Chapitre 18

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Dans la chambre des sœurs Durand, les rires éclataient et l'air était rempli de l'odeur poudrée des cosmétiques. Marie-Anne, un sourire taquin sur les lèvres, se tenait derrière Anna-Louise, ajustant son col avec une exagération théâtrale.

- Alors, petite sœur, prête à éblouir tout le Cap-Haïtien ? Et surtout... Milo Henry, bien sûr ! lança Marie-Anne avec un clin d'œil complice.

Anna-Louise roula des yeux, résistant à la tentation de laisser paraître le moindre intérêt.

- Oh, Marie-Anne, tu sais bien que je ne m'intéresse pas à tout ça... Ce n'est qu'un bal.

- Oui, oui, bien sûr, juste un bal; répondit Marie-Anne en ricanant, tandis qu'elle épinglait une broche scintillante à la robe d'Anna-Louise. Mais si c'est vraiment le cas, pourquoi t'es-tu assurée que ton corset soit si serré hum? Ah, Milo n'aura d'yeux que pour toi ce soir !

Anna-Louise sentit une chaleur prendre possession de ses joues , mais se défendit avec dignité.

- J'ai juste envie d'être élégante, c'est tout. Milo peut bien regarder ailleurs s'il le veut. Je préfère danser avec quelqu'un qui sache tenir une conversation.

- Oh, bien sûr ! Une conversation fascinante sur la pluie et le beau temps pendant que tu te pâmes sous ses beaux yeux ! Marie-Anne éclata de rire. Mais ne t'inquiète pas, je serai là pour te sauver d'un ennui mortel si jamais tu t'embarrasses trop.

Les deux sœurs se regardèrent à travers le miroir, chacune dans sa propre réflexion. Marie-Anne, en robe bleue, légère et fluide, semblait incarner la mer elle-même. Le tissu en soie ondoyait autour d'elle comme des vagues, et un collier de perles ornait son cou gracile. Anna-Louise, elle, avait opté pour une robe plus sobre, mais non moins élégante. D'un blanc crème, sa tenue épousait ses formes avec retenue, la dentelle délicate ornant les manches et le bas de la robe ajoutant une touche subtile d'élégance. Elle avait toujours préféré la simplicité, là où Marie-Anne ne craignait pas d'attirer l'attention.

- Les filles ! La voix claire de Madame Durand retentit dans le couloir. La voiture vous attend, dépêchez-vous. Elle entra dans la chambre avec un sourire radieux, ses yeux brillants d'orgueil. Mes deux perles, vous êtes ravissantes.

- Merci, Maman, répondirent-elles en chœur. Marie-Anne tourna sur elle-même pour montrer sa robe, tandis qu'Anna-Louise vérifiait une dernière fois les détails dans le miroir.

Madame Durand s'avança pour ajuster une mèche rebelle sur le front de Marie-Anne avant de poser ses mains sur leurs épaules.

- Votre père sera tellement fier. Allons-y, mes chéries, c'est une grande soirée qui nous attends.

En bas, Monsieur Durand les attendait, vêtu de son élégant costume noir. Il leva un sourcil approbateur en les voyant descendre les marches.

- Eh bien, mes demoiselles, vous allez voler la vedette ce soir ! Il les prit tour à tour dans ses bras.

Arrivées au bal des Marcadieu, la grandeur de la maison les impressionna immédiatement. Nichée dans une rue large et bordée de palmiers, la demeure des Marcadieu, avec ses balcons en fer forgé et ses hautes portes en bois, semblait tout droit sortie d'une autre époque. Des lanternes accrochées aux branches des arbres projetaient une lumière dorée sur les invités qui affluaient, créant une atmosphère chaleureuse et accueillante.

À l'intérieur, les décorations respiraient l'élégance haïtienne traditionnelle. De grandes nappes en lin brodé couvraient les tables, tandis que des bouquets de fleurs tropicales, hibiscus, bougainvilliers, et roses de porcelaine, se dressaient dans des vases en terre cuite au centre des pièces. Des guirlandes de lumière ornaient les plafonds, et dans chaque recoin, des petites touches de culture haïtienne s'invitaient : des masques sculptés en bois, des tableaux colorés représentant des scènes de marché ou des paysages luxuriants.

Le retour des beaux joursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant