Chapitre 5

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KURTIS


Je n'ai jamais eu autant la frousse.

C'est faux... au fond de toi, tu sais que c'est faux.

Ce qu'il s'est passé hier dans le self m'a foutu une peur bleue. Si je suis ici, c'est pour fuir mes ténèbres. Ce que je veux, c'est devenir une meilleure personne. Ce n'est pas en renouant avec d'anciens démons que je pourrais m'en sortir.

Je foule les jardins aux côtés de Gabin qui parle fort, en exagérant ses  gestes pour que je puisse me concentrer sur lui. Je dois avouer, que ça ne fonctionne qu'à moitié ce matin.

— Je suis content que nous ayons notre matinée de libre, si tu savais après la nuit que j'ai passée... Je ne suis pas contre le fait de ne pas utiliser mes muscles, s'exclame-t-il en me faisant un clin d'œil lubrique.

Je l'ignore en levant les yeux aux cieux.

Je sais très bien pourquoi il n'a pas passé la nuit au dortoir, je pourrais en être désolé mais ce n'est pas le sentiment qui prédomine en moi. C'est plutôt la honte.

J'ai tellement pété un câble que je l'ai foutu dehors, j'ai hurlé en retournant notre chambre et j'avais besoin de solitude. Ce n'était en aucun cas contre lui, il doit le savoir vu qu'il ne m'en tient pas rigueur  et surtout n'aborde pas le sujet épineux.

— À ce propos, je...

Il tend un doigt devant mon visage, signe qu'il ne s'intéresse pas à mes excuses.

— Ce n'est rien, je ne t'en veux pas. Tu en avais besoin, c'est ok.

Un faible sourire étire mes lèvres. Il est mon plus proche ami et il aurait pu fuir après tout ça mais il est encore là.

Je ne mérite pas tant de reconnaissance.

— Tu ne veux pas connaître l'histoire de...

Il devient bien silencieux soudainement, ça ne lui ressemble pas.

— Rentre.

Sa voix claque l'air, ça non plus ce n'est pas dans ses habitudes. Elle me paralyse sur place, mes membres sont comme de la pierre.

— Gab...

Je n'ai pas le temps de souffler son prénom entièrement que le mien résonne. Il sort comme un cri du cœur, d'une voix que je ne connais pas même si elle me semble familière, elle est grave.

Je comprends alors que ce que m'ordonnait mon colocataire était un conseil au moment où je le vois avancer vers nous. Je recule précipitamment, terrifié, je ne me sens pas vraiment partir me prenant les pieds dans une racine au sol.

L'homme au regard océan tend sa main vers moi, comme pour m'empêcher de tomber mais Gabin saisit son bras pour lui bloquer l'accès à mon corps. Je chute, mon postérieur cognant l'herbe malgré mes paumes qui ont amortit ma chute.

Le moment est si confus que je ne m'étais pas rendu compte tout de suite, que c'était Priam qui me faisait face.

— Ne le touche pas ! crache Gabin.

Je ne l'avais jamais vu ainsi avant. Il fait barrage de ma personne à l'aide de son corps. Tendu, il  se tient droit et semble prêt à contrer un bulldozer pour me protéger.

— Lâche-le ! s'agace une voix féminine.

Alors que celui qui souhaite me parler retire vivement son bras de la prise de Gabin, son amie rousse pointe son index vers son offenseur.

— Chelsea, c'est bon. Il ne m'a pas fait mal, énonce-t-il.

Pourtant il se tient le poignet de son autre main et le frotte comme s'il avait été brûlé. Mais je reconnais cette sensation, celle de saleté quand une main te touche contre ton gré. C'est ce qui me fait comme une énorme pointe au cœur, je serre mon t-shirt ayant du mal à respirer.

Nos âmes jumellesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant