Mon souvenir perdu (Mein verlorenes Gedächtnis)

Chapitre 18

     Je me balade entre les rayons de livres sans but précis, ou peut-être que passer le temps l'est ? J'erre tellement dans le bâtiment que quelques personnes me trouvent suspect et bizarre mais surtout je me retrouve dans le coin "manga".
"Pour enfant." "Pour ados." "Shōjo." "Shōnen."
Il y a tellement de catégories !
Je pense qu'on le comprend bien, je ne suis jamais allé dans une bibliothèque. Ou du moins, pas pour des lectures personnelles mais pour mes études.
Malgré mon mécontentement du début, le silence de cette bibliothèque apaise mes nerfs tendus. Et marcher occupe définitivement mon esprit contre ma gêne avec Bastian.
Bon, pas vraiment puisque j'y repense maintenant.
  'B... L' ? 'BL' ? C'est quoi ce genre ? J'y connais vraiment rien en lecture...
  Par curiosité, je prends un manga au hasard sur l'étagère et le feuillète rapidement. Apparemment pas assez puisque j'ai pu voir des scènes très... comment dire... voilà.
  Troublé, je repose le livre à sa place.
Je ne savais pas que des hommes pouvaient faire ça entre eux...
  "Vous en lisez ?"
  Je sursaute quand je me rend compte que quelqu'un est apparu à côté de moi. J'extirpe mes doigts de l'œuvre et tourne la tête. Tout ce que je vois est une belle jeune femme.
Elle a la main devant la bouche quand elle a vu ma réaction, elle est tout aussi surprise que moi. Elle doit se sentir coupable.
  "Oh ! Excusez-moi... Je ne voulais pas vous faire peur. C'était déplacé de ma part. dit-elle en se penchant en avant respectueusement.
  Je secoue la tête, un rire gêné l'accompagnant.
  - Ne vous en faites pas ! Ça arrive à tout le monde." dis-je en secouant mes mains devant moi.

(nda : ici, les points d'exclamation sont pour appuyer sur leurs émotions et non sur leur tonalité puisqu'ils sont dans une bibliothèque :)

  Elle se redresse et on rencontre enfin nos regards. Elle est incroyablement jolie et à de beaux cheveux soyeux.
Alors que je l'observais inconsciemment, elle aussi le fait. Sauf que j'ai l'impression que c'est plus comme une évaluation. On dirait qu'elle étudie mes traits physiques. Mais ça ne me dérange pas tant que ça. Je n'ai jamais eu de chance avec les filles alors je ne m'en plains pas.
"Je m'appelle Eva Gallo.
Je me disais qu'elle avait un petit accent !
- Et moi, Joon-ho Jisung. dis-je avec un sourire simplet. Mais d'ailleurs, pourquoi cette question ? Vous en lisez ?"
Après cette question, elle évite mon regard. Malgré son geste qui suppose qu'elle veut le cacher, ça n'est pas du tout le cas. Elle a un sourire très élargie, comme s'il en disait beaucoup plus que ce que ça bouche le peut.
  Je ricane légèrement, un peu nerveusement puisque je n'ai jamais parlé à des filles à part ma mère, mais surtout parce qu'elle est amusante.
  Alors qu'elle fait son "cirque", sans être méchant, je la regarde de haut en bas et remarque sa tenue formelle.
  "Que fait une femme d'affaires dans une bibliothèque ? Sans paraître impoli. demandé-je soudainement.
  - Oh ? Eh bien... elle prend un "BL" et le tient contre sa poitrine. Je viens emprunter un tome."
  Mais oui ! Pourquoi je pose cette question ? C'est logique pourtant ! (à chacun sa logique...)
  Je me tape le front intérieurement.
Rahlala, je ne sais vraiment pas comment me comporter avec les femmes. C'est ridicule et humiliant.
"Et vous ? Que faites-vous ici ? Une petite lecture innocente ?
- Eh bien, je suis en pause. Je sais que ça peut paraître surprenant vu ma tenue, mais je travaille à Eclipse Architects. Je suis ici pour passer le temps avant de reprendre le boulot."
  Oui parce que je porte un sweat-shirt et un jean, pas un costume-cravate comme on peut s'y attendre quand on parle d'un salarié travaillant dans une entreprise aussi prestigieuse. Je ne comprends pas pourquoi on ne m'a toujours pas fait de remarque dessus d'ailleurs.

  Après quelques minutes de discussion, on finit sur une touche de nos professions. Des trucs d'adultes quoi.
Elle est secrétaire dans un cabinet d'architecte. Ils sont indépendants et pas si nombreux. Et pourtant, ils sont très demandés et bien notés.
  Alors qu'elle s'apprête à y aller pour rejoindre son travail, elle fouille dans l'avant poche de son veston et y sort une carte. Elle me la tend.
  "Tenez, c'est ma carte professionnelle." dit-elle avec un clin d'œil et un sourire amusé.
  Je serais fou de ne pas l'accepter, donc je la lui prends avec un sourire chaleureux.
  "Merci, Mlle. Gallo. J'aimerais avoir une carte aussi mais ce n'est pas le cas donc je vous enverrai un message plus tard.", remercié-je avant de la saluer en retour et la regarder s'en aller.

  Suite à cela, je décide moi aussi de retourner à mon lieu de travail.
Elle est sublime cette "Eva".
Les femmes en costume sont tellement classes et charmantes.
  Quand je suis une fois de plus assis à côté de Bastian dans son bureau, je me rappelle pourquoi je me suis rendu à une bibliothèque en premier lieu.
Qu'on m'enterre vivant mais loin de lui.