Le vent souffle sur mon visage, les genoux contre la terre et les mains jointes je prie pour ma famille. Depuis ma discussion avec Akira ce matin-là, une dizaine de jours se sont écoulés, et aujourd'hui je m'apprête à partir pour Tokyo.
-Alors comment tu te sens ?
Je tourne la tête et vois l'ami de mon père, il me sourit et s'approche, je me redresse en secouant la terre sur mes genoux et m'incline.
-Mieux.
-Je suis content de l'apprendre, tes affaires sont prêtes ?
-Oui... Dis-je en fixant les tombes.
-Ne t'en fais pas, je t'ai fait une promesse, je m'occuperai d'eux. Dit-il en les regardant à son tour, tiens prends ça.
Je tourne les yeux vers ses mains et le vois sortir une bourse de sa manche.
-Tu en auras besoin une fois là-bas.
-Non je ne peux pas accepter ça, vous en aurez besoin.
-Prends. M'ordonne-t-il, c'est le moindre que je puisse faire pour toi.
J'ignore ce que mon père avait fait pour qu'il soit autant généreux et gentil avec moi mais je n'oublierai jamais son geste. Je prends la bourse et le regarde de nouveau, il recroise les bras et observe l'horizon.
-J'ai envoyé une missive à mon ami, il t'attendra dans dix jours à l'endroit dont je t'ai parlé.
-Comment je peux vous remercier ?
-Tout simplement en avançant, tu ne penses pas que ton père t'aurait réprimandé en te voyant dans cet état ?
Un léger rictus s'installe sur mon visage en imaginant la scène. Il a raison mon père m'aurait surement attrapé par la ceinture en voyant mon état.
-Bien, je te souhaite bon voyage Kaito.
Il me regarde une dernière fois avant de faire demi-tour et de descendre les marches menant au sanctuaire. Je reste encore un moment à prier et retourne douloureusement au campement où je termine de rassembler le peu d'affaires qu'il me reste dans un sac en toile que je jette sur mon épaule, le cœur lourd de souvenirs et de promesses non tenues, le katana accroché à ma ceinture je sors de la tente. J'avance vers le seul chemin qui mène à la ville, le village en ruines derrière moi est une cicatrice ouverte qui contrairement à celles de mon corps, ne se refermera jamais.
Le premier segment de mon voyage se fait à pied. Le chemin est long et sinueux, serpentant à travers des montagnes recouvertes de forêts denses. Chaque pas me rappelle les journées passées auprès de mes amis, de ma famille, des moments de pure innocence qui semblent maintenant appartenir à une autre vie. La marche est ardue, mais la douleur physique est un répit bienvenu par rapport au tourment intérieur que je ressens.
Les nuits, elles, sont froides et silencieuses. Je dors à la belle étoile, utilisant mon sac comme oreiller et une vieille couverture en laine pour me tenir chaud. Les cris des animaux nocturnes et le murmure du vent dans les arbres sont devenus mes compagnons solitaires. Chaque crépitement dans la forêt me rappelle les esprits qui ont détruit mon village, mais je me force à rester calme et à ne pas céder à la peur.
Après plusieurs jours de marche, j'arrive enfin dans un petit village portuaire. Les rues sont animées, remplies de marchands criant leurs prix, de pêcheurs rentrant avec leurs prises du jour, et de voyageurs fatigués cherchant un endroit où se reposer. Je trouve une auberge modeste près du port, un endroit où je peux enfin me nettoyer et manger un repas chaud. Le propriétaire de l'auberge, un vieil homme aux yeux perçants, me regarde avec une curiosité mêlée de sympathie. Il ne pose pas de questions, mais son regard en dit long.
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KAITO SUZUKI : L'âme recherchée (Tome 1)
FantasyJapon ère Meiji, Fraîchement diplômé samouraï, Kaito Suzuki n'a pas le temps de jouir de son nouveau titre. Son village et sa famille se font décimer sous ses yeux par ce qu'il pensait être l'impossible. Les ombres. Des entités effroyables et redou...