encore sous le choc.
— Gabin, attends…
Mais son ami ne l'écouta pas. L’air menaçant, il se rapprochait encore du danseur.
— Écoute, je… je savais pas que c’était… Je pensais pas qu’il avait un copain.
— Tu sais quoi ? Dégage avant que je ne te fasse regretter d’être ici.
L’homme n’attendit pas deux fois et recula lentement, comme effrayé par une bête sauvage. Gabin se retourna alors vers lui, et le regarda comme il ne l’avait jamais regardé, les muscles tendus et les yeux brûlants de rage.
— Je ne peux pas croire que tu puisses faire ça.
Sacha, acculé par la tension, chercha désespérément à l’apaiser.
— C’est pas ce que tu crois, je le connais pas ce gars.
— Et tu crois que c’est mieux d’embrasser un inconnu ?
— Non ! Mais… C’est juste un baiser, rien de plus.
— Rien de plus parce que je suis arrivé ! s’exclama Gabin, sa colère se mêlant à une douleur profonde.
— Je suis désolé, je ne savais pas que… que tu allais venir !
L’atmosphère devenait insoutenable, et Sacha réalisa qu’ils devaient sortir de ce lieu.
— Viens, s’il te plaît. Allons dehors.
Il attrapa Gabin par le bras et l’entraîna à l’extérieur, l’adrénaline pulsant dans ses veines. Une fois dehors, le vent frais les frappa, et il se retourna vers son ami, qui était toujours à bout de nerfs.
— Gab, respire…
Mais Gabin ne répondit pas. Il se laissa glisser contre le mur, se laissant tomber au sol, la tête entre les mains. Sacha sentit une douleur sourde se réveiller en lui. Il s'agenouilla à côté, hésitant sur les mots à choisir.
— Je suis désolé pour ce qu’il s’est passé mais… On a jamais été ensemble Gab. Et, à vrai dire, je pensais que ça ne te ferait ni chaud ni froid.
Son ami se contenta de renifler sans rien répondre.
— Si j’avais su que… Enfin, que tu ne voulais pas que je vois quelqu’un d’autre, j’aurais compris…
— Je sais, répondit-il, toujours la tête dans les mains. C’est moi qui suis désolé.
— Comment ça se fait que tu sois là ?
Gabin leva enfin les yeux vers lui, les joues humides.
— Ça fait depuis deux jours que j’essaie de te joindre. Mais tu m’as bloqué de partout ! Tu m’as bloqué putain. Je pensais pas que tu ferais ça.
— Désolé… C’est Émilie qui m’a conseillé, juste pour la semaine.
— Mais je comprends pas ce que j’ai fait pour que tu réagisses comme ça. Enfin, je sais que… Ça s’est pas passé exactement comme tu voulais, mais…
— Je t’en voulais pas Gab, c’est juste que j’avais besoin d’être loin de toi.
— Ouais bah… J’arrivais pas. J’arrivais pas à être loin de toi. J’arrêtais pas de penser à ce que t’avais dit. J’ai jamais vraiment pensé que notre relation c’était rien. Je te promets. C’était juste plus simple de dire ça… Putain, je sais pas si tu te rends compte. Y a deux semaines, j’étais encore en couple avec une meuf. C’est vraiment dur pour moi.
— Je sais, c’est dur pour moi aussi, c’est juste que-
— Que t’as plus de couilles que moi, je sais.
— C’est pas ce que j’ai dit.
— Je t’aime, d’accord ? Je ne supporte pas de te voir avec quelqu’un d’autre. Je t’aime et je veux être avec toi, vraiment.
Les mots frappèrent Sacha comme un coup de poing. Il se sentit submergé et ne sut quoi répondre tandis que son ami le fixait fébrilement.
— Dis quelque chose… Je t’en supplie dis quelque chose.
— Je… Je t’aime aussi Gab, tu le sais.
Gabin écarquilla les yeux, surpris, et fondit sur lui. Ils partagèrent un baiser humide de larmes mais plein de promesses.

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